The Demerara Distilleries 2.0
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article est à but non commercial. Si vous ne souhaitez pas voir
apparaitre votre photo ici, veuillez me contacter et je l’enlèverai
immédiatement. La source est indiquée pour chaque image qui ne
m’appartient pas.
Guyana - Les
distilleries et leur histoire
Traduction de Nico
Un
travail en 10 chapitres sur la Guyane Britannique coloniale (Guyana),
le rhum et sa transformation vers la modernité.
Préambule
![]() |
Carte
du Demerara & Essequibo (Non datée)
Source: www.gahetna.nl |
Par
cet article je souhaite informer les lecteurs qui s’intéressent
aux rhums du Demerara. Leurs origines remontent au 17è siècle avec
l’établissement des colonies Néerlandaises d’Essequibo, Berbice
et au 18è siècle, de la colonie du Demerara. Les rhums du Demerara
sont habituellement associés aujourd’hui à tous les rhums
provenant de cette région de l’état du Guyana, qui émergea des
trois colonies Néerlandaises. Après plusieurs guerres l’empire
Britannique s’empara de ces colonies au début du 19è siècle et
fonda la colonie Britannique « British Guiana ». En 1966 ce pays
gagna finalement son indépendance et fut nommé Guyana.
A
part le travail de Sasch il n’y a eu que très peu d’articles qui
ont traité sérieusement de ce sujet. La plupart restent plutôt
vagues et incomplets. Ils ne sont pas allés dans les détails de
l’origine des plantations de canne à sucre et de leur histoire.
Dans ce pays ces origines sont étroitement liées au le rhum, car
ces plantations et leurs distilleries étaient la source de ce
spiritueux. Seules les plantations les plus célèbres sont connues
des connaisseurs et amoureux du rhum. Pour autant il y a un manque
énorme d’informations quant à l’origine et la création de ces
dernières et leur fermeture définitive. Même la dernière
distillerie historique qui s’appelle Diamond (Demerara Distillers
Limited = DDL) qui a rapatrié une partie des alambics de ces
distilleries perdues ne permet pas de retracer ces informations
manquantes.
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Chapitre
1
-
La
création de la Guyane Britannique
Voici
un bref récit de l’histoire de la Guyane Britannique, qui commence
par les colonies Néerlandaises au 17è siècle. Il s’agit pour moi
d’un hobby donc veuillez prendre ce travail tel qu’il est :
l’œuvre d’un amateur. Je ne suis pas professeur d’histoire de
formation donc vous pourriez éventuellement tomber sur quelques
dates erronées. Sur certaines périodes je n’ai pas forcément
repris tous les évènements qui iraient au-delà du faisceau de cet
article. Merci de bien vouloir prendre tout cela en compte.
Les
colonies Néerlandaises Essequibo (Isekepe) & Pomeroon (Bauroma)
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La
maison des antilles à Amsterdam. 1655
Source: commons.wikimedia.org |
Selon
plusieurs auteurs l’histoire de cette colonie débute en 1616.
C’est cette année-là que la première compagnie des Antilles
Néerlandaises a dit-on construit le fort Kijkoveral sur les bords du
fleuve Essequibo. Pourtant certains indices ne corroborent pas cette
théorie. D’abord, la première compagnie des Antilles
Néerlandaises a été créée seulement le 3 Juin 1621. Il y a
également quelques incertitudes et inexactitudes quant à l’année
exacte de création de la colonie Néerlandaise le long de
l’Essequibo. Une source avance quelques éléments intéressants
qui contredisent l’établissement d’une installation fortifiée
avant 1624. Il y a aussi une autre source qui fait référence à
l’année 1616 et à l’Anglais qui deviendra plus tard gouverneur,
le fameux Major John Scott (1665-1666). [227]
Pieter
Marinus Netscher met également en doute l’affirmation de John
Scott concernant l’établissement de la colonie en 1616 et de son
premier commandeur "Captain Gromweagle". Netscher présume
un malentendu et cite celui qui sera plus tard commandeur de la
colonie entre 1657 et 1666 (Occupation Anglaise incluse) : Aert
Adrianszoon Groenewegel. Il avance que Gromweagle est une version
Anglaise déformée du nom Groenewegel qui comme je l’ai dit a
vraiment existé. Si cet homme avait construit ce fort, alors il
aurait aussi dirigé la colonie de 1616 à sa mort en 1664. Cela
ferait 48 années pleines (!) en climat tropical. Cela semble très
peu probable. Mais on peut clairement le voir en regardant les
commandeurs destinataires des courriers de la compagnie des Antilles
Néerlandaises. [228]
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La
maison des Antilles à Amsterdam. Aujourd’hui
Source: commons.wikimedia.org |
Dans
une lettre du 16 Septembre 1624, la compagnie exprime son intérêt
pour cette région côtière d’Amérique du sud. [229] Un autre
fait intéressant est que le premier commandeur probable Jacob Caniju
ou Conjin fut autorisé à rentrer chez lui le 10 Décembre 1626. Il
était peut-être en poste depuis 1624. [230] Deux lettres
ultérieures à propos de son successeur Jan Adriaenss van der Goes
et son faible salaire de 5 Livres Flamandes par mois soulignent la
présomption qu’il s’agissait seulement d’un comptoir
commercial et non d’une colonie prospère avec des plantations.
[231] [232] Il y est aussi mentionné qu’ils désiraient un
bâtiment neuf ou la réparation d’un fort déjà existant. Mais
pourquoi alors le mot « faire » (« maecken » dans le texte) et pas
« construir e» ou « réparer » ? [233] L’état pitoyable de la
« colonie » était vraisemblablement la raison pour laquelle le
conseil des IX discuta le 5 Mai 1644 de l’abandonner. Toutefois,
ils rejetèrent cette idée. [234]
Après la perte du Brésil en 1654 et les coûts occasionnés par la guerre, la DWIC (Compagnie des Antilles Néerlandaises) ne produisait que du déficit. [236] Ainsi on comprend facilement que la chambre de commerce du Zeeland essayât de se débarrasser de la colonie déficitaire d’Isekepe (Essequibo) vers 1657. L’Etat du Zeeland n’était pas opposé à une prise de contrôle de cette colonie. D’après PM Netscher aucun accord n’a été trouvé. Par conséquent ce n’était pas une surprise quand la DWIC a accepté l’offre des trois villes de Middelburg, Vlissingen et Veere. Elles offrirent de reprendre la direction et la maintenance de la colonie sous les auspices de l’Etat du Zeeland. On parvint finalement à un accord le 1er Novembre 1657. La colonie fut brièvement nommée Nova Zeelandia et fut dirigée par huit administrateurs. [236] Un an plus tôt, le 12 Octobre 1656, on trouve un lettre comportant les règlementations concernant les colons (libres) fixées par la chambre de commerce du Zeeland. Le commerce de rocou était expressément interdit aux colons. [237]
Il semble donc qu’il n’y ait pas eu de colons libres dans cette région avant cette année-là. Un autre fait semble également confirmer l’hypothèse selon laquelle il n’y avait que des employés de la compagnie à Essequibo. Je cite:
« Par « colons », toutefois, on ne doit pas comprendre les laboureurs, ni encore les planteurs libres. « La colonie d’Essequibo », dit la chambre de commerce du Zeeland elle-même en 1751 après des recherches dans ses propres archives, « depuis son début, dès l’an 1656, était habitée par les seuls employés de la chambre de commerce du Zeeland, qui… à cette époque étaient appelés ‘colons’ et étaient en poste pour mener le commerce, qui prit alors de telles proportions qu’en quelques années plus de cent barriques de teinture de rocou arrivaient à la fois. »---(Nederlandsche Jaerboeken, 1751, p. 1097.) » [238]
Jusqu’à
1656 il n’y avait toutefois aucun colon ou planteur libre à
Essequibo. La DWIC semble l’admettre dans ledit album de 1751.
Ainsi, l’existence de planteurs et plantations non détenues par la
compagnie était peu probable. Si l’on se fie à cette déclaration
de la DWIC, la toute première colonie s’y établit entre 1656 et
1658. Avant cette période ladite « colonie » n’était rien de plus
qu’un comptoir de commerce fortifié. Donc la date exacte où ce
comptoir de commerce a été établi ou non importe en fait peu.
Ainsi, l’affirmation du Major John Scott à propos de Gromwaegle
(chemins de Grone) prend une nouvelle consistance. Il se trouve qu’il
était à ce moment-là le commandeur de ce comptoir de commerce qui
s’est développé en colonie.
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Canne
à sucre
Source: commons.wikimedia.org |
Dans
une lettre, que l’on peut apparemment attribuer à l’année 1657
(aucune date exacte n’est mentionnée), la requête d’une
allocation de terre pour la colonisation sur la côte de Guyane
(c’est-à-dire Essequibo ou Pomeroon) apparait. [239] Le fait
intéressant est alors : Un certain Aert Adriaanszoon
Groenewegel fut nommé par les administrateurs comme nouveau
commandeur et a été envoyé à la colonie avec Cornelius Goliath le
2 Février 1658. Ce dernier remplissant le rôle d’agent des
douanes et d’ingénieur de la colonie. Après son arrivée
Cornelius Goliath créa un nouveau village sur les rives du Pomeroon
nommé "Niuew Middelburg" et sur la côte, un fort appelé
Nova Zeelandia. Il s’agit donc probablement de l’homme que le
Major John Scott désignait comme "Captain Gromweagle".
Netscher mentionne également que pendant les années 1658 et 1659
quatre ou six bateaux avec de nouveaux colons atteignirent la
colonie. Certains d’entre eux étaient des réfugiés de l’ancienne
colonie brésilienne. [240]
On
n’a pas planté de canne à sucre sur la colonie dès 1658, car
Netscher parle d’un sucre de Nova Zeelandia mentionné en l’an
1661. D’après ses affirmations on s’est intéressé à cette
plante à cette époque. On y extrayait alors du sucre mais toujours
à la main. Ce devait être un travail vraiment difficile. [241] Ce
n’est qu’en 1664 que l’on retrouve la requête d’un homme
nommé Jan Doensen qui souhaite construire un moulin à sucre à
Brouwersboeck sur la rive Nord du confluent des deux fleuves Cuyuni
et Mazaruni. Ce moulin était opéré non plus à la main mais par un
cheval. [242] [243]
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La
bataille des quatre jours, 11-14 Juin 1666
Source: en.wikipedia.orgSeconde guerre Anglo-Néerlandaise (1665 – 1667) |
Toutefois,
il y eut plusieurs guerres qui balayèrent l’Europe durant les
siècles précédents. En 1665, la seconde guerre Anglo-Néerlandaise
commença, et dura jusqu’en 1667. [244] Et comme souvent les
colonies étaient directement affectées. Les Anglais conquirent la
colonie Essequibo en 1665. Plus tard la colonie alors Anglaise fut
ravie par les Français. Les années suivantes les Anglais furent mis
dehors par une expédition Néerlandaise venant de Berbice. La
colonie avait probablement été pillée, surtout par les Français,
car elle avait été temporairement entre les mains des Anglais. Les
Pays-Bas et la France étaient alliés dans cette guerre.
Malheureusement, les Français ne purent pas conquérir le fort donc
la colonie resta aux mains des Anglais jusqu’à l’arrivée du
commandeur Mathijs Bergenaar de Berbice en 1666. [245] [246] D’après
Netscher, ce raid par les Britanniques et les Français affaiblit les
régions de Pomeroon et Moruca pendant longtemps car ils durent se
remettre du pillage. Essequibo, toutefois, fut relativement peu
touchée en comparaison. [246]
Après
l’invasion Anglaise et l’occupation de la colonie de 1665 à 1666
les trois villes de Middelburg, Vlissingen et Veere décidèrent de
transférer la responsabilité de la colonie à l’Etat de Zeeland
en 1669. L’Etat, toutefois, n’éprouvait aucun intérêt pour ce
morceau de terre et rendit la colonie à la DWIC le 11 Avril 1670. La
compagnie elle-même rendit la colonie à la chambre de commerce du
Zeeland qui avait désormais le monopole sur le commerce à
Essequibo. Cela entrainera plus tard des difficultés pour la
deuxième DWIC. [247] Mais il semble qu’elle n’était pas la
seule à se rendre à la colonie. On mentionne « des hommes libres
qui ont la permission de se rendre à Essequibo pour y établir des
plantations » dans une lettre datée du 14 Juillet 1670. [248] [249]
[250]
En
raison de difficultés financières, la charte de la première DWIC
ne fut pas renouvelée. Toutefois, à cause de la grande demande en
esclaves et aussi à cause du fait qu’il y ait des colonies
installées, une seconde DWIC fut fondée en 1675. Les membres du
conseil furent réduits de dix-neuf à dix. Le capital fut également
réduit à six millions de Florins. [251] Après l’établissement
d’une deuxième DWIC le nouveau conseil des dix décida de
transférer de nouveau les activités administratives et le contrôle
du commerce d’Essequibo à la chambre de commerce du Zeeland. [252]
C’est ce monopole commercial que le commandeur de la colonie
d’Essequibo, Abraham Beekman, essaya de casser afin de permettre le
libre échange pour chacun avec la colonie autour de 1678-1679.
Néanmoins, cela ne plut pas vraiment à la chambre de commerce du
Zeeland qui l’interdit expressément en 1681. Il était permis aux
membres de la chambre de commerce du Zeeland de ne traiter qu’avec
la colonie. [253]
En
1686, il y aura une nouvelle tentative pour gagner du terrain dans
l’Ouest de la colonie d’Essequibo sur le fleuve Pomeroon. Un
certain De Jonge (Jacob Pieterzoon de Jonge) fut nommé par la
chambre de commerce du Zeeland comme commandeur de Pomeroon et envoyé
des Pays-Bas à la colonie en 1686. [254] Dans une lettre du
commandeur Abraham Beckman du 4 Novembre 1687, est mentionné le
nombre de planteurs libres qui à la date de la lettre était de 18.
Ils se trouvaient autour du fleuve Mazaruni. [255] Toutefois, la
colonie était encore menacée alors que la guerre se préparait en
Europe. En 1688 la guerre des neuf ans entre la France et les
Pays-Bas commença et dura jusqu’en 1697. [256] Une fois de plus
les colonies furent directement touchées par cette guerre. La
colonie Pomeroon fut limogée seulement trois ans après son
établissement par un corsaire Français le 30 Avril 1689. Ainsi prit
fin l’indépendance de la colonie Pomeroon qui fut confiée à
l’administration de la colonie Essequibo et de son commandeur.
[257] Le 15 Novembre 1689, la chambre de commerce du Zeeland décida
de réduire toute la propriété de la compagnie de Pomerron et d’y
laisser seulement trois hommes, la réduisant à un poste
d’observation. Tous les colons y étaient alors sans défense et il
semble qu’ils aient tous progressivement abandonné le fleuve
Pomeroon. [258]
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Bataille
de Denain (1712)
Source: commons.wikimedia.orgGuerre de succession Espagnole (1701-1714) |
Sur
une liste d’équipage du 6 Septembre 1691 sont mentionnées trois
plantations de la compagnie à Essequibo (Peolwyck, de Hope, de
Fortuyne). [259] La compagnie était composée de 3-4 plantations de
canne à sucre à la fin du 17è siècle. Il y avait entre 12 et 15
plantations privées qui cultivaient la canne à sucre. Toutes ces
plantations se trouvaient sur les rives des fleuves Mazaruni, Cuyuni
et Essequibo. [260] En voila de la culture de canne à sucre. Dans
une lettre datant du Samedi 24 Octobre 1701, le Rhum (ciltum) et la
mélasse (syrup) sont mentionnés en tant que monnaie d’échange
sur la colonie. Le commandeur y déplore aussi la difficulté d’avoir
accès à de bons chevaux car la guerre en avait rendu le commerce
presque impossible. On avait besoin de ces chevaux pour les moulins
(comme le premier bâti en 1664). [261] De quelle guerre parlait-on
ici ? En 1701, la guerre de succession espagnole commençait et
la Hollande se battait contre l’Espagne, et encore une fois, les
colonies en pâtirent par un manque de ravitaillement. Cette guerre
dura jusqu’en 1714. Les Pays-Bas ne se battaient par que contre
l’Espagne mais aussi contre la France. [262]
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La
mention d’un distillateur de rhum, datée du 27 Juillet 1703
Source: openlibrary.org Sur la plantation Nieuw Middelburgh de la compagnie |
J’ai
également trouvé quelque chose de très intéressant. Sur une liste
d’équipage de la DWIC un certain Adriaan de la Ruel de Courtrai
est mentionné. Il était basé à la plantation de la compagnie
appelée Nieuw Middelburg Pittsburgh et sa profession était
distillateur de rhum (« Ciltum stooker » = « bouilleur
de rhum »). [263] On peut donc présumer de la production de
rhum sur cette colonie au moins depuis 1703. Une carte de 1706
dessinée par Abraham Maas montre 32-34 plantations sur la colonie
d’Essequibo. [264] Mais la guerre faisait toujours rage en Europe.
Le 18 Octobre 1708, trois corsaires Français avec environ 300 hommes
envahirent la colonie d’Essequibo. Ils tentèrent de s’en emparer
ou au moins d’y faire une razzia. Après le pillage de plusieurs
villages autour des installations et des plantations des colons, le
commandeur du fort Kijkoveral céda à la demande de tribut des
flibustiers afin d’éviter plus de dégâts pour la colonie. Le 25
Octobre 1708, la colonie se rendit au capitaine Français commandant
des corsaires, Antoine Ferry. Après paiement de 50,000 Florins sous
forme d’esclaves, biens et monnaie, les flibustiers quittèrent la
colonie. Un tiers de la rançon servit à payer les propriétaires
des 15 ou 16 domaines privés. [265]
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Carte
de la colonie d’Essequibo, datée de 1706
Dessinée
par Abraham Maas
Source: umassamherst.lunaimaging.com
|
Ceux
qui croyaient que la colonie n’aurait plus rien à craindre furent
déçus. En Février de l’année suivante (1709) deux autres
corsaires Français firent une razzia sur la colonie d’Essequibo et
terminèrent la destruction entamée par leurs prédécesseurs. Ils
pillèrent la plupart des installations encore intactes et les quatre
plantations de la DWIC. Le commandeur Van Der Heijden rapporta dans
une lettre du 09 Mars 1709 que seuls deux moulins étaient encore en
état de marche. [266]
En
1718 le fort Kijkoveral et son siège de commandeur furent abandonnés
et Cartabo (Catabo) fut choisi à la place comme nouveau quartier
général. Il était situé à proximité directe de l’ancien fort.
[267] En 1720 il y avait de nouveau cinq moulins à sucre prêts à
l’emploi. [266] La colonie se remit doucement de ces attaques.
Essequibo avait selon Netscher seulement 25-30 plantations
particulières et 4-5 plantations appartenant à la DWIC en 1735.
Pour comparer grossièrement, regardez les chiffres du Suriname de
1712 : Il y avait déjà à ce moment-là 200 plantations avec
quelques 12,000 esclaves. [268] En 1740, la résidence officielle du
commandeur de Cartabo à Fort Kijkoveral fut abandonnée et le
quartier général déplacé vers un nouveau poste à Flag Iceland.
[269] En 1740, les plantations de la DWIC furent déplacées dans les
iles Flag Island et Hog Island à cause de l’épuisement des sols.
Beaucoup de planteurs suivirent et commencèrent à déplacer leurs
plantations vers les régions inférieures du fleuve Essequibo dont
les sols étaient considérés plus fertiles. [270]
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Carte
détaillée d’Essequibo 1783
Source: gahetna.nl |
En
1740 commença la guerre de succession Autrichienne (1740-48) et cela
affecta de nouveau les colonies aux Antilles. [271] Un an plus tard,
en 1741, les planteurs revinrent sur les rives de l’Essequibo et
les régions côtières de la colonie pour y établir des
plantations. [272] La première concession de terre aux Anglais fut
probablement faite par Herman Gerlserkle en 1741 (à Thomas Wilson et
James Doig) sur l’ile de Wacquename. [270] [273] Peu après sa
prise de poste de commandeur de la colonie d’Essequibo, en 1742
Storm Van's Gravensande convainquit le conseil des dix d’exempter
tous les immigrants Anglais de taxes pour les dix premières années.
Il était même permis pour eux dans certains cas de commercer avec
les bateaux Anglais. Jusqu’ici le monopole était restreint aux
bateaux appartenant aux membres de la DWIC. Les Anglais venaient au
départ des colonies Anglaises de la Barbade et Antigua, où ils
subissaient des taxes considérables et où les sols n’étaient pas
aussi productifs que ceux des colonies Néerlandaises.
Mais
il semble que tout cela n’était du goût de la chambre de commerce
du Zeeland. Dans une lettre datée du 24 Aout 1744, figurait une
proposition de taxer l’export de rhum et de mélasse. De plus, on
dit au commandeur de se concentrer d’avantage sur la production de
sucre et de faire en sorte de limiter la production de rhum ou de
mélasse afin d’éviter que l’on préfère cette dernière à la
première. Apparemment les nouveaux Anglais avaient une perspective
économique différente de celle de leurs collègues Néerlandais.
[275] Le problème de rationnement dû à la guerre s’intensifia
dans les années 1745-46. [276]
Une
autre colonie émerge: Le Demerara
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Carte
par Storm Van's Gravesande (Aout 1748)
Source:umassamherst.lunaimaging.com
|
En
1746, Storm Van's Gravensande proposa la région du fleuve Demerara
comme nouvelle colonie subalterne à la colonie d’Essequibo. La
zone convenait bien à la canne à sucre et au coton. Alors que les
plantations d’indigo et de café déclinaient, ces deux plantes
prenaient de plus en plus d’importance. Le premier permis de
plantation de canne à sucre revint à un certain Andries Pieterse
d’Essequibo. Après 6 mois, il y avait déjà 18 grandes
plantations de canne à sucre et un nombre incertain de plus petites
plantations. C’est aussi largement grâce aux immigrants Anglais
que le sucre et le coton devinrent aussi importants dans les colonies
Néerlandaises de la région. [277] [278]
Une
carte par Storm Van's Gravensande dessinée en Aout 1748 montrait 110
plantations sur l’Essequibo et une liste d’au moins 37 noms /
plantations avec les chiffres précis de superficies de terres le
long du fleuve Demerara. [279] En 1750 Storm Van's Gravensande se
plaignait du manque de chevaux. Beaucoup de canne à sucre n’était
pas récoltée et pourrissait sur pied à cause du manque de chevaux
aux moulins. Il mentionne également dix-neuf moulins à Essequibo et
trois dans le Demerara. [280]
D’après
Netscher le commerce dans la colonie était limité uniquement aux
membres de la chambre de commerce du Zeeland. De par ce fait
Essequibo ne progressait pas beaucoup. Cette limitation était la
raison principale pour laquelle seuls quelques bateaux parvenaient
aux colonies et ramenaient les marchandises jusqu’à la république
Néerlandaise. Ce goulot d’étranglement faisait l’objet de bien
des lettres, pleines de plaintes des planteurs, adressées au conseil
des dix de la DWIC. Le conseil constata l’écart de développement,
en particulier en comparaison avec la colonie de Berbice où le
libre-échange avec tous les marchands Néerlandais était autorisé
depuis 1732. Le conseil décida de changer cela lors d’une réunion
le 11 Aout 1750. Les planteurs seraient alors autorisés à vendre
leurs marchandises aux autres colonies Néerlandaises et les
courtiers privés seraient également autorisés à commercer avec la
colonie par le biais de la DWIC. Bien sûr, la protestation de la
chambre de commerce du Zeeland était inévitable, elle vit ses
intérêts sur Essequibo en danger et défendit ses droits. Le
conflit subsista un moment. [281]
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Carte
de 1759 avec des notes
Source: dpc.uba.uva.nl |
En
1750, Storm Van's Gravensande rapporte aux administrateurs
l’édification de cinq moulins supplémentaires ainsi qu’un
problème avec les courtiers Anglais qui passaient des marchandises
en contrebande ou faisaient de fausses déclarations de cargaison
pour payer moins de taxes. [282] C’est difficile à croire mais la
dispute politique interne entre le conseil et la chambre de commerce
du Zeeland dura jusqu’en 1770. Finalement le Stadthalter
(gouverneur) de la république Néerlandaise décida par un verdict
arbitraire que la chambre de commerce du Zeeland n’avait pas le
monopole de la colonie d’Essequibo. Mais on accorda à la chambre
de commerce quelques privilèges commerciaux. Il n’était permis
aux marchands des autres chambres de commercer avec la colonie que
lorsque le 16è bateau de marchandises de la chambre de commerce du
Zeeland avait atteint la colonie d’Essequibo. Ceci valait pour une
année. C’est seulement après cela que le commerce avec les autres
chambres de la DWIC était autorisé. [283]
D’après
Netscher il y avait à peu près 60 plantations le long de
l’Essequibo et de ses iles et seulement 12-14 plantations de coton
le long des côtes en 1770. Le nombre exact de plantations de café
et de canne à sucre n’est pas mentionné. Dans le Demerara il y
avait à cette époque 130 plantations cultivant en général de la
canne à sucre et du café. Seul un tiers de ces plantations
appartenait à des propriétaires Anglais. [284]
Le conseil décida également de séparer la colonie prospère du Demerara du corps stagnant de la colonie mère Essequibo en 1773. Plus tard cette année-là la colonie du Demerara était plus grande que sa colonie mère Essequibo. Netschier écrit: « L’enfant a dépassé sa mère. » ("het child what de moeder ontwassen!") [286] En 1775 la révolution Américaine commença (1775-1783). [287] Cela mena inévitablement à des querelles entre les nations Européennes, qui soit étaient du côté de l’Angleterre, soit sympathisaient ostensiblement avec les rebelles. La république des Pays-Bas fut attirée dans ce conflit. La quatrième guerre Anglo-Néerlandaise (1780-1784) amena une fois de plus la guerre dans les colonies Néerlandaises des Antilles. [288]
En Février 1781, Sir George Brydges Rodney apparut au large des côtes des colonies Néerlandaises. Le 24 Février le commandeur Schulyenberg se rendit, ainsi que la colonie du Demerara. Il fut suivi le 8 Mars par le commandeur Trotz à Essequibo. La dernière colonie, Berbice, capitula aux troupes Britanniques seulement quelques jours plus tard via le gouverneur Koppiers. [289] [290] [291] [292] [293] [294] [305] Mais la tempête n’était pas terminée. La France s’est battue aux côtés des Pays-Bas dans le camp des rebelles. Alors ce n’était qu’une question de temps avant que les Français n’apparaissent en Guyane. Le capitaine Français Armand De Kersaint apparut le 30 Janvier 1782 à la colonie du Demerara. Jusqu’au 15 Février, De Kersaint conquit sans grande résistance les trois colonies Berbice, Essequibo et Demerara. [295] [296] [297]
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Washington
traversant le Delaware
Par
Emanuel Leutze (1851)
[La
guerre d’indépendance Américaine (1775-83)]
Source: commons.wikimedia.org
|
Après
la conquête en 1782, les Français établirent une ville sur la rive
est du fleuve Demerara, la ville de Longchamps ou « La nouvelle
ville » comme elle était également appelée sur une carte de
1783. Dans le traité de Paris de 1783 qui clora également la guerre
révolutionnaire Américaine, les Néerlandais reprirent le contrôle
des colonies Berbice, Essequibo et Demerara. En Mars 1784, les
Français quittèrent finalement les colonies et les Néerlandais
reprirent le contrôle. Après le retrait des troupes Françaises en
1784 les Néerlandais renommèrent la ville Stabroek. [298] [299]
[300] Finalement, Stabroek devint la capitale de la colonie unie du
Demerara et d’Essequibo en 1789. Il y avait désormais un
gouverneur à la tête de la colonie. Ainsi la séparation de 1773
fut une nouvelle fois défaite mais Essequibo n’était plus le
centre de la colonie au profit du Demerara. [301]
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La
bataille de Dogger-Bank
Quatrième guerre Anglo-Néerlandaise (1780-1784) Source: commons.wikimedia.org |
Fin
1791 la seconde charte de la Compagnie des Antilles Néerlandaises
(DWIC) arrivait à sa fin. Au vu des pertes importantes, des
conséquences de la guerre et de la réoccupation de la colonie en
Guyane de 1781 à 1784, il fut décidé de ne pas renouveler la
charte de la DWIC. Malgré un support financier important de la
République des sept provinces unies de Hollande en 1784, la DWIC
n’était plus solvable et mit ainsi fin à son existence le 31
Décembre 1791. Les colonies devinrent possessions de la République
le 1er Janvier 1792. Ainsi les colonies furent libérées
des entraves et limitations de la DWIC. [302] Toutefois aucun gain
significatif ne fut engrangé car le temps des Néerlandais dans
cette région était sur le point d’être révolu.
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Admiral George Brydes Rodney (1718 - 1792) Source: en.wikipedia.org |
A l’accord de paix d’Amiens en 1802 entre l’Angleterre et la France Napoléonienne, l’Espagne et la République Battave, les Anglais rendirent les colonies d’Essequibo, Demerara et Berbice aux Néerlandais. [308] [309] La paix fut éphémère comme les accords n’avaient pas été complètement respectés par la France, ceux-ci étant déjà plus que défavorables à l’Angleterre. L’Angleterre déclara donc la guerre à la France le 18 Mai 1803. [310] Le contre-amiral Britannique Samuel Hood et le lieutenant-général William Greenfield firent leur apparition au large des côtes de Guyane et la colonie de Demerara et Essequibo se rendit le 19 Septembre. Le 26 Septembre la colonie de Berbice suivit. Cette fois ci les colonies restèrent en possession de l’Angleterre. [312] [313] [314] Ainsi se termina l’histoire Néerlandaise dans cette région. [314] [315] [316]
La
colonie privée de Berbice
L’histoire de la colonie de Berbice commence en 1627. Cette année-là le gouvernement Néerlandais donna une concession à la maison Van Pere pour y développer une colonie sur le fleuve Berbice. Cet accord fut signé par Abraham Van Pere le 12 Juillet. C’était un marchand de la ville de Vlissingen et aussi un administrateur de la chambre de commerce de Zeeland. Il fut autorisé à prendre 60 colons avec lui. [317] [318] [319] Après quelques retards Abraham Van Père quitta l’Europe le 24 Septembre en direction de Berbice. [319] D’après Netscher il s’agissait d’une compagnie privée. Il n’y avait donc pas vraiment autant de correspondance que dans les deux autres colonies d’où le peu d’informations trouvées sur ses débuts. Les termes du contrat changèrent et furent adaptées au cours du temps. Le premier changement eut déjà lieu le 8 Mars 1628 puis encore en 1632. Le 18 Juin, Abraham Van Pere Junior et Peter Van Rhee furent inclus au contrat. Ce dernier changement fut encore amendé le 20 Mai 1660 et dura jusqu’en 1678. [320] Nous y reviendrons plus tard. Après expiration de la première charte et au début de la deuxième DWIC, quelques difficultés apparurent. [251]
La
seconde DWIC réclama également la colonie de Berbice lors de sa
fondation près de la colonie d’Essequibo. La maison Van Pere
insista toutefois sur les susmentionnés traités existants qui
avaient déja changé vers 1660. Mais le conseil de la seconde DWIC
rappella que tous les contrats signés avec la première DWIC avaient
été annulés lorsque la compagnie avait été dissoute. La dispute
ne fut réglée qu’en 1678. Une nouvelle résolution fut votée le
14 Septembre qui confirma la possession de la colonie par la maison
Van Pere. [321] Il s’agissait une nouvelle fois d’une colonie
privée et non d’une subordonnée au conseil des X. [321]
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Carte
de Berbice env. 1720 [188]
Source: en.wikipedia.org |
Avec
le début de la guerre de neuf ans (1688-97) entre la France et la
République des Pays-Bas Unis commencèrent les choses sérieuses
pour la colonie. [256] Après une attaque infructueuse sur le
Suriname, quelques corsaires Français de l’escadron de l’amiral
Du Casse firent une razzia sur la colonie de Berbice en 1689. Après
qu’ils aient pillé et brulé quelques plantations, le commandeur
de la colonie fut forcé à payer un tribut de 20,000 florins pour
éviter plus de dégâts sur la colonie. Toutefois le paiement a pu
être réduit à 6,000 florins et quelques barriques de sucre. Cela
fut rendu possible par un échange de prisonniers, le commandeur de
la colonie du Suriname Van Scharphuysen ayant parvenu à capturer
quelques corsaires dans l’attaque ratée. [322]
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Jacques Cassard (1679 - 1740)
Source: fr.wikipedia.org |
Le
Maitre Van Pere, Johan et Cornelius Van Pere refusèrent cependant de
payer le billet à ordre des Français. Le document arriva dans les
mains d’une compagnie Française à Marseille le 13 Septembre 1713.
Cette compagnie n’était pas intéressée par la colonie et essaya
de la vendre à des marchands Néerlandais. Les marchands Nicolas et
Hendrik Van Hoorn, Arnold Dix et Pieter Schuurmann étaient prêts à
acquérir la colonie pour la somme de 108,000 florins. Toutefois la
DWIC avait le monopole de la traite des esclaves africains. Après
que les marchands eurent conclut un accord avec la DWIC sur la
fourniture d’esclaves, les Français ayant emmené les meilleurs
esclaves en compensation, la colonie fut officiellement remise à ses
nouveaux propriétaires le 28 novembre 1714.
Cependant
la DWIC ne tint pas ses engagements, en partie parce qu’elle avait
trop de colonies à fournir, donc l’échange d’esclaves n’a pas
été effectif. Cela finit par conduire la colonie au bord de la
ruine. Les nouveaux propriétaires décidèrent d’injecter de
nouveau du capital en 1720 et fondèrent alors une société. Elle
était composée de 1600 parts de 2,000 florins chacune. Après
quelques difficultés financières on confia la supervision de la
société à sept administrateurs, avec un quartier général à
Amsterdam, qui se rencontrèrent pour la première fois le 4 Octobre
1720. [328]
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Carte
de Berbice 1764
Source: www.gahetna.nl |
Après
plusieurs expéditions infructueuses à la recherche d’or et
d’argent plus loin dans les terres, les administrateurs
concentrèrent leur attention sur le développement de la colonie
elle-même, et en peu de temps huit nouvelles plantations furent
établies en 1723. Toutefois la DWIC n’était pas fiable quant à
la fourniture d’esclaves d’Afrique alors il n’y avait que très
peu d’esclaves sur ces plantations. [329]
En 1732 la société acquit une grande part d’indépendance par rapport à la DWIC. Au lieu d’une certaine somme par bateau ils devaient seulement payer une taxe annuelle à la DWIC. Au bout du compte cette dernière avait toujours le monopole de la traite des esclaves dans les colonies Néerlandaises dont la colonie de Berbice était dépendante. De plus ils ouvrirent la colonie à tous les Néerlandais. Par conséquent Berbice ne subit pas l’effet de goulot d’Essequibo pendant longtemps car la chambre de commerce du Zeeland était trop centrée sur ses propres interêts, ce qui était la raison pour laquelle Essequibo n’était pas une colonie prospère. Seul l’aspect maritime était encore restreint. Les bateaux étaient seulement autorisés à voyager entre la République Néerlandaise et la colonie de Berbice. Ils n’étaient pas autorisés à voyager vers d’autres colonies de la WIC ni vers d’autres nations. [330]
En 1733, la société avait 12 plantations propres : De Dageraad, De Goede Hoop, De Berg (später Johanna), West-Souburg, Vlissingen, Cornelia, Jacoba, De Peereboom, De Markjeij, Hardenbroek, East-Sourburg et Savonette. Neuf d’entre elles étaient des plantations de canne à sucre. Sur les autres domaines on cultivait le café, le cacao et le coton. [331] Le 18 Mai 1735 les administrateurs de la société décidèrent de verser un dividende de 4% aux actionnaires. D’après Netscher ce fut une erreur majeure. Les années suivantes la société fut incapable de réparer correctement le fort Naussau car elle n’avait pas le budget. On a constamment repoussé jusqu’à ce que le fort soit abandonné dès le début de la révolte des esclaves en 1763 car indéfendable et en piteux état. [333] D’après Netscher figurent sur une carte du pionnier January Daniel Knapp, 93 plantations privées sur le fleuve Berbice et la rivière Wironje et jusqu’à 20 sur la rivière Canje aux alentours de 1740. Il n’y avait pas de plantation sur la région côtière du fleuve. [334]
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Carte
de Berbice env. 1780 (1771) [187]
Source: en.wikipedia.org |
Le
5 Juillet 1762 se déroula une petite mutinerie sur les plantations
Goedland et Goed Fortuin. 36 esclaves pillèrent les plantations et
prirent la fuite vers les bois voisins. Il fallut quelques semaines
aux colons pour mater la rébellion et c’était juste un petit
avant-goût des événements qui allaient arriver à la colonie.
[335] Le 23 Février 1763 débuta le soulèvement des esclaves sur la
plantation Magdalenenburg. Ce soulèvement se changeât en un
véritable sinistre. Le 25 Février les rebelles attaquèrent la
plantation Providence. Un jour plus tôt, le gouverneur Van Hooge
apprenait que les indiens hostiles Accoway avaient attaqué une
position près de la plantation Van Hoogenheim. Cet événement
galvanisa les esclaves et les encouragea à profiter de la
vulnérabilité des Néerlandais pour se soulever. La nouvelle du
soulèvement se propagea comme un feu de paille à la rivière Canje.
Là-bas les esclaves se rebellèrent quasiment au même moment contre
leurs maitres. Le 28 Février le gouverneur apprit cette tragédie.
Il apprit aussi que les esclaves des plantations privées Lilienburg,
Juliana, Hollandia, Zeelandia, Elisabeth et Alexandra avaient
assassiné leurs maitres et mit le feu aux bâtiments sauf sur les
plantations Hollandia et Zeelandia.
Les
cerveaux de ce soulèvement étaient les esclaves Coffy, Accara et
deux autres meneurs dont on ne connait pas le nom. Ces esclaves
provenaient de la plantation Lilienburg. Le 4 Mars survinrent des
scènes dramatiques. Plusieurs colons furent massacrés de façon
bestiale, y compris le chirurgien principal de la colonie Dr Jan
Jacob Baas, qui fut accusé par les esclaves d’avoir empoisonné
certains des leurs avec de mauvais médicaments. Le 6 Mars le
gouverneur envoya chercher de l’aide auprès du gouverneur de la
colonie du Suriname Mr Crommelin. Alors que les survivants étaient
retranchés dans le poste militaire St Andries, des différends entre
les rebelles menèrent à des conflits internes entre les esclaves.
C’est alors que Coffy se donna la mort.
Finalement
on parvint à battre les rebelles grâce aux renforts du Suriname et
de St Eustatius. Le 26 Mars de l’année 1764, le dernier meneur de
la rébellion fut amené enchainé devant Van Hoogenheim. Mais
Accara, l’un des meneurs du soulèvement, était encore en liberté
et ne fut capturé qu’en Avril et présenté enchainé au
gouverneur le 15 Avril. Le 27 Avril, 34 esclaves furent condamnés à
mort. Le reste des prisonniers retourna aux champs. La sentence fut
appliquée le lendemain. 17 d’entre eux furent pendus, 8 furent
passés à la roue et les 9 derniers furent brulés, y compris 7
d’une façon particulièrement brutale, à feu doux. Les
Néerlandais se révélèrent alors aussi cruels que les esclaves qui
s’étaient élevés contre leur condition inhumaine et d’après
Netscher, les esclaves étaient vraiment maltraités par leurs
maitres. Les maitres d’esclaves Néerlandais étaient très cruels.
[336] [337]
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Carte
de Berbice 1802
Source: www.wdl.org |
Pour
éviter d’autres effusions de sang, le gouverneur punit tous les
propriétaires de plantations qui commettaient à nouveau des abus
sur leurs esclaves. Cependant, tous les membres du tribunal étaient
eux-mêmes des propriétaires et cela les concernait également.
C’est pour cela que les pénalités restèrent plutôt modérées.
Le 26 Mai 1765, son successeur Johannes Heijliger arriva à Berbice
et Van Hoogenheim quitta la colonie. En 1766 un tremblement de terre
important toucha les colonies Néerlandaises de la côte. [339] La
colonie ne fit pas de grand progrès et se maintint simplement entre
1764 et 1778. Les propriétaires des plantations refusaient de payer
les taxes qui revenaient à la colonie pour réparer les dommages
causés par le soulèvement des esclaves. Les différents gouverneurs
de chaque période étaient soit indécis (comme Heijliger), soit
paresseux, soit moururent relativement vite. Le manque d’argent
était également visible dans le domaine de la défense, qui ne
s’était pas remis du soulèvement des esclaves de 1763. La colonie
stagnait. Cela arriva au point qu’entre les années 1768 et 1772
les plantations de Berbice étaient invendables (dans le sens où
personne ne voulait les acheter). [340]
Armand de Kersaint (1742 - 1793)
Conquérant
du Demerara,
Essequibo
et Berbice en 1782
Source: en.wikipedia.org |
C’est
seulement à la nomination de Pieter Hendrik Koppiers qu’on se dit
qu’on avait gagné un homme prometteur pour la colonie. Il prêta
serment le 19 Juin 1778 en Hollande et arriva à la colonie en
Octobre. Son premier travail fut de mettre fin au status quo de la
défense de la colonie, ce qu’il rapporta alors aux administrateurs
en Hollande qui nommèrent immédiatement sur sa recommandation le
compétent Jan Carel Willem Herlin. Cet homme devait en quelques
années amener la défense de la colonie à un niveau correct. Une
fois clarifiés les problèmes de salaire et de mise en place, Jan
Carel Willem Herlin entreprit de voyager vers Berbice à l’été
1779. Toutefois le voyage se révéla un peu fastidieux, il atteignit
la colonie le 28 Mars 1780. Il commença alors son travail. Le fort
St Andries et le poste Niewslot seraient fortifiés de telle manière
à ce qu’il soit impossible pour une frégate ou un bateau corsaire
d’atteindre la colonie. Cependant ces efforts, comme nous le
verrons plus tard, arrivèrent bien trop tard. [341]
La
quatrième guerre Anglo-Néerlandaise (1780-1784) éclata et menaça
les colonies. [288] Comme écrit plus haut Sir George Brydges Rodney
apparut au large des côtes de la Guyane Néerlandaise en Février
1781. Les deux autres colonies se rendirent rapidement aux troupes
Anglaises et la colonie de Berbice suivit en Mars. [289] [290] [291]
[292] [293] [294] La colonie ne fut libérée des Anglais que par les
troupes Françaises. Le capitaine Français Armand de Kersaint
apparut à la colonie du Demerara le 30 Janvier 1782. Jusqu’au 15
Février De Kersaint conquit à nouveau les trois colonies
Néerlandaises Berbice, Essequibo et Demerara sans trop de
résistance. [295] [296] [297] Après la guerre les colonies furent
restituées à la Hollande en 1784. [299] [300]
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Sir Ralph Abercromby (1734 - 1801) Source: en.wikipedia.org |
Avec
l’expiration de la seconde charte la situation changea radicalement
fin 1971. Alors que les colonies de la DWIC entraient en possession
de la République des Pays-Bas Unis en 1792, la société possédait
toujours la colonie de Berbice. Mais les revendications de la société
ont été déclarées nulles et non avenues (ainsi que l'entreprise
commerciale privée au Suriname) le 9 Octobre 1795. Un comité
composé de 21 membres prit le contrôle immédiat des colonies.
Toutefois, [342] ce contrôle ne dura pas. La France conquit les
Pays-Bas durant la révolution et la république Battave fut
déclarée. [303] Cela entraina, comme précisé auparavant, la
déclaration de guerre de l’Angleterre à la République
Néerlandaise. Les anglais apparurent de nouveau à Berbice et le 3
Mai 1796, le gouverneur Néerlandais Van Batenburg se rendit, la
colonie tombant aux mains de l’Angleterre. [343]
La
colonie de Guyane Britannique
(sur la voie de la modernité)
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Les
frontières de la Guyane Britannique en 1898
Source: en.wikipedia.org |
Avant
même l’unification des trois colonies, la ville de Stabroek fut
renommée en Georgetown en l’honneur du roi George V le 05 Mai
1812. [347] [348] En 1823 un important soulèvement d’esclaves
menaça la colonie. Des rumeurs sur l’émancipation des esclaves
leur laissa penser que leur libération était imminente. Cette
rumeur se propagea comme un feu de paille et la déception qui a
suivi souleva d’autant plus la colère des esclaves. Le 17 Aout
1823, ils se dressèrent contre leurs maitres Anglais. Le 19 Aout, la
loi martiale était proclamée sur la colonie. Le 21 Aout eut lieu
une escarmouche entre les troupes Anglaises et près de 2,000
esclaves. Le lendemain, le gouverneur offrit un pardon à tous les
esclaves s’ils se rendaient immédiatement. Toutefois, ce pardon ne
fut pas accordé aux instigateurs du soulèvement. Fin Aout, les
meneurs furent condamnés et pendus. [344] La loi martiale ne fut pas
levée avant le 19 Janvier 1824. [345]
Les
trois anciennes colonies Néerlandaises furent finalement unies en
1831. Le 20 Juillet 1831, le premier gouverneur de Guyane
Britannique, Sir Benjamin d’Urban, prêta serment. [346] Alors que
la traite Britannique des esclaves était déjà abolie en 1807,
l’esclavage perdura jusqu’en 1838. C’est en 1833 que l’Acte
d’émancipation fut voté au parlement Britannique, ce qui entraina
l’abolition de l’esclavage le 1er Aout 1834. Toutefois
les planteurs des Antilles avaient un certain pouvoir et donc après
cette date le soi-disant apprentissage commença. En quoi cela
consistait-il? En bref: Le propriétaire était désormais appelé le
maitre et l’esclave était maintenant un apprenti, ce dernier
devant toujours travailler gratuitement pour le premier. Cela ne
changea pas grand-chose et beaucoup d’esclaves virent cet
apprentissage comme ce que c’était en fait: une prolongation de
leur calvaire en tant qu’esclave. Cet apprentissage devait durer
environ six ans et concernait tous les esclaves de plus de 6 ans.
Cela incluait donc le travail infantile. [349] [350] Ces décisions
sont, d’un point de vue actuel, considérées comme très immorales
et très douteuses.
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Les
armoiries du Guyana [189]
Source: http://commons.wikimedia.org |
Le
gouvernement Britannique s’aperçut de son erreur et réduisit la
durée de l’apprentissage à quatre ans. L’esclavage fut
finalement aboli dans les colonies Britanniques le 31 Aout 1838.
[351] Cette année-là, les premiers ouvriers Indiens arrivèrent en
Guyane Britannique. Ceci en raison du désir de travailleurs bon
marché des planteurs. Il y avait une raison à cela: Le système
n’était suffisamment rentable qu’avec un recours à la main
d’œuvre bon marché. De plus, les anciens esclaves n’avaient pas
oublié leur traitement et quittèrent alors les plantations. Ces
travailleurs de remplacement bon marché venaient maintenant d’Asie
et d’Europe. Cependant, les immigrés Chinois et Européens ne
semblaient pas adaptés aux conditions difficiles des plantations.
Des Portugais de Madère arrivèrent aussi en Guyane Britannique car
au pays, une maladie de la vigne avait détruit leur moyen de
subsistance. [351] [356] Le plus gros de la masse de travailleurs
était sans conteste Indienne (Nommés « Coolies » par les Anglais).
Cette immigration Indienne de travail dura jusqu’en 1917 et amena
un total de 238,909 travailleurs Indiens en Guyane Britannique. [352]
[353]
Le
taux de mortalité des travailleurs Indiens, cependant, était si
élevé que le gouvernement Indien suspendit par deux fois
l’émigration des travailleurs. La première suspension eut lieu de
1839 à 1844 et la seconde de 1848 à 1851 (Pour Trinidad et la
Guyane Britannique). La Jamaïque fut même suspendue jusqu’en
1860. Apparemment, les propriétaires de plantations ne traitaient
pas mieux les travailleurs que leurs esclaves auparavant. [354] [355]
Entre temps, il y eut aussi des immigrés de Chine. En 1853, deux
bateaux rejoignirent la colonie avec des travailleurs chinois. Entre
1859 et 1866 des travailleurs Chinois arrivèrent régulièrement à
la colonie de Guyane Britannique. Cependant, ce flot connut une halte
en 1866 quand le gouvernement Chinois insista pour que les
travailleurs soient ramenés à leur patrie aux frais de la colonie.
Toutefois, le but de l’émigration n’était pas le retour des
travailleurs donc peu de Chinois vinrent à la colonie, seulement en
1874 et 1878, avant que cette source ne s’assèche pour de bon.
[357]
La
crise du marché du sucre (1884-85) toucha la colonie
particulièrement durement, car elle produisait principalement du
sucre et ses sous-produits. A partir de ce moment le riz commença à
remplacer le sucre de plus en plus. La situation des travailleurs,
par contre, ne changea pas et resta très médiocre. La colonie étant
presque exclusivement dépendante de l’industrie du sucre, elle
était bien entendu particulièrement vulnérable aux incidents du
secteur. Les émeutes et les grèves étaient plus la règle que
l’exception en Guyane Britannique. La première eut lieu à la
plantation Leonora en 1869 et s’étendit aux Plantations Malgré
tout et La Jalousie. Ce « soulèvement» se fit relativement « sans
douleur » car il n’y eut aucun tué. Les faibles salaires perçus
par les travailleurs pour leur ouvrage en étaient l’origine. [412]
[413]
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Forbes Burnham & Jeddi Chagan 1953 Source: www.guyanagraphic.com |
L’incident
majeur suivant se déroula sur la plantation Devonshire Castle à
Essequibo en Septembre 1872. La raison était de nouveau les faibles
salaires. Pour tenter de disperser la population qui s’était
réunie, la police chargea dans la foule. Il y eut une échauffourée
entre les travailleurs et la police. Puis soudain un coup de feu d’un
officier de police rétablit l’ordre. Par la suite, quelques autres
officiers de police ont tiré sur la foule avec pour résultat 5
morts et 8 blessés. Cela coupa court au soulèvement. L’incident
suivant se déroula sur la propriété d’Uitvlugt en Octobre 1873.
Personne ne fut blessé mais c’était le résultat d’une présence
policière massive qui avait reçu l’ordre de charger ses armes.
Encore une fois, les bas salaires en étaient la raison. Le
soulèvement de la plantation Non Pareil en 1896, dont la pierre
angulaire était les bas salaires, culmina avec une fusillade qui fit
5 morts et 59 blessés. [412] [414]
L’incident
suivant se déroula en 1903 à la plantation Friends (Berbice), tua 6
personnes et en blessa 7. En 1905 à la plantation Ruimveldt, 7
personnes moururent et 17 furent sérieusement blessées. [361] [362]
[38] L’ordre ne put être rétabli qu’avec l’usage des forces
armées Britanniques. En Septembre 1912, un autre travailleur fut
abattu sur la plantation Leonora. La raison était encore
l’insatisfaction des travailleurs pour leurs salaires. En 1913 un
autre incident se déroula. Il concernait cette fois la plantation
Rose Hall à Berbice. Cette fois 14 personnes moururent par arme à
feu. On dit que cet incident poussa le gouvernement Indien à décider
de stopper l’immigration de l’Inde vers les Antilles car les
victimes étaient en majorité des immigrés Indiens. En 1917 le
gouvernement Indien arrêta finalement l’émigration des
travailleurs sous contrat. [412] [39] [58]
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Troupes
Britanniques en marche en Guyane Britannique 1954
Source: guyaneseonline.wordpress.com |
L’incident
majeur suivant se déroula en 1924. Ce qui avait commencé comme une
grève pacifique à Georgetown se changea en un violent soulèvement.
Les militaires et la police arrêtèrent sur son chemin la population
se dirigeant des plantations du Sud du pays vers Georgetown et la
plantation Ruimveldt. Après une lecture de la loi sur les émeutes,
l’ordre de tirer fut donné afin de disperser la population car la
foule refusait de se dissoudre. 13 personnes furent tuées et 18
blessées. [412] 59] La grande dépression des années 1930 toucha
durement la Guyane Britannique et beaucoup de gens perdirent leur
emploi à cause de la chute des prix des produits d’export de la
colonie. La population ouvrière se rendit à ce moment compte du
fait qu’elle n’avait aucune représentation politique. [363] S’en
suivit un autre incident en 1939 à la plantation Leonora. 4
grévistes furent de nouveau tués par les balles de la police et
quatre autres furent blessés. [412] [419] Il n’y eut pas d’autres
troubles jusqu’à la fin de la seconde guerre mondiale. Mais les
problèmes mijotaient. Cette fois cela concerna la plantation Enmore.
En Avril 1948 cinq travailleurs de plus trouvèrent la mort pendant
une grève. Neuf furent blessés. Le monument « Martyres d’Enmore »
fut construit en leur honneur. [105] [360] [420] [412] On dit que
c’est cet évènement qui mena à la création du PPP en 1950 avec
leur leader Jeddi Chagan.
Le
dernier incident violent majeur avant l’indépendance du pays eut
lieu en Février 1957 sur la plantation Skeldon à Berbice. Là, une
grève vit 17 travailleurs blessés par un « Greener gun » (un fusil)
après que du gaz lacrymogène ait été utilisé. Mais il y eut
aussi des crises politiques en Guyane Britannique, dans l’une
desquelles l’Amérique fut même impliquée. [412] [421]
Le
drapeau du Guyana
Source: en.wikipedia.org |
En
1928, on dota la colonie d’une nouvelle constitution et elle devint
une colonie de la Couronne. [358] [359] Un autre amendement
constitutionnel de 1953 entraina un nouveau système politique
composé de deux chambres, la basse chambre de l'Assemblée et le
Conseil d'Etat supérieur. Avec l’élection suivante du 27 Avril
1953 une crise politique sévère fut amorcée dans le pays alors que
le PPP (Parti Progressiste du Peuple) de Jeddi chagan gagnait 18 des
24 sièges à l’Assemblée et que Jeddi Chagan devenait premier
ministre. Cette évolution fut accueillie avec inquiétude et
suspicion en Angleterre, alors que le MI5 classait ce mouvement
politique comme « communiste ». Winston Churchill fut
forcé à agir et envoya des troupes Britanniques ainsi qu’un
bateau de guerre, le HMS Superb, en Guyane Britannique. Le
gouvernement fut déchu le 9 Octobre et le bureau colonial
Britannique prit le contrôle de la colonie. Les Jagans ont été
mis en résidence surveillée. Ce n’est que plus tard que la
révolution Cubaine (1953-59) se déroula aux portes de l’Amérique,
ce qui confirma et augmenta la défiance vis-à-vis du communisme en
Angleterre et en Amérique. Toutefois, cet évènement ne put
empêcher l’indépendance du Guyana. Cette crise a été
considérablement oubliée en Europe. Resta toutefois en mémoire la
menace nucléaire de la roquette Russe sur Cuba en Octobre 1962 et
l’embargo contre la nation insulaire. [371]
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Chapitre
2
-
Les
plantations en Guyane Britannique-
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Carte
de Berbice env. 1780 (1771) [187]
Source: http://en.wikipedia.org/ |
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Essequebo, Demerara et Berbice [191] Source : http://commons.wikimedia.org |
Le
rhum de Guyane Britannique
Rhums
ambrés venant du Guyana
|
Il
y a une longue tradition du rhum en Guyane Britannique. On peut
trouver des traces du rhum que j’appelle Demerara ambré à partir
du milieu du 19è siècle. [46] Ses origines pourraient remonter au
17è siècle. Au 19è siècle la plupart des plantations sucrières
utilisaient ce qu’il y avait de plus facilement accessible pour
colorer les rhums. Ils utilisaient notamment du caramel qui était
préparé à partir de sucre muscovado (sucre roux non raffiné).
Certaines plantations préféraient même produire du rhum plutôt
que du sucre. Bien sûr on vendait aussi du rhum blanc. Mais d’après
les sources la tendance commença à s’inverser. Afin d’obtenir
plus de sucre, on utilisait une pompe à vide combiné à une chauffe
de la mélasse. Jusqu’à l’usage de cette technologie, la mélasse
était convertie dans une large mesure en rhum ou alors exportée en
Angleterre. [47] Cette méthode d’extraction du sucre fut brevetée
en 1813 par Charles Howard et fit son chemin dans les Antilles. La
première pompe à vide fut utilisée en 1832 par John Gladstone sur
sa propriété Vreede-en-Hoop au Demerara. [431] [423] [433] Le sucre
extrait par cette méthode était bien plus pur et propre que le
muscovado, brun et encore en partie humide, obtenu via le processus
ordinaire. Cependant, tout n’était pas positif dans cette
évolution. Aussi, je citerai une source Allemande de 1890:
"Der Zucker wird in flache Holzkasten entleert, von allem Schmutz und Knötchen sorgsam befreit, gemischt und entweder in Säcke oder in mit Papier ausgelegte Tonnen verpackt. Auserlesene schöne Partien kommen in kleinen Säckchen zum Versandt. – Der I. Ablauf wird mit Wasser verdünnt und so viel Kalk zugesetzt, bis das Gemisch alkalisch reagirt; darauf wird im besonderen Vacuum das Gemisch leicht eingekocht und, wenn fertig, in Krystallisationskasten oder Schalen gelassen. Nach etwa 14 Tagen ist die Krystallisation beendet und wird die Masse geschleudert. Der enthaltene Zucker II ist hell und feinkörnig; von gutem Geschmack und enthält 86 bis 88 Proc. Rohrzucker, er gelangt wie das I. Produkt ohne weitere Reinigung in den Handel als Consumzucker. Ist der für Nachprodukte ein lohnender, so wird der II. Ablauf nochmals eingekocht, wenn notwendig mit erneutem Kalkzusatz. Nach 4-6 monatigem Stehen erhält man daraus einen ganz ähnlichen Zucker wie das II. Produkt ist. Der entstandene III. Ablauf wird zu Rum verarbeitet; bemerkt sei hier noch, dass der Rum von dieser Arbeitsweise nicht so gut ist als der von Muscovadoplantagen erhaltene. -- Anstatt den I. Ablauf mit Kalk einzukochen, wurden gute Erfolge mit Soda angewandt." [434]
"Der Zucker wird in flache Holzkasten entleert, von allem Schmutz und Knötchen sorgsam befreit, gemischt und entweder in Säcke oder in mit Papier ausgelegte Tonnen verpackt. Auserlesene schöne Partien kommen in kleinen Säckchen zum Versandt. – Der I. Ablauf wird mit Wasser verdünnt und so viel Kalk zugesetzt, bis das Gemisch alkalisch reagirt; darauf wird im besonderen Vacuum das Gemisch leicht eingekocht und, wenn fertig, in Krystallisationskasten oder Schalen gelassen. Nach etwa 14 Tagen ist die Krystallisation beendet und wird die Masse geschleudert. Der enthaltene Zucker II ist hell und feinkörnig; von gutem Geschmack und enthält 86 bis 88 Proc. Rohrzucker, er gelangt wie das I. Produkt ohne weitere Reinigung in den Handel als Consumzucker. Ist der für Nachprodukte ein lohnender, so wird der II. Ablauf nochmals eingekocht, wenn notwendig mit erneutem Kalkzusatz. Nach 4-6 monatigem Stehen erhält man daraus einen ganz ähnlichen Zucker wie das II. Produkt ist. Der entstandene III. Ablauf wird zu Rum verarbeitet; bemerkt sei hier noch, dass der Rum von dieser Arbeitsweise nicht so gut ist als der von Muscovadoplantagen erhaltene. -- Anstatt den I. Ablauf mit Kalk einzukochen, wurden gute Erfolge mit Soda angewandt." [434]
Un
rhum jeune du Guyana.
|
La
mélasse obtenue par la pompe à vide était ainsi de moindre qualité
que celle obtenue par le processus normal d’extraction en
contenants ouverts. On retrouve la même information dans l’ancienne
littérature Anglaise. Pourquoi cela? Parce que la mélasse obtenue
par le vide contient moins de sucre que celle obtenue par le
processus ordinaire. Ce sucre et ces autres arômes manquants ne sont
plus en mesure d’influencer suffisamment le processus de
fermentation. Alors la qualité du rhum changea dès le 19è siècle
avec l’efficacité grandissante de la production de sucre. Mais la
mélasse n’était toujours qu’un sous-produit de l’industrie du
sucre. La mélasse était soit distillée en rhum soit vendue comme
fourrage pour les animaux. A ma connaissance, La Jamaïque était la
seule nation / île qui garda l’ancien processus ordinaire et qui
donna d’avantage la priorité à la production de rhum sur la
production du sucre jusqu’au 20è siècle. Avec l’utilisation de
mélasse industrielle des grosses usines sucrières dans certaines
distilleries, la qualité de cette matière première ne s’est pas
forcément améliorée. On peut même raisonnablement penser le
contraire.
Le
rhum du Guyana était souvent classé derrière le rhum de Jamaïque,
en termes de bénéfices et de prix du rhum au 19è siècle. Les
raisons n’en étaient pas seulement la décroissance de la mélasse
au 19è siècle comme mentionné plus haut. Il y avait aussi d’autres
facteurs responsables de ce changement. En réalité, il y avait deux
raisons supplémentaires. Elles furent mentionnées dans le rapport
sur la préparation et sur les contributeurs de l’exposition
universelle de Paris en 1867. Premièrement, les sols desquels le
sucre avait été obtenu était salé sur bien des plantations. On
pouvait même le sentir dans le jus de canne à sucre. Deuxièmement,
la température de l’eau. Sur beaucoup de plantations, il n’était
pas possible d’obtenir l’eau à moins de 84°F (28,9°C environ)
nécessaire au procédé de distillation (afin de condenser
l’alcool). Ce n’était pas un problème en Jamaïque. L’eau de
source des montagnes était suffisamment fraiche. Le rhum de Guyane
Britannique exporté avait une teneur moyenne en alcool de 35% OP
(Original proof) soit environ 77% alc/L par fût en moyenne. [47]
Un
autre rhum jeune du Guyana.
|
Il
n’y eut pas que la matière première pour la fermentation qui
changeât, mais la fermentation elle-même subit un changement en
Guyane Britannique. Le manuel de la Guyane Britannique de 1913
mentionnait une durée de fermentation de 36-48 heures. Cette durée
diminua plus tard à simplement 28 heures en 1949. [435] [436] Une
note de l’article de Sasha indique que DDL a une durée de
fermentation de seulement 24-26 heures, peu importe le style
distillé. Plus la durée de fermentation est courte, plus le goût
est faible. Toutefois, si le but de la distillerie est de produire
beaucoup de rhum en colonnes continues alors cette méthode semble
rationnelle et logique. Pourquoi produire des congénères lourds
lors de la fermentation alors qu’on ne les retrouvera pas dans le
rhum final? Cela n’a pas de sens. Toutefois, cela veut dire à
contrario que plus le rhum est pur, moins il a de goût et moins il
se distingue d’autres produits. Dans ce contexte j’aimerais
également citer un auteur qui écrivit à ce propos en 1967:
« L’arôme
du rhum peut changer de la Martinique au Guyana, de Porto Rico à
Trinidad (L’île de Caroni), mais les prix sont plutôt semblables.
En effet, maintenant que l’on utilise des colonnes continues, les
arômes des rhums se rejoignent de plus en plus. Les Cubains
filtraient par le passé le rhum avec du charbon pour se débarrasser
des congénères âcres si caractéristiques des versions les plus
corsées ou « lourdes ». Maintenant l’alambic à colonnes peut
purifier le spiritueux jusqu’à la moderne neutralité désirée,
n’y laissant que les moindres contrastes existant entre chaque
produit Caribéen. » [437]
Quatre
rhums venant du Vat Still Port Mourant
|
La
spécialisation, la personnalisation de masse ou la bonne vieille
production de masse? Là est la question clé pour les distilleries.
Beaucoup empruntent le dernier chemin, ce qui est plus que dommage
mais aussi logique à mes yeux, car cela est dû à la pression
globale de la concurrence internationale, que nous devons au
capitalisme et à la globalisation (pas cher, vite et beaucoup).
D’autres, pourtant, suivent la stratégie de la personnalisation de
masse. Qu’est-ce donc? On produit des ingrédients de base en
production de masse, on les combine et on essaie de satisfaire
différentes sortes de consommateurs à la fois avec des produits qui
ont chacun leur propre marketing. C’est donc une sorte de système
modulaire (d’assemblage). Nous avons presque tous eu quelque chose
de ce genre dans notre verre. Je parle des blends. Les spiced rums en
font partie. La matière première (rhum) bon marché a été
produite en grandes quantités et adaptée aux palais des différents
publics cibles. Aussi bien les blends que les spiced rums, sont
(espérons) faits à partir de rhum et contiennent plusieurs sortes
de ce système modulaire (d’assemblage). Ces modules sont des rhums
produits par des alambics continus et discontinus. Ces derniers sont
plus onéreux et contiennent plus d’arômes « lourds ».
Les rhums moins aromatiques voire les alcools presque neutres sont
produits en colonnes continues. Les produits ou blends en résultant
sont des combinaisons de ces rhums de base. Il n’y a que lors des
débuts d’une petite distillerie que l’on pratique la stratégie
de la spécialisation. Il en va de même pour les jeunes et pour les
anciennes distilleries : les grosses distilleries ne peuvent et
ne veulent pas se financer avec une telle stratégie. La cible est
trop petite et spécialisée. Le revenu est trop faible pour subvenir
aux besoins de la distillerie.
D’autres
rhums venant du Vat Still Port Mourant
|
Retournons
à la Guyane Britannique du 19è siècle. Une source liste les
plantations suivantes qui ont présenté du rhum lors de l’exposition
universelle de Londres en 1862: Houston (4 ans, Demerara), Montrose
(Pot Still, Demerara), Better Hope (Demerara), Greenfield (Demerara,
Colonne continue à vapeur), Smythfield (Colonne à vapeur, Berbice)
et Providence (Berbice). [178]
Une
liste des participants à l’exposition universelle de Paris de 1867
mentionne les sources suivantes: Schoon Ord, La Grange, Blairmont,
Cumings Lodge, Goldstone Hall, Bee Hive, Taymouth Minor, Rose Hall,
Nismes, Montrose, Mon Repos, Hope, Hope and Experiment, Adelphi, Anna
Catharina et Great Diamond. [47] Y compris plusieurs échantillons de
rhums ambrés.
Il
y eut beaucoup plus de plantations présentes à l’exposition
universelle de Paris en 1878: Anna Catharina, Aurora, Blairmont,
Chateau Margot, Cornelia Ida, Cane Grove, Cove and John, De Willem,
Great Diamond, Greenfield, Houston, Herstelling, Helena, Hope, La
Grange, La Resouvenir, La Union, La Bonne Intention, Leonora,
Lusignan, Melville, Mon Repos, Metenmeerzorg, Ogle, Providence (D.C.
/ Demerara Coast; rive ouest du fleuve Demerara), Peter's Hall,
Philadelphia, Ruimveldt, Rose Hall, Smythfield, Stewartville, Success
(E.C. / Côte Est; Demerara), Tuschen de Vrienden, Uitvlugt, Vreed
en Hoop, Wales, Windsor Forest, Zeeburg, Zeelugt. [194]
Les
noms changèrent à nouveau à l’exposition universelle de Calcutta
en 1883/84. Les plantations suivantes y étaient mentionnées:
Chateau Margot, La Bonne Intention, Cane Grove, Leonora, Farm, Belle
Plaine, Enterprise, Taymouth Manor, Cornelia Ida, Reliance Tuschen de
Vrienden. [226]
Une
source de 1893 mentionne encore quelques plantations qui furent
représentées par des échantillons à la Worlds Columbian
Exposition Chicago (exposition universelle de 1893): Peter's Hall,
Success, Anna Regina, Cane Grove (Cave Grove gab es nicht), Hope,
Houston, La Bonne Mere, La Bonne Intention, La Jalousie, Maryville,
Melville, Nismes, Ogle, Port Mourant, Rose Hall, Schoon-Ord, Skeldon,
Tuschen-de-Vrienden, Uitvlugt, Versailles et Wales. Wales et Nismes
ne proposaient que des rhums blancs. Toutes les autres plantations
proposaient les deux rhums, blancs et ambrés. [179]
------------------------------------------------------------------
Chapitre
3
-
Production
et export du rhum en Guyane Britannique
Blends
créés avec des rhums du Guyana
|
Où
est passé tout ce rhum? Alors que le rhum de Jamaïque était envoyé
principalement au Royaume-Uni, en Allemagne et aux Etats-Unis, le
rhum de Guyane Britannique allait en majorité vers le Royaume-Uni,
le Canada et d’autres possessions Britanniques d’alors. Ceci est
repris par une source de 1938. [90] Et ce, relativement peu avant
l’invasion de la Wehrmacht en Pologne et le début de l’apocalypse
des temps modernes. L’Allemagne n’a traditionnellement été
intéressée que par le rhum de Jamaïque. Les Demerara étaient
relativement inconnus dans ce pays.
Le
rhum et le sucre sont inséparables. Le sucre en particulier a eu une
histoire très turbulente et chaotique. A commencer par le 19è
siècle. L’effondrement annoncé du marché du sucre avec la fin de
l’esclavage en 1838 n’eut pas lieu en Guyane Britannique. Mais le
Sugar Duties Act (Loi concernant les droits de sucre) en 1846, qui
entraina la taxation de tous les sucres importés, fit énormément
de mal à la colonie. La transition complète ne fut terminée qu’en
1854. Le dernier refuge du sucre colonial de l’empire Britannique
était révolu. Les colonies Britanniques devaient alors s’imposer
face à des pays comme Cuba et le Brésil, qui utilisaient encore des
esclaves bon marché pour le travail difficile des plantations. [93]
[94]
Les
prix se stabilisèrent à nouveau vers 1880 pour quelques années
jusqu’à ce que la première vraie crise majeure frappe le marché
du sucre au milieu des années 1880. La cause de cette crise était
principalement l’emploi massif du sucre de betterave comme
substitution en Europe. Certains pays comme la France, l’Allemagne,
la Hollande, la Belgique, la Russie et l’Autriche surenchérissaient
les uns sur les autres à coups de subventions. En 1884 environ, le
sucre de betterave bon marché inonda le marché Britannique et
commença pénétrer le marché Américain. Les ennuis vinrent aussi
de quelques producteurs Britanniques de sucre qui coloraient leur
sucre avec de la teinture jaune pour concurrencer visuellement le
sucre du Demerara qui prévalait à l’époque dans les épiceries
Anglaises. [95] [96] [97] Comme autre déconvenue, les producteurs
Européens de sucre utilisaient du charbon pour séparer toutes les
impuretés du sucre afin de produire des cristaux de sucre blancs.
Ces cristaux de sucre avaient un avantage visuel significatif par
rapport au sucre gris et ingrat des colonies. [99]
Pour
finir, quand les Etats-Unis initièrent en 1893 un droit sur
l’importation de sucre, l’économie de la colonie ne fit que
décroitre durant 10 années. De nombreuses plantations furent
abandonnées ou firent faillite. Pour vous donner une idée du déclin
de l’industrie du sucre, voici un tableau qui reprend le nombre
d’hectares de canne et le nombre d’usines sucrières actives en
Guyane Britannique de 1882 à 1896. [419] Ceci est attribué à une
source de 1896.
Année
|
Année
fiscale
|
Nombre
d’usines sucrières
| Acres de canne |
Hectares
de canne
|
1882
|
(1881- 82)
|
106
|
79.262
|
32.076
|
1883
|
(1882-83)
|
104
|
79.037
|
31.985
|
1884
|
(1883-84)
|
105
|
79.502
|
32.173
|
1885
|
(1884-85)
|
105
|
75.344
|
30.491
|
1886
|
(1885-86)
|
105
|
76.200
|
30.837
|
1887
|
(1886-87)
|
97
|
76.560
|
30,983
|
1888
|
(1887-88)
|
96
|
76.625
|
31.009
|
1889 |
(1888-89)
| 96 | 78.271 | 31.675 |
1890 |
(1889-90)
| 95 | 79.243 | 32.069 |
1891 |
(1890-91)
| 96 | 78.307 | 31.690 |
1892 |
(1891-92)
| 79 | 76.100 | 30.797 |
1893 |
(1892-93)
| 74 | 69.814 | 28.253 |
1894 |
(1893-94)
| 70 | 68.321 | 27.649 |
1895 |
(1894-95)
| 65 | 67.921 | 27.487 |
1896 |
(1895-96)
| 64 | 65.908 | 26.672 |
On
voit bien l’évolution. Malgré la diminution du nombre d’usines
sucrières, le nombre d’hectares resta stable et augmenta même
jusqu’en 1890 avant que les deux ne chutent à cause de la montée
du sucre de betterave en Europe. Finalement, durant l’année
fiscale 1898-1899, il ne restait que 64 usines sucrières, dont 55
avaient une distillerie. Je connais le nom de chacune d’elles. La
flambée du sucre de betterave ne s’arrêta pas avant la loi de
Bruxelles sur le sucre en 1902. Cette loi arrêta les subventions
Européennes sur le sucre de betterave. Les conséquences de cette
période se traduisirent en nombre de distilleries. Alors que le
nombre de distilleries durant l’année fiscale 1880-81 était de
109 en Guyane Britannique, il ne restait que 53 distilleries en
1901-02. Une source fait état de cela en 1903. C’était un an
après la loi de Bruxelles sur le sucre. Cela représente une baisse
de 56 usines sucrières produisant du rhum. [98] [89] Ce chiffre
parle de lui-même.
Les
prix restèrent relativement stables jusqu’en 1910. La grande
sécheresse d’Aout 1911 à Avril 1912 eut un effet significatif sur
les cultures et eut également des conséquences sur l’année 1913
qui suivit. [100] Avec le début de la première guerre mondiale le
marché du sucre connut une courte période de prospérité. La
guerre dévasta les champs de betterave à sucre Européens et
suscita la nécessité de sucre et de rhum de la Caraïbe. Mais cet
âge d’or ne dura pas longtemps. Après la guerre, l’accès au
marché Allemand fut entravé par des restrictions et le marché
Américain fut de fait fermé au rhum de Guyane Britannique en 1919
avec le début de la prohibition. [101] [102]
![]() |
Entrepôt
de Demerara Distillers Limited
Source: www.velier.it |
La
grande dépression des années 30 du siècle dernier laissa aussi une
trace sur le marché du sucre. La demande était bien plus faible que
l’offre. De 1930 à 1933 les exportations de rhum descendirent à
niveau très bas (Tableau 9, 10 & 11). En 1933 la prohibition
prit fin et les chiffres augmentèrent légèrement. En 1935,
cependant, d’importantes émeutes secouèrent les colonies
Britanniques. Le point culminant de cette agitation en Guyane
Britannique fut atteint en 1939 sur la plantation Leonora. Ce qui
commença par une grève pour de meilleurs salaires se termina par
une fusillade avec de nombreux morts. Ces émeutes ne se terminèrent
qu’au début de la deuxième guerre mondiale. [103] [104]
Les
distilleries restantes en Guyane Britannique furent une nouvelle fois
soulagées des fluctuations du marché par une guerre mondiale. Les
chiffres d’export et de valeur du marché (Voir tableau n°12) le
démontrent parfaitement. En 1947 il ne restait que 9 distilleries
survivantes (Voir tableau 1). Toutes les autres durent soit
abandonner, soit fusionner avec de plus grandes plantations
productrices de rhum qui avaient survécu à la tempête sur le
marché du sucre. Le regroupement des distilleries se poursuivit et
ne s’acheva qu’après l’indépendance du Guyana et la
nationalisation de toutes les distilleries et usines sucrières.
Pendant les années de l’indépendance du Guyana, seules restaient
5 des 9 distilleries. Dans son livre Rum, Dave Broom mentionne
seulement trois distilleries restantes en 1971. Une seule de ces
trois distilleries a réussi à survivre aujourd’hui.
Après
la nationalisation (1976) la Guyana Liquor Company (la société
holding de DDL) fit de nombreux changements importants. Le premier
fut la modernisation du quai de Water & Schur Maker en 1977
(pour le rendre accessible aux citernes). L’étape suivante fut la
construction du terminal de fret pour la manutention et le chargement
des citernes. Depuis cette année-là le rhum du Guyana est presque
exclusivement transporté en citernes d’acier inoxydable et non en
barriques. Il n’était vendu en barriques que si un client
demandait explicitement que son rhum soit en fut. Début 1978, la
capacité de l’entrepôt était de 250,000 gallons (946 353
Litres). [419]
Comment
le rhum entre-t-il alors en fut de nos jours ? C’est simple.
Le rhum arrivé en Europe y est alors mis en fut par les acheteurs ou
les stockeurs. Ils proviennent de leur propre stock, sont achetés
auprès de distilleries ou sont importés. Parfois certains de ces
futs ont été trop utilisés. Cela se traduit par une certaine
pâleur, comme dans certains embouteillages de « Versailles »
1990 et du lot 1998 de la distillerie d’Uitvlugt.
![]() |
Importateurs
de rhums vers le Royaume-Uni (Liverpool)
(Ceci
est une capture d’écran) Source: www.cylex-uk.co.uk |
Comment
se fait-il que personne ne vérifie si les futs sont toujours actifs
ou pas? N’y a-t-il donc pas de contrôle de la qualité? Eh bien si
l’on regarde une photo d’un entrepôt de distillerie plein de
futs on peut se douter du pourquoi. Afin d’utiliser tout l’espace
vertical, les futs sont placés sur des palettes et entassés. Même
si l’on voulait en contrôler le contenu, on ne pourrait pas
atteindre la plupart de ces futs. Un déplacement de ces futs au
complet vers un endroit plus accessible serait nécessaire pour un
contrôle exhaustif. Aucune distillerie ne fait ça, peu importe le
distillat produit (Rhum ou Whisky). Tout cet assortiment des
différents stades de maturation, c’est le problème de
l’assembleur. Il doit créer un assemblage stable de plusieurs
millésimes avec différents stades de maturation et différents
arômes, y compris dans un même lot. Quelques embouteilleurs
officiels utilisent du caramel pour donner au résultat une
uniformité visuelle et peut-être bien pour masquer le manque de
maturation. Sans cela ce serait trop coûteux et aucun gérant de
distillerie ne gère ce « problème » en vérifiant le contenu de
chaque fut. Les seuls qui contrôlent la qualité de leurs futs et
utilisent éventuellement des futs de bourbon de deuxième main ("2nd
Bourbon barrel") pour une maturation supplémentaire sont les
embouteilleurs indépendants. Le rôle d’un seul fut est alors bien
plus important que dans une distillerie, qui traite plus d’un
millier de nouveaux futs chaque année. Un seul ou quelques futs
épuisés ne font pas vraiment la différence dans la production à
grande échelle.
Le
dernier millésime livré en barriques du Guyana vers l’Europe le
fut probablement en 1977. Mais ce changement avait aussi des raisons
pratiques. Les auteurs Hugh Barty-King & Anton les mentionnent
dans leur livre Rum Yesterday and Today. 5000 barriques furent
demandées pour l’expédition de 250,000 gallons (946.353 Litres)
de rhum avant l’installation du nouveau terminal de fret en 1978.
700 travailleurs et 3 mois furent nécessaires pour préparer les
barriques au voyage et pour la manutention. Ceci fut réduit à un
mois et moins de 100 travailleurs après 1978. Le rhum était devenu
un produit de la vie courante. Le rhum arrivait à Liverpool (parmi
quelques autres ports en Europe) et était transporté vers les
différents acheteurs au Royaume-Uni. [419] [420] [421]
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Chapitre
4
-
La
tradition de la coloration
(Oui
la couleur compte)
Rhums
ambrés de la distillerie Enmore
(Guyana, 20è siècle) |
En
2011 lorsque je suis arrivé dans le monde du rhum j’ai entendu la
rumeur qui disait qu’il y avait des rhums du Guyana dont les futs
étaient préparés avec de la mélasse et qu’ils donnaient ainsi
au connaisseur une expérience gustative vraiment particulière.
Toutefois, je n’ai pas trouvé une seule preuve de cela en 2013
quand je faisais mes recherches pour l’article « Les distilleries
du Guyana 1.0 » jusqu’à ce que je modifie complètement mes modes
de recherche et d’appréhension. Je suis tombé sur un ancien
manuel pour les planteurs de Guyane Britannique au 19è siècle. Il y
avait des propositions et des idées sur la façon de diriger une
usine sucrière et une distillerie de rhum. Mais il n’y avait pas
que cela. On y mentionnait aussi la façon de colorer les rhums. La
procédure de préparation de ce colorant était expliquée. C’était
bien sûr une sorte de caramel. Voici un extrait du Manual of
Plantership par Alexander Mac Rae de 1856:
« La
fabrication correcte d’un bon élément colorant pour le rhum est
très importante. A cet effet on doit sélectionner le meilleur sucre
et le mettre en quantité suffisante dans une marmite sur un feu
indépendant. Le sucre doit être constamment agité avec une spatule
de bois tout au long de l’action du feu sur la marmite, afin
d’éviter un goût ou un arôme roussi; et quand il prend de la
consistance, le rendant difficile à manipuler avec la spatule, on le
retire du feu, et on ajoute progressivement des hauts vins en remuant
avec la spatule, jusqu’à ce qu’il prenne la consistance d’une
crème épaisse, afin que l’ensemble soit parfaitement dissous.
Après cela, on doit le mettre dans un fut debout, avec deux
robinets, un à peu près à 6 pouces (environ 15cm) du fond du fut,
l’autre à peu près à 2 pouces (environ 5cm) du fond, et le
laisser reposer afin que les sédiments se déposent, jusqu’à ce
que cela s’écoule du robinet du haut sans aucun sédiment. On peut
l’utiliser pour colorer le rhum, et environ 3 pintes (environ 1,5L)
d’élément colorant bien concentré doit suffire pour 100 gallons
de spiritueux (environ 348L); mais chaque marché requiert des
nuances de couleur différentes, et l’ajustement de la couleur du
rhum est laissé à l’appréciation de la personne qui en est
chargée. On doit faire très attention au fait que l’élément
colorant ne trouble en aucun cas le rhum, car quand le rhum est
trouble sa valeur en est grandement détériorée. Je recommande
toujours de fabriquer l’élément colorant en grandes quantités,
car plus longtemps il est stocké plus il devient pur. » [438]
Rhum
ambré provenant de la distillerie d’Uitvlugt
(Guyana,
20è siècle) |
L’élément
colorant était fabriqué à partir du matériau que l’on avait
sous la main : le sucre Muscovado. Cela ressemble beaucoup à la
production du caramel ordinaire. Le sucre était mis à bouillir dans
une marmite découverte et était remué en permanence à l’aide
d’une spatule en bois pour éviter le goût de roussi. C’est
presque comme créer une bonne sauce en utilisant des oignons
préalablement saisis. Afin d’éviter un goût de brulé on doit
surveiller le moment juste avant lequel les oignons sont roussis et
cela influe grandement sur le résultat. On veut surtout éviter cela
dans l’élément colorant. Quand la consistance souhaitée est
atteinte on retirait la marmite du feu et on diluait alors à l’aide
de « hauts vins » jusqu’à atteindre une consistance crémeuse. On
utilisait du rhum pour diluer idéalement le caramel. Pour du caramel
ordinaire on utilise de l’eau.
Ce
matériau était alors entreposé dans des barriques en bois, qui
possédaient deux robinets. L’un se situait à 1 pouce (environ
2,5cm) du fond, et l’autre 4 pouces (environ 10cm) au-dessus de la
première. Pourquoi cela? C’est assez simple. Les particules les
plus lourdes du mélange descendaient alors vers le fond. Elles
étaient indésirables dans le rhum final. Plus longtemps il reste au
calme plus il devient pur avec le temps à mesure que les particules
descendent vers le fond. A cet effet, j’ai eu une information de
Luca Gargano (Velier SpA) qui a parlé de la façon dont ce colorant
était entreposé en tonneaux par le passé et ainsi utilisé lors de
la création de différentes sortes de « marks » en Guyane
Britannique. Cette information vient probablement de DDL. Cette
description correspond parfaitement à la procédure et confirme ses
dires. Si l’on voulait retirer les sédiments, on ouvrait le
robinet du bas. Si l’on voulait une certaine quantité d’élément
colorant, on ouvrait le robinet du haut et on ajoutait le caramel au
rhum.
Référence
à l’élément colorant
Etiquette
de dos du Pussers étiquette bleue
|
Aucun
fut n’était tapissé ou traité avec de la mélasse. Cela n’a
jamais existé. Mais la légende est née d’un fait dont se
rendirent compte quelques embouteilleurs du Royaume-Uni alors qu’ils
embouteillaient des rhums ambrés par le passé. Un embouteilleur
Allemand de Whisky a dit à Flo mon collègue de blog, en passant,
comme si ce n’était pas important, que les dernières bouteilles
d’un fut du Guyana des années 70 qu’il avait acheté étaient
les plus aromatiques du fut. Cela signifie donc qu’il y avait une
fine couche de matériau aromatique au fond du fut. Ce doit être la
raison pour laquelle on a présumé que les futs provenant du Guyana
étaient traités avec de la mélasse. Des embouteilleurs comme
Bristol Spirits Limited et Berry Bros & Rudd ont dû entendre
parler de ça. Doug Mclvor m’a aussi raconté cette version de futs
traités début 2014. Toutefois, j’avais déjà lu le fameux
manuel, sans pour autant savoir exactement comment le comprendre,
mais je n’ai rien dit.
La
révélation est arrivée cette année lors d’une dégustation,
alors que je diluais quelques échantillons de rhums du Demerara
embouteillés par Velier. Je voulais voir comment le profil évoluait
en ajoutant un peu d’eau à ces rhums. J’ai laissé le rhum
s’homogénéiser avec l’eau pendant deux jours avant de commencer
la dégustation. Ce que je vis ce soir-là fut comme une petite
révélation. Il y avait une fine couche de sédiments au fond de la
petite bouteille flottant comme un nuage dans le rhum. Je savais
qu’il s’agissait de rhums colorés et compris immédiatement ce
qui s’était passé. Le degré de saturation du rhum avait changé
à cause de la teneur moindre en alcool, ainsi une partie du colorant
dilué se retrouvait dissolu par ce changement. Il ne pouvait plus se
mélanger au liquide aussi bien qu’avant. Un rhum avec plus d’eau
que d’alcool ne peut contenir autant d’élément colorant qu’un
rhum plus fort. L’élément colorant alors dissout s’était
détaché et devenait visible en s’étant déposé au fond. C’est
exactement ce qui se passe dans chaque fut. Avec la part des anges le
niveau d’alcool change et change ainsi le niveau de saturation du
rhum contenu. L’élément colorant qui se détache coule au fond du
fut et s’y accumule avec le temps. Ceci est à l’origine de la
légende des futs traités à la mélasse. A cet effet, j’ai jeté
un œil au manuel des planteurs. Ce phénomène y était décrit
précisément. Si l’on ajoutait trop d’élément colorant le rhum
devenait trouble, par le fait que l’élément colorant ne puisse
pas complètement se mélanger au rhum. Donc si l’on en met trop
cela tue le rhum. Le manuel précise que si l’on en ajoutait trop,
alors la valeur du rhum diminuait significativement. Ce trouble
disparait lorsque l’on remue le rhum ou que l’on agite le flacon.
Il réaparait après quelque temps.
Echantillon
dilué avec
particules sédimentaires (1)
|
Echantillon
dilué avec
particules sédimentaires (2)
|
Donc
par le passé le colorant était un caramel dilué avec un rhum à
forte teneur en alcool. On n’utilisait pas de mélasse. Je ne peux
pas dire ce que DDL utilise aujourd’hui car je ne suis jamais allé
à la distillerie et je doute qu’un fabricant livre ses secrets à
un étranger comme moi. Mais voilà, le rhum destiné à l’export
arrive à destination en citernes. L’élément colorant est ajouté
aux citernes avant qu’elles soient pompées au terminal de fret
pour l’entreposage.
« Le
rhum était un « dark blend » de cinq rhums du Demerara et de
Trinidad qui avaient été assemblés et embouteillés sur l’île
de Tortola de la colonie royale des Iles vierges Britanniques. La
couleur était également fidèle à la tradition, car ce rhum
naturellement ambré était toujours assombri pour camoufler tout
trouble de l’eau quand elle était mélangée au rhum pour produire
le grog. » [440]
Cependant,
il reste que les rhums « Navy style » sont tous foncés et ambrés.
Tout au moins l’assemblage final a été coloré. S’ils étaient
si foncés sans coloration, alors les rhums seraient tous des « jus
de bois », presque imbuvables (boisés, amers) et peu plaisants au
palais. Exactement ce qu’il ne fallait pas donner à ses hommes
pour qu’ils restent de bonne humeur. Mais tous les rhums n’avaient
pas besoin d’être colorés à l’assemblage final. La « Navy-tot »
(« goutte » ou ration du marin) n’existe plus dans la Royal Navy.
Elle a été abolie en 1970. Le rhum « Navy style », cependant, a
survécu jusqu’à maintenant. Si vous êtes intéressés par le
caramel et les éléments colorants dans le whisky, vous devriez
jeter un œil à ce très bon article. Et le meilleur pour la fin,
j’aimerais citer une source de 1949, imprimée par HM Stationery
Office, au sujet de l’industrie:
« n
plus d’un élément colorant, on ajoute du caramel en quantités
variables en fonction des différents marchés destinataires. Fait
curieux, le Canada et le Nord du Royaume-Uni aiment le rhum foncé,
façon « Nelson’s blood », alors que l’on réclame une teinte
plus anémique dans les midlands et que l’on préfère un blanc
presque pur dans le sud de l’Angleterre. Une fois ajusté à la
bonne couleur et maturé, le rhum est versé dans des futs et
entreposé sous le contrôle strict des agents des douanes. Nous
avons inspecté les documents et l’organisation d’un certain
nombre de ces distilleries et magasins de rhums et avons été
impressionnés par l’efficacité de leurs gestions. » [463]
La
Guyane Britannique et la Royal Navy
![]() |
Ration
de la Royal Navy (1)
Source: www.pussersrum.com |
On
utilisa également pendant longtemps le rhum de Guyane Britannique
dans l’assemblage de la Royal Navy. Au début du 20è siècle,
l’assemblage était surtout fait à partir de rhums provenant de
Guyane Britannique et de Trinidad. Malheureusement je ne connais ni
l’année ni la date à partir de laquelle les rhums de cette
colonie ont été utilisés pour l’assemblage de la Navy.
J’aimerais citer un entretien du (Mardi) 7 Juillet 1908.
« Mr.
Frederick Henry Dumas Man parle.
12992. (Dr. Bradford) Quelle est votre entreprise? – E.D. and F. Man, Courtiers coloniaux.
12993. C’est une bien vieille entreprise n’est-ce pas? – Elle remonte à 1783.
12994. Depuis combien de temps êtes-vous dans les affaires? – Vingt-neuf ans.
12995. Quelle est la nature de vos affaires? – Nous faisons dans les produits coloniaux – sucre, rhum, cacao, etc. Nous représentons trois quarts voire sept huitièmes du marché du rhum, et une petite partie du marché du sucre.
12996. Votre marché porte-t-il exclusivement sur le rhum Jamaïcain? – Pas du tout – sur tous les rhums.
…
13009. Vous êtes employés par l’amirauté, n’est-ce pas? – Oui, nous achetons le rhum pour eux.
131010. Tout le rhum que vous achetez est-il destiné à la Navy? – Oui, entièrement.
...
13036. Pensez-vous qu’il s’agisse du point de vue des gens impliqués dans le commerce du rhum en général et non cantonnés au rhum Jamaïcain? – Je suis sûr qu’il s’agit de leur point de vue. Nous avons par une fois fourni l’amirauté en rhum Jamaïcain (en général ils prennent du Demerara et du Trinidad) et les marins ne l’ont pas beaucoup apprécié.
13037. Mais vous vendez plus de rhum Jamaïcain que de n’importe quel autre sorte, n’est-ce pas? – Non je ne pense pas. Cela varie en fonction de la culture.
13038. Vous ne savez pas lequel prédomine? – C’est celui que nous appelons le proof rum, ce qui correspond aux rhums autres que Jamaïcains.
13039. Qu’est-ce qui compose le gros du Navy rum? – C’est le proof rum – non Jamaïcain.
13040. Proof rum, c’est une expression de chez vous? – C’est une expression marchande. Cela signifie que le rhum est vendu par volume d’alcool pur.
13041. (Dr. Bradfort) Ce rhum est produit en alambic à colonnes? – Principalement du rhum provenant d’alambics à colonne. » [441]
12992. (Dr. Bradford) Quelle est votre entreprise? – E.D. and F. Man, Courtiers coloniaux.
12993. C’est une bien vieille entreprise n’est-ce pas? – Elle remonte à 1783.
12994. Depuis combien de temps êtes-vous dans les affaires? – Vingt-neuf ans.
12995. Quelle est la nature de vos affaires? – Nous faisons dans les produits coloniaux – sucre, rhum, cacao, etc. Nous représentons trois quarts voire sept huitièmes du marché du rhum, et une petite partie du marché du sucre.
12996. Votre marché porte-t-il exclusivement sur le rhum Jamaïcain? – Pas du tout – sur tous les rhums.
…
13009. Vous êtes employés par l’amirauté, n’est-ce pas? – Oui, nous achetons le rhum pour eux.
131010. Tout le rhum que vous achetez est-il destiné à la Navy? – Oui, entièrement.
...
13036. Pensez-vous qu’il s’agisse du point de vue des gens impliqués dans le commerce du rhum en général et non cantonnés au rhum Jamaïcain? – Je suis sûr qu’il s’agit de leur point de vue. Nous avons par une fois fourni l’amirauté en rhum Jamaïcain (en général ils prennent du Demerara et du Trinidad) et les marins ne l’ont pas beaucoup apprécié.
13037. Mais vous vendez plus de rhum Jamaïcain que de n’importe quel autre sorte, n’est-ce pas? – Non je ne pense pas. Cela varie en fonction de la culture.
13038. Vous ne savez pas lequel prédomine? – C’est celui que nous appelons le proof rum, ce qui correspond aux rhums autres que Jamaïcains.
13039. Qu’est-ce qui compose le gros du Navy rum? – C’est le proof rum – non Jamaïcain.
13040. Proof rum, c’est une expression de chez vous? – C’est une expression marchande. Cela signifie que le rhum est vendu par volume d’alcool pur.
13041. (Dr. Bradfort) Ce rhum est produit en alambic à colonnes? – Principalement du rhum provenant d’alambics à colonne. » [441]
![]() |
Ration
de la Royal Navy (2) Source: royalnavymemories.co.uk |
Qui
était Mr. Frederick Henry Dumas Man? Il était l’arrière-petit-fils
de James Man. James Man, un tonnelier, fonda l’entreprise ED &
F Man en 1783. Cette entreprise reçut son nom d’Edward Desborough
Man et Frederick Henry Dumas Man en 1860. [442] Cette entreprise
était responsable de l’achat de tout le rhum utilisé dans
l’assemblage de la Navy jusqu’en 1970. L’entreprise existe
toujours. Une source de 1908 nous dit également que l’ingrédient
principal de l’assemblage de la Navy était du rhum d’alambic à
colonnes. Une source de 1924, un débat au parlement Britannique,
mentionne ces deux pays également à l’origine de l’assemblage
de la Navy.
« Mr. AMMON: Le nombre de mentions de réception de ration de rhum en tant que telle sur 20 ans est d’approximativement 43,000; le nombre de mentions de déblocage de fonds sur 20 ans est d’approximativement 27,000. Le prix coutant pour l’amirauté de la ration de rhum est d’environ ¾ d. par homme, et le rhum provient principalement du Demerara et de Trinidad. » [443]
Cependant,
l’assemblage a changé au fur et à mesure. Sur combien de temps je
l’ignore. J’aimerais citer un débat au parlement Britannique en
1956:
« Commandeur
Agnew: Je suis d’accord, mais je n’ai jamais connu cela. Alors
que je m’intéressais aux votes concernant les améliorations en
matière d’avitaillement, j’y ai trouvé un point traitant des
salaires et traitements de la police qui ont connu une hausse très
marquée comparé aux estimations de l’année précédente.
Il
s’agit des heures supplémentaires, qui ont augmenté de 700 £ à
£ 5500. Il est possible que les salaires et traitements de la police
aient connu une augmentation générale et que cela ait entrainé
l'inflation des chiffres, ou il peut y avoir eu une pénurie d'hommes
en service dans les chantiers d'avitaillement et en conséquence ils
ont peut-être eu à faire des heures supplémentaires pour assurer
la continuité de la garde. Je serais content si quelqu’un pouvait
m’informer sur ce point.
Quel
est à présent le fournisseur du rhum distribué à la Royal navy ?
Normalement il s’agit d’un très bon rhum sec du Guyana, mais il
me semble que tous les vieux stocks ont été dérobés par l’armée
pendant la première guerre mondiale et que l’amirauté n’a
jamais vraiment réussi à retrouver une qualité semblable.
![]() |
Ration
de la Royal Navy (3) Source: en.wikipedia.org |
Mr.
K. Robinson: L’honorable membre a-t-il déjà eu à faire au rhum
Australien particulièrement déplaisant que nous avions pendant la
guerre ?
Commandeur
Agnew: Non je ne crois pas, ce ne fut que par relations et quelque
entorse à la règle que j’ai pu me procurer du rhum, mais pas
suffisamment pour devenir un connaisseur. L’amirauté
utilise-t-elle toujours du rhum de Guyane Britannique pour le
stocker, le faire vieillir dans les chantiers d’avitaillement un
nombre raisonnable d’années avant de le distribuer à la flotte?
Mr.
R.Bell: Mon ami honorable membre du sud Worcestershire (Commandeur
Agnew) a parlé du grog. Ses commentaires sur le vieux grog
m’intéressent. J’ai entendu dire que l’armée avait raflé
tout le stock, mais on m’a aussi laissé entendre que l’armée
l’allongeait comme le porto. Le problème avec la navy, c’est
qu’ils avaient l’habitude de mouiller le bon rhum sec qu’ils
avaient reçu pour le distribuer en grog aux hommes.
…
Mr.
Ward: La réponse à la question concernant le nouvel uniforme des
marins est que, sans difficultés imprévues de production, nous
devrions pouvoir commencer à le distribuer à la flotte d’ici à
peu près six mois. Cela coutera près de £28,000 l’année ce qui
est plus pour l’uniforme existant.
L’honorable
membre du nord St. Pancras (Mr. K. Robinson) a posé la question de
la réduction du montant accordé à l’avitaillement. Je peux vous
dire qu’il n’y a aucune baisse dans le domaine de la nourriture
mais qu’il y a, bien sûr, un nombre moindre d’hommes dans la
navy, ce qui contribue à la diminution des chiffres.
Plusieurs
membres honorables ont parlé du grog et du budget du grog. Je dois
avouer que j’aimais le rhum jusqu’à il y a à peu près quinze
ans, quand j’ai fait l’erreur d’entrer dans une distillerie en
Jamaïque. L’odeur était si abominable que je n’ai pas réussi à
reboire du rhum depuis. Cependant, je comprends qu’il soit très
populaire dans la navy. Les fournitures proviennent, non de la Guyane
Britannique ni, mon ami honorable membre du sud Worcestershire
(Commandeur Agnew) sera heureux de l’entendre, d’Australie, mais
de Jamaïque ou de la Barbade. » [444]
Rhum
ambré de la distillerie Caroni
(Trinidad, 20è siècle) |
Mr.
Ward indiquait donc qu’à l’époque du débat (1956) on utilisait
des rhums de Jamaïque et de la Barbade. L’armée Britannique est
aussi selon lui responsable de l’anéantissement des stocks de rhum
de Guyane Britannique pendant la première guerre mondiale et du fait
que l’amirauté n’ait pas réussi à retrouver la même qualité
depuis. Mr. R. Bell. Cependant, accusait indirectement la Royal navy
de « gâcher » le bon rhum pour la ration quotidienne.
Voilà un point de vue intéressant. Je ne suis pas certain que des
rhums de Guyane Britanniques furent ajoutés à nouveau par la suite
à l’assemblage de la navy. Pussers Limited, qui a acquis la
recette originale afin de produire l’assemblage de la navy, devrait
avoir la réponse. Sur leur site internet on déclare que des rhums
du Guyana et de Trinidad sont utilisés. Comme cité ci-dessus (La
tradition de la coloration), l’assemblage de la navy était composé
de cinq rhums différents venant de ces deux nations. Ces rhums
pourraient être de style P.M., E.H.P., une version légère et une
version lourde de Caroni, et un cinquième rhum inconnu. Bien sûr ce
n’est qu’une supposition de ma part. On n’est pas sûr du
remplaçant de Caroni lorsque cette distillerie a fermé en 2003. La
version intermédiaire, mentionnée au parlement Britannique en 1956,
a pu entretenir la confusion qui fait dire que l’assemblage de la
navy était en grande partie composé de rhum de la Jamaïque, ce qui
est d’ailleurs indiqué sur la version anglaise de Wikipedia. Je ne
sais pas pendant combien de temps la navy a utilisé des rhums des
deux autres nations. Une autre source mentionne même des rhums du
Demerara (Guyane Britannique), Trinidad et Barbade. [445] Toutefois,
pas besoin d’être un génie pour comprendre d’où venaient
probablement ces rhums. Je suppose, des distilleries fermées Caroni
(Trinidad), Uitvlugt (avant la fermeture d’Albion, et Albion avant
la fermeture de Port Mourant) et Enmore. Dans les deux derniers se
trouvaient les alambics en bois, qui sont mentionnés par Pussers et
sont utilisés pour donner sa saveur particulière à l’assemblage.
Caroni possédait aussi un alambic Coffey en bois (nous y reviendrons
dans un article séparé sur Trinidad) fait en Green Heart Guyannais.
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Chapitre
5
-
Les
alambics et les distilleries en Guyane Britannique
![]() |
Usine
sucrière du Demerara (1916), Guyane Britannique
SourceQuelle: www.guyanatimesinternational.com |
Dans
l’ancien temps il y avait trois types d’alambics au Guyana. Il y
avait l’alambic à repasse traditionnel (Pot still), l’alambic en
bois (Vat still) et plusieurs colonnes continues. Voici un extrait
d’une source 1908:
« En
Guyane Britannique les distilleries sont de trois sortes:
- Celles qui utilisent des Pot ou Vat stills qui sont en fait des Pot stills modifiés.
- Celles qui utilisent à la fois des Pot ou Vat stills et des colonnes Coffey ou autres colonnes de rectification.
- Celles qui n’utilisent que des Coffey ou autres colonnes de rectification. » [82]
Le
Pot still traditionnel (fait entièrement de cuivre) a presque
disparu. DDL possède un Pot still en cuivre, deux Vat stills et
beaucoup de colonnes continues. Le Pot still simple en bois
Versailles et le Pot still double en bois Port Mourant sont des Vat
stills, mais on les qualifie souvent de Pot stills. Finalement, le
Vat still n’est rien de plus qu’un Pot still modifié en forme de
barrique (Vat = Barrel) en bois. Seuls la tête et le col sont en
cuivre. Une source de 1908 en décrit la structure comme cela:
![]() |
Vat
still simple Versailles
Source: thefloatingrumshack.com |
Les « têtes » (dômes) des Vat stills sont donc constituées de cuivre et l’alambic est alimenté par injection de vapeur. Dans le cas de l’alambic Versailles il y a un retors descendant allié à l’alambic, qui fonctionne comme une colonne de rectification pour augmenter le contenu en alcool. Une double distillation est également possible ensuite pour obtenir un contenu en alcool suffisant. Dans le cas de l’alambic Port Mourant, les deux Vat stills sont montés en série afin de produire le contenu élevé en alcool désiré.
Aujourd’hui
ces deux alambics sont les derniers de leur espèce. Mais dans le
passé il y avait beaucoup de Pot et Vat stills en Guyane
Britannique. La source de 1908 parle de 42 distilleries actives en
Juillet 1906. 32 d’entre elles possédaient un Pot ou un Vat still.
Seules trois distilleries possédaient un Pot ou Vat still et une
colonne continue. Tout-juste 7 distilleries possédaient uniquement
des colonnes continues. [82] Comme écrit plus haut: en 1880-81 il y
avait 109 distilleries en Guyane Britannique. Toutefois, leur nombre
était déjà descendu à 53 durant l’année fiscale 1900-01. [90]
![]() |
Le
double Vat still Port Mourant devant
Le Vat still simple Versailles au milieu à gauche Les deux colonnes de rectification sont au fond à droite Le Pot still en cuivre au fond à gauche Une double colonne tout à fait au fond à gauche (en haut) Source: thefloatingrumshack.com |
Les
choses changèrent dramatiquement en 1914. Cette année-là il n’y
avait plus que 36 distilleries. De celles-ci, 27 utilisaient le Pot
ou Vat still et 9 la colonne continue. [84] Les colonnes continues
étaient construites localement et étaient composées de bois de la
région (greenheart), ce que confirme une source datée de 1919. Donc
beaucoup de colonnes continues de l’époque étaient en bois. La
source parle de dix grandes « colonnes de rectification continues »
pour l’année 1919. [85] Le remplacement par les colonnes continues
en acier se fit évidemment plus tard. La dernière restante est la
colonne continue en bois Enmore. Elle est aujourd’hui en la
possession de DDL et fait partie de leur concept d’héritage.
Petite
ironie de l’histoire: La plantation Great Diamond possédait déja
un alambic Coffey et un Vat still en 1908. [86] Elle faisait donc
partie des trois distilleries qui utilisaient les deux types. La
plupart des colonnes continues de l’époque étaient en bois. Alors
Diamond, qui était à l’époque la plantation Great Diamond,
possédait plus que probablement une colonne continue en bois, mais
finit par la mettre au rebut pour utiliser une colonne continue en
métal à la place. Ainsi il y a une probabilité relativement grande
que Diamond ait possédé une colonne continue en bois. Quelle ironie
de l’histoire qu’ils possèdent à nouveau une colonne en bois de
ce type, après avoir mis au rebut l’ancienne à une date inconnue.
Il en est de même pour les Vat stills. A mes yeux il ne fait aucun
doute de leur existence. Le Vat still fut probablement écarté en
premier. D’après ma source la colonne Coffey offrait une qualité
similaire à celle du Vat still. Plus tard, elle fut également
remplacée par une colonne en métal au plus grand rendement.
Quelqu’un a-t-il peut être appris des erreurs du passé?
![]() |
Usine
sucrière de Mon Repos (Guyane Britannique) Source: www.guyanatimesinternational.com |
Retournons
aux distilleries et à leurs alambics. En 1921 il ne restait que 30
distilleries actives. 21 distilleries utilisaient exclusivement un
Pot ou un Vat still. Trois, cependant, utilisaient les deux types
d’alambics et seulement 6 uniquement des colonnes continues. [87]
Sautons à présent jusqu’en 1938. Cette année-là la distillerie
du domaine Houston (anciennement Zorg En Hoop) fermait ses portes
pour toujours. [88] Il ne restait que 9 distilleries en Guyane
Britannique après 1938. Si l’on relie logiquement à cela les
chiffres de production du tableau 1 de l’annexe de 1950, on conclut
alors que l’alambic Port Mourant et l’alambic Versailles sont les
deux seuls Pot stills listés cette année-là. Donc depuis 1938 les
deux alambics sont les derniers représentants de leur espèce. Le
nombre de distilleries continue de chuter mais leurs noms ont survécu
jusqu’à aujourd’hui et sont bien connus pour la plupart.
En
1949 seules 9 des 16 usines sucrières possédaient une distillerie
pour se débarrasser des restes de mélasse, qui est « seulement » un
sous-produit de l’industrie du sucre. Albion, Blairmont, Enmore,
Skeldon et Port Mourant en faisaient partie. [19] D’après une
autre liste, qui date apparemment aussi de 1949, il n’y avait que
15 au lieu de 16 usines sucrières. [23] On y mentionne le « Big 9 »
de façon plus ou moins complète, y compris leurs propriétaires.
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Chapitre
6
-
„Bookers Guiana“
![]() |
Le
drapeau de la Guyane Britannique [190]
Source: http://commons.wikimedia.org |
Si
l’on veut raconter toute l’histoire, il faut alors dire quelques
mots sur le groupe Booker qui dominait largement le marché du sucre
en Guyane Britannique au 20è siècle. L’histoire commence en 1815
quand Josias Booker (senior, 1793-1865) arriva au Demerara. En 1834
l’entreprise Booker Brothers & Co fut fondée par Josias Booker
senior en Guyane Britannique. [106] [107] Petit à petit,
l’entreprise acheta de nombreuses plantations. De petites
plantations qui avaient fait faillite pendant les fluctuations du
marché du sucre furent intégrées à de plus grandes plantations et
leurs noms disparurent en partie. Le 30 Avril 1849 Josias Booker
acheta la plantation Profit pour 10,220 $G. [112] Josias Booker
junior apporta un rhum ambré à l’exposition universelle de
Londres en 1862 (Annexe A alinéa 67), qui provenait de la plantation
Greenfield. Ce rhum était à 47% au dessus de l’Original Prof
Britannique et avait été distillé dans une colonne à vapeur de
T.F. M’Fablane. Donc les Booker arrivèrent sur le marché du rhum
très tôt. [178]
![]() |
Publicité
de la Bookers Rum Company
Source: archive.org© Thomas Skinner & Co. (Publisher) Ltd (London) © Thomas Skinner of Canada Limited (Montreal) |
En
plus de la société Booker Brothers & Co, d’autres sociétés
montrèrent de l’interêt pour la Guyane Britannique. L’une
d’elles nous mène à John McConnell (1829 – 1890) qui arriva en
Guyane Britannique en 1846. [49] [109] Il travailla de près avec
Bookers dès le départ et acheta un sixième de la société en
1854. Finalement, John McConnell fonda sa propre entreprise. Ce fut
la John McConnell Company en 1874 à Londres et il en était le seul
propriétaire. [52] La société n’était pas seulement destinée à
soutenir les Bookers avec biens et ressources financières, il
l’utilisait également pour ses propres affaires et son propre
commerce. [109]
En
1881 Josiah Booker (Junior) mourut et John H. Booker, un plus jeune
frère, était le dernier membre de la famille impliqué dans les
affaires de la société Booker brothers & Company. Finalement,
John H. Booker vendit ses parts en 1885 à John McConnell, qui
possédait alors à lui seul les trois sociétés Booker Brothers &
Company, George Booker & Company et John McConnel & Company.
[56] [369] A l’occasion John reçut le soutien de sa famille, en
l’occurrence de ses deux fils. Arthur John McDonnel arriva dans
l’entreprise en 1889 et and Frederick Vavasour McConnell en 1890.
Ce furent ces deux hommes qui rassemblèrent les trois sociétés
sous un même nom en 1900: Booker Bros., Mc Connel & Company
Limited [108]. John McConnell était un propriétaire foncier
prospère. Il possédait la plantation Tuschen de Vrienden. Cette
plantation fournit un échantillon de sucre à l’exposition
universelle de Paris la même année. [110]
La
Bookers Bros., McConnell & Co. Limited possédait les plantations
suivantes en 1917 : Cane Grove, La Bonne Intention, Mon Repos, Port
Mourant, Rose Hall, Skeldon, Tuschen-de-Vrienden, Uitvlugt et
Vryheids Lust. [111] Leur nombre ne cessa d’augmenter. En 1934 les
plantations suivantes étaient aussi en la possession du groupe
Booker : Spinglands, Friends, Mara, Lusignan, Success, La
Ressouvenir, Wales, Versailles, Hoaston et Schoon Ord. [113] Plus
tard, une autre fusion prit place. En 1939 la Bookers Bros.,
McConnell & Co., Limited fusionna avec Messrs Curtis, Campbell &
Co. (Curtis, Campbell & Co, Ltd). Albion, Enmore et Ogle
rejoignirent alors le groupe Booker. [115] [116] Un descendant du
fondateur de Curtis Campbell & Co devint plus tard président du
groupe Booker. Son nom était John « Jock » Middleton Campbell.
John
Campbell, président du groupe Booker de 1952 à 1967, assista à
l’indépendance de la colonie et à la formation de l’Etat du
Guyana. Il a travaillé avec Forbes Burnham et son prédécesseur
heddi Jagan, quand il était encore premier ministre de la colonie de
Guyane Britannique. Le vent politique tourna quand Forbes Burnham
devint premier ministre officiel du Guyana le 26 Mai 1966. Le
gouvernement nouvellement élu de l’ex colonie conduit une
idéologie communiste qui plus tard se montra désastreuse pour
l’économie.
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de la Bookers Rum Company Source: archive.org © Thomas Skinner & Co. (Publisher) Ltd (London) © Thomas Skinner of Canada Limited (Montreal) |
Le
groupe Booker dut en fin de compte céder ses plantations,
distilleries et usines sucrières au Guyana au gouvernement Guyanais
et reçut une compensation de près de 500 millions de dollars
Guyanais. [118] Le pouvoir du groupe Booker au Guyana s’arrêta
brutalement. L’entreprise existe toujours aujourd’hui. En raison
du pouvoir et de l’influence que le groupe Booker avait eu en
Guyane Britannique, les Guyanais plaisantèrent sur le fait que la
Guyane Britannique devrait plutôt Mais l’histoire n’est pas
encore finie. [119]
Les années suivantes furent un désastre
économique pour le Guyana. Le pays subit une rapide inflation qui
entraina une baisse des salaires et un manque de productivité
grandissant. La valeur d’un mois de salaire de 200 $G en 1977
atteint la valeur réelle de 120,77 $G et chuta à 102,07 $G en 1980.
L’industrie de sucre n’était pas en meilleure forme que les
autres. En 1976, la dernière année durant laquelle l’industrie
était encore privée, on avait produit 332.547 tonnes de sucre. Ce
rendement chuta à 241.861 tonnes en 1984, et seulement 167.660
tonnes furent produites en 1988 et ce chiffre tomba plus bas que
terre en 1990. Le gouvernement de Desmond Hoyt réalisa finalement
qu’il avait perdu le contrôle de la situation et invita un
sous-traitant de Bookers appelé « Booker Tate » à venir au Guyana
pour les aider à la gestion des entreprises en 1990. [373]
![]() |
La
nouvelle usine de Skeldon en 2008 (en construction)
Source: pmtcalumni.org |
Cette
société a été créée en 1988, c’est une joint-venture de
Booker PLC et Tate & Lyle. Tate & Lyle a été pendant
longtemps présente sur le marché du sucre à Trinidad et les deux
entreprises allièrent ainsi leur expérience dans le domaine. Bien
que Booker Tate fût sous la coupe du gouvernement et qu’elle
n’agissait en principe pas de son propre chef, Bookers était bien
de retour au Guyana. En 1990, ont signé un « Accord de gestion
opérationnelle totale ». Booker Tate fait la promotion de ces
activités sur son site. Ils déclarent que le rendement de sucre
pourrait être porté à 280.000 tonnes en 1996. En 2002 ils
atteignirent presque l’ancien record de 1976 avec 331.067 tonnes de
sucre. En 2004, la TSB Sugar Holdings Limited (TSB), un fabricant de
sucre d’Amérique du Sud, racheta Booker Tate. Ils ont signé un
contrat pour la construction d’une nouvelle usine sucrière à
Skeldon en 2005. [374] [375] Toutefois, tout n’était pas si
simple. Une analyse SWOT (outil d'analyse stratégique de
l'entreprise) de Guysuco montra que cette nouvelle usine de Skeldon,
en plus de Wales, était la moins viable. Les problèmes commencèrent
apparemment lors de la seconde récolte, en 2008, avant que la
nouvelle usine soit opérationnelle. [376] En 2009, Booker Tate se
retirait du Guyana alors que la nouvelle usine était terminée.
L’évolution
actuelle ne laisse aucun doute quant à la direction que prend la
production de sucre au Guyana. Voici quelques chiffres officiels de
l’établissement public Guyana Sugar Corporation (Guysuco).
Résumé
sur 10 ans par Guysuco 2000-2009
Année
|
Sucre
(Tonnes)
|
Mélasse
(Tonnes)
|
2000
|
273.318
|
108.703
|
2001
|
284.474
|
118.103
|
2002
|
331.052
|
137.794
|
2003
|
302.378
|
127.201
|
2004
|
325.317
|
138.140
|
2005
|
246.071
|
115.732
|
2006
|
259.549
|
107.501
|
2007
|
266.482
|
115.048
|
2008
|
226.267
|
99.280
|
2009
|
233.736
|
109.598
|
Pour
une vue d’ensemble de l’évolution, il faut regarder les
dernières années. Malheureusement, la situation générale et
l’évolution de la production de sucre au Guyana se montrent une
nouvelle fois négatives.
2010 – 221.000 tonnes
de sucre [448]
2011 – 237.000 tonnes
de sucre [448]
2012 – 218.070 tonnes
de sucre [449]
2013 – 186.500 tonnes
de sucre [450]
La
seule chose que l’on peut voir dans cette évolution à court terme
est que Demerara Distillers Limited est (presque) indépendante du
marché du sucre. Si un jour Guysuco cesse d’exister cela n’aura
pas tout de suite un effet mortel sur le marché du rhum au Guyana.
Mais à long terme les coûts de production grimperont forcément, dû
au fait que la distillerie devra importer la mélasse nécessaire à
la production de rhum. Rien de nouveau sous le ciel de la Caraïbe.
Trinidad Distillers Limited (Angostura) à Trinidad & Tobago est
dans cette situation en ce moment et survit toujours, alors que
l’établissement sucrier public Caroni et sa distillerie sont
fermés depuis presque dix ans. Angostura doit importer la mélasse
nécessaire à la production de rhum. Cela influencera sûrement
l’industrie du rhum au Guyana, cependant, l’issue est encore
incertaine et on ne peut que supposer pour l’instant. C’est
vraiment ironique: Bien que la production des deux produits (Rhum et
sucre) soit à l’heure actuelle séparée au Guyana, ils restent
liés par le destin. Dans d’autres industries, ce lien étroit
entre l’industrie de l’alcool et les agriculteurs est moins
important. Les céréales, utilisées pour le whisky, seront toujours
produites, car c’est aussi une source d’alimentation. Par contre,
le rhum est littéralement lié à la canne à sucre, alors que le
sucre peut être obtenu autrement, comme par exemple de la betterave,
et n’est donc pas uniquement lié à la canne à sucre. Pour qu’un
distillat soit appelé « Rhum », il doit être obtenu de la mélasse
fermentée ou du jus de canne frais. Les spiritueux provenant de la
betterave ne portent pas le nom de rhum, mais elle peut être plus
facilement produite en Europe pour obtenir du sucre. La production a
beau avoir été séparée, le « lien vital » entre le rhum et le
sucre éxiste toujours.
------------------------------------------------------------------
Chapitre
7
-
United Rum Merchants
(Le
cartel du rhum de Booker)
![]() |
Source: www.rum.cz |
Que
s’est-il passé sur le marché Européen du rhum après la
nationalisation au Guyana et quelle influence avait Bookers? Nous
devons revenir un peu en arrière pour comprendre l’ensemble de
l’évolution et toute sa dimension. La société United Rum
Merchants est née de la fusion de trois entreprises : Alfred
Lamb & Son Limited, White Keeling (rhum) Limited et Portal,
Dingwall & Norris Limited. [427] [429] Qui étaient ces trois
entreprises? Alfred Lamb & Son Limited fut créée en 1849 par
Alfred Lamb. Il mourut en 1895 et confia la société à son fils
Charles H. Lamb, déjà entré dans la société. Alfred B. Lamb et
W.J. Godwin entrèrent aussi dans l’entreprise à la mort du
fondateur. En 1908, Alfred B. Lamb se retira de la société et en
1919 un certain Charles T. Brend devint partenaire de la firme. La
marque la plus connue de la société était « Lamb’s navy rum ».
[333] [338] La société Portal, Dingwall & Norris Limited
possédait la marque de rhum « Lemon Hart ». Cette marque fut lancée
par la société Lemon Hart & sons Limited. Cette même société
a été fondée par Mr Lemon Hart en 1804. Au cours du siècle, la
marque fit l’acquisition de Portal, Dingwall & Norris Limited
et intégra le portefeuille d’URM. [453] [454] [455] La société
White Keeling (rum) Limited a été créée par la fusion des deux
sociétés Henry White & Co. (fondée en 1842) et E.H. Keeling &
Son (fondée en 1822). La marque la plus célèbre de cette compagnie
était le rhum de Jamaïque « Red Heart » que l’on doit à Henry
White, fondateur de la Henry White & Company. [456] [457]
![]() |
Source: www.rum.cz |
Donc
URM avait ces trois entreprises en sa possession en tant que
sous-traitants. Cette société (URM) fut incorporée au groupe
Booker en 1947 et était pilotée depuis Londres. En 1951, la
nouvelle filiale de Booker « Bookers Rum Company Limited »
arriva dans l’escarcelle d’United Rum Merchants. Cette société
était responsable des affaires liées au rhum depuis 1951 et
contrôlait également les activités de marketing et de
communication en rapport avec les rhums de Guyane Britannique. Le
rhum en gros et quelques autres produits étaient gérés par un
autre nouveau sous-traitant, qui fut également ajouté en 1951.
C’était la « Booker Produce Limited ». Ces entreprises
régulaient et contrôlaient tout le marché autour du rhum. [427]
[429] Booker avait un accès exclusif au rhum provenant de Guyane
Britannique de par ses possessions dans le pays. Ils pouvaient aussi
facilement influer sur les prix de leurs concurrents. Au moment de
l’indépendance du Guyana (1966), seul un concurrent était encore
actif : Diamond Liquors. Bien sûr Lambs et Lemon Hart
n’embouteillaient pas seulement des rhums provenant de ce pays,
mais aussi des rhums de Jamaïque et d’autres iles. Après le
départ forcé de Bookers du marché du sucre du Guyana et en
conséquence la perte de la production et des distilleries, on prit
probablement la décision d’abandonner complètement le marché à
long terme. En 1984, la filiale United Rum Merchants qui avait été
incorporée à la société Booker en 1947, a été vendue à
Allied-Lyons. Et avec elle, les marques "Lemon Hart", "Red
Heart", "Black Heart" et "Lamb's Navy Rum"
![]() |
Source www.rum.cz |
Le
nom de la compagnie changea en 1994 d’Allied-Lyons en Allied Domecq
Spirits & Wine Limited. Les droits de « Lemon Hart » ont été
vendus par Pernod Ricard à Mosaiq Incorporated en 2010. [458] [459]
Le
plus gros rival et adversaire de United Rums Merchants sur le marché
du « Rhum brun» était Seagram’s, avec ses fameuses marques « OVD »
(Old Vattered Demerara) et « Wood’s Old Navy Rum ». Les deux
étaient aussi composées de rhum du Guyana (Guyane Britannique).
Seagram’s vendit aussi ses marques traditionnelles. Aujourd’hui,
elles appartiennent à William Grant & Sons Limited. [460]
Avec
toutes ces évolutions on peut maintenant comprendre quel
protagoniste géant et global du rhum était vraiment Bookers.
C’était le premier méga groupe sur le marché du rhum et il a
vite été suivi par d’autres compagnies comme Diageo et Pernod
Ricard. De telles sociétés n’étaient pas des groupes d’un
nouveau genre mais une évolution logique de la concentration du
marché, un renouveau et une réorganisation du marché. Elles sont
également un résultat de l’intervention des Etats sur les
marchés. Pourquoi? Parce que ce sont les Etats et nations qui font
les règles des marchés. Aujourd’hui il ne reste qu’une seule
distillerie au Guyana, dont la maison mère est aux mains de l’Etat.
Bien que le monopole de la production de rhum au Guyana soit de fait
une réalité, ce n’est pas Bookers qui a gagné la course. Mais
l’Etat du Guyana n’est pas non plus désigné vainqueur à cause
de l’inflation qui en résulte et la baisse de productivité dues à
la nationalisation de compagnies auparavant privées.
La
transformation du marché du rhum
(Une
opinion)
![]() |
'OVD' = 'Old Vatted Demerara'
La
marque du concurrent Seagram’s
Source: www.thewhiskyexchange.com |
« En
Grande Bretagne deux marques se disputent la première place dans le
marché du rhum brun standard: Captain Morgan de Seagram’s et
Lamb’s Navy d’United Rum Merchants (URM). Allied-Lyons a acheté
URM à Booker McConnell en 1984. Seagram et URM sont aussi en
concurrence en Ecosse où OVD (Old Vatted Demerara), la marque phare
de Seagram’s en Ecosse, est au coude à coude avec Black Heart
d’URM. Les marques de Seagram dominent les deux marchés, mais tout
juste. Alors comment Seagram’s et URM abordent-elles le problème
d’un marché déclinant? Le responsable du marketing spiritueux au
Royaume Uni de Seagram’s, John Cornish, décrit le problème:
«Voyez le marché du rhum brun, ce sont surtout des personnes assez
âgées qui en boivent et le marché est concentré en un groupe
restreint de gros consommateurs. Cela va pour le moment, mais cela
durera dix ans seulement. Cette part du marché va disparaitre et on
a pas du tout le même niveau de consommation chez les 25 – 45
ans. » Ces problèmes à long terme ont conduit les deux
sociétés à se recentrer sur les buveurs plus jeunes. Leur dilemme
est d’attirer les jeunes sans éloigner les plus vieux. Cependant,
l’attirance des jeunes vers le rhum brun ne tarda pas à arriver,
alors Captain Morgan adresse toujours ses pubs aux bons vieux
bonhommes. Le budget de cette année est estimé à près d’1,6
millions de livres sterling. Le Lamb’s Navy d’URM est également
géré avec doigté. Il y a eu quelques changements d’étiquette et
une nouvelle bouteille hexagonale, mais aucune modification drastique
de l’image de la marque n’est prévue. » [462]
![]() |
Donc
les clients moururent l’un après l’autre et la base de clients
diminua. La jeunesse, toutefois, prit goût au rhum léger et blanc.
Je peux le confirmer de par ma propre jeunesse. Bacardi et Havana
Club sont connus à travers l’Europe et incarnent ce genre de « rhum
nouveau », qui devint populaire après la fin de la première guerre
mondiale, en particulier aux Etats-Unis. D’autres auteurs ont écrit
des livres entiers à ce sujet et ont essayé d’expliquer ce « vent
nouveau ». C’est une des raisons pour lesquelles je ne
m’aventurerai pas plus loin sur ce sujet. Ce serait simplement trop
gros pour être inséré dans cet humble travail. Mais qu’est-ce
qui a vraiment changé?
Le
rhum de colonne, obtenu à partir d’alambics à distillation
continue, n’était pas une nouveauté et existait depuis le 19è
siècle. Comme je l’ai déjà mentionné plus haut, l’assemblage
de la Navy des années 1900 était principalement composé de rhum de
colonne. [441] A Cuba aussi, ce type de rhum léger était déjà
distillé depuis un moment. Alors qu’est-ce qui a changé? Ce sont
les consommateurs qui à mon avis ont été séduits par une
publicité massive et ont ainsi été rééduqués. Le rhum blanc
représentait alors l’avenir radieux. Les rhums bruns et lourds
furent même suspectés d’être la cause de la « gueule de bois »
car ils contenaient de mauvais éléments et des arômes lourds (et
mauvais). A ce propos, j’aimerais citer une source de 1990, qui
illustre cette opinion:
« Seale
croit qu’une des raisons pour lesquelles le rhum blanc bénéficie
d’une embellie est qu’« il ne donne pas la gueule de bois ni le
mal de tête comme le rhum ambré ». Le caramel et les autres
additifs, en plus des futs de bois dans lesquels le rhum a vieilli,
changent la couleur et la saveur du rhum, dit-il. Et, ajoutât-il,
contribuent également aux « effets secondaires» négatifs de la
boisson. » [461]
![]() |
Les
charmes féminins au service du rhum
Dans ce cas, cela reste correct Réplique d’une publicité 1940-1960 Source: www.zazzle.de |
La
gueule de bois arrive aussi lorsque l’on boit trop d’autres
alcools comme la bière ou le vin. Sont-ils aussi mauvais? Même les
meilleures choses vous donneront la gueule de bois si vous en abusez.
Le rhum blanc n’est pas meilleur à ce niveau-là. L’alcool c’est
ça. Et la gueule de bois n’est rien d’autre qu’un signe
d’empoisonnement. Il faut vraiment le faire pour ignorer cela.
L’alcool est un poison pour le corps, point. Pas besoin d’en
discuter. Ce qui compte c’est la qualité et la dose d’alcool que
vous consommez. Cela impose des consommateurs et des producteurs
responsables. Personnellement je préfère consommer ce poison en
petite quantité pourvu qu’il soit de haute qualité plutôt que de
boire jusqu’à l’oubli un rhum industriel bon marché (blanc et
léger) produit en masse en alambic à distillation continue. Mais
une distillerie vit grâce aux revenus de masse, pas grâce aux
petits consommateurs que je représente. Alors pourquoi Mr Seale
livra-t-il cette opinion en 1990? C’est assez simple. Quelques
années plus tard il montait sa propre distillerie mais il
embouteillait du rhum léger et blanc au moment de l’interview. Il
se faisait juste son marketing et voulait survivre en tant
qu’embouteilleur. Là non plus il n’y a pas de débat. J’ai
déjà abordé plus haut le problème du capitalisme et de la
mondialisation du secteur du rhum. Et en tant que consommateur « à
l’heure de l’information », je dirais qu’il faut toujours faire
attention et vérifier de qui vient l’information que l’on donne.
La source est-elle indépendante ou pas?
Quelle
serait la solution? Les prohibitions comme celle des USA ont montré
qu’il était inutile de contraindre le consommateur par la loi. La
qualité de l’alcool, toutefois, était pire sous les cieux de la
distillation illégale. L’interdiction fit que cette dernière
était hors de contrôle de l’Etat. Là aussi, d’autres auteurs
ont écrit des livres entiers sur le sujet. Dans l’optique de
construire un avenir meilleur, je pense que l’éducation et la
sensibilisation sur ce sujet sont bien plus intéressantes que de
brandir des interdictions. Et l’interdiction produit aussi l’effet
d’approcher de zéro l’influence de la législation, car tout se
fait dans l’illégal, qui lui se moque bien de la santé et de
l’intérêt des consommateurs ou des citoyens. Le marché a
entièrement été laissé aux mains du crime organisé. S’agit-il
d’un avenir meilleur? Avec le suivi et le contrôle, rendus
vraiment faciles à l’ère digitale d’aujourd’hui, et grâce
aux trackers GPS et aux smart phones? Ils n’existaient pas à
l’époque. C’est comme le terrorisme, chers lecteurs. On n’est
jamais vraiment en sécurité. Pas même dans un pays de surveillance
totale, car dans un tel pays, en tant que citoyen, vous n’êtes
plus à l’abri des actes de l’Etat et de la police. Mais je
m’éloigne du sujet.
![]() |
Publicité
pour Captain Morgan. Environ 1951.
Publicité à la "Yo-Ho-Ho-Ho" Ce qui veut dire: « Seulement pour les vrais pirates » « Tendance » mais totalement mensonger Source: www.pinterest.com |
Il
y eut donc une tendance qui s’éloignait des rhums ambrés et vieux
au profit de rhums légers et peu vieillis, qui parfois même
voyaient leur couleur et leurs congénères éliminés par
l’utilisation de filtres à charbon. Ces « pâlots »
conquirent peu à peu le marché du rhum. Pour les consommateurs à
la recherche de quelque chose de plus particulier les grandes
marquent embouteillent des rhums plus vieux et afin d’ajuster le
visuel de la gamme l’usage d’agent colorant est obligatoire. On
peut aussi masquer les fluctuations de maturation dues aux futs grâce
à cet élément. L’industrie ne s’est pas séparée de ce gadget
qui « trafique » visuellement ses rhums, mais cette fois
elle ne le met plus dans les futs avant le vieillissement comme
c’était le cas dans l’ancien temps (voir chapitre 4). Ils ne
l’ajoutent qu’avant embouteillage. Bien des consommateurs
craignent que cet élément soit utilisé afin de simuler un certain
âge que le rhum n’a pas vraiment. Je voudrais renouveler cette
inquiétude: Beaucoup de producteurs simulent visuellement une
maturité qui n’existe pas. Plus un rhum est vieilli, plus il
devient aromatique. Bien sûr, cela a des limites et cela dépend du
produit de départ, de la fermentation et de la distillation. C’est
le b.a.-ba du rhum dans le détail duquel je n’entrerai pas car ce
n’est pas le sujet. Comme je disais cela a ses limites. On ne peut
transformer un rhum de colonne léger et industriel en un rhum de pot
still Jamaïcain et lourd simplement en le faisant vieillir en fut.
C’est impossible.
![]() |
Des
charmes féminins plus agressifs
Cette publicité donne un point de vue plus profond Pas seulement visuellement Source: recluse.me |
Donc
à partir d’un moment le long vieillissement d’un tel produit ne
sert à rien. A un certain point de non-retour le fut influencera
grandement son contenu et aura un grand impact sur le rhum et son
profil aromatique. Cela n’est pas au goût du grand public et n’a
les faveurs que des connaisseurs et aficionados. Une autre raison est
qu’avec la part des anges, le contenu du fut diminue et les coûts
de production du rhum sont trop élevés. Un vieillissement prolongé
nécessite du temps et le temps c’est de l’argent. La suite
logique de cette pensée orientée vers le profit est l’introduction
d’embouteillages sans indication d’âge sur l’étiquette. Ainsi
arrive le « NAS » qui signifie « Sans indication d’âge ». Pour
« relever » le goût des jeunes rhums (ou whiskys) d’âge inconnu,
on les mélange à une part de plus vieux. Puis la couleur obtient
l’apparence souhaitée avec l’usage de caramel. Ensuite le
produit final hérite d’un nom sympa ou rigolo qui fait référence
à une vieille tradition ou rappelle certaines dates de la
distillerie ou du pays d’origine et voilà: votre vache à lait
pour traire les acheteurs plus efficacement est prête à être
lancée sur les acheteurs novices. C’est ce que j’appelle « le
capitalisme dans sa forme la plus pure ». Bien que je sois un
défenseur du vieillissement, le grand âge ne rime pas forcément
avec grande qualité, car même les vieux rhums, quand ils sont
immatures, ne valent pas forcément le prix indiqué sur leur jolie
étiquette. Je ne peux pas être d’accord avec cette pratique. Vous
vous ferez un avis sur le sujet en votre âme et conscience. Ce n’est
que mon humble avis.
![]() |
Vous
vous rappelez des « Tramp stamps » ou « Ass antlers »?
(tatouages en bas du dos) Bacardi voulait être tendance à l’époque et voilà le résultat Le rhum c’est cool hein? Source: recluse.me |
Le
simple fait que la législation européenne susmentionnée soit une
vraie passoire n’arrange pas les choses. Le sucre par exemple n’est
pas explicitement interdit et le caramel à des fins d’ajustement
de couleur est également admis, au grand dam des puristes (dont je
ne fais pas partie). Je n’ai rien contre l’adjonction de sucre en
soi. Mais je n’aime pas les boissons trop sucrées. Mon goût a
considérablement évolué au fil des années. Ceci toutefois, en
plus du fait que l’on puisse clairement améliorer la faible
qualité d’un rhum et faire disparaitre certaines failles, est plus
que discutable du point de vue du droit des consommateurs. Cela a été
également la principale critique de la communauté Allemande du
rhum. Mais notre erreur à l’époque est de ne pas l’avoir
formulée assez clairement et de ne pas avoir correctement communiqué
à ce sujet. Beaucoup ont cru leur boisson préférée en danger.
Ils
étaient aveugles et sourds. Ils se sont également comportés en
gosses provocateurs. Ils n’avaient rien compris. C’est une des
raisons pour lesquelles j’ai tourné le dos à cette « belle
communauté » et l’ai quitté. Pourquoi perdre son temps
alors que l’on peut le consacrer à des enquêtes plus
constructives comme celle-ci ? Ce n’était pas la peine de
débattre, et les « rhums premium » se portent toujours
magnifiquement bien. Mais on dirait que tout cela est sur le point de
changer. J’ai lu plus d’une fois que la qualité de certaines
marques diminue à chaque sortie. Les limites de l’utilisation de
sucre sont apparemment atteintes et la qualité s’est sensiblement
(apparemment) détériorée. Apparemment, car je n’en boirai jamais
dans le but de me convaincre qu’un changement est vraiment en train
d’opérer. Certaines entreprises qui ont fait usage de ces
pratiques ont probablement été dépassées par leur propre
marketing et le succès qui en a découlé. La proportion de « vieux
rhums » dans les systèmes solera diminue probablement sans
cesse, comme il y a de plus en plus de rhums jeunes qui sont toujours
plus agressifs que ceux de l’année précédente.
Est-ce
que je joue le gros dur cynique ? Pas vraiment. Je ne suis pas
pour la guerre entre les becs sucrés et les amateurs
d’embouteillages indépendants. De plus ma critique ne serait pas
fondée. Pourquoi ? Parce que je ne peux pas râler sur le sucre
et en même temps aimer les rhums Demerara bruns colorés au moyen de
caramel avant le vieillissement. Ce qui n’aide pas non plus, c’est
le fait qu’il s’agisse d’une vieille tradition venant de la
Royal Navy, couverte par la loi Européenne, et que le sucre n’est
ainsi pas strictement interdit, donc autorisé. Ces deux types de
rhums sont altérés et pourtant légaux. Ce serait hypocrite de ma
part. Et le monde en compte déjà suffisamment. Je ne veux pas en
faire partie. Que cela vous plaise ou non, c’est légal. Cependant,
je ne regrette pas pour autant ma décision de me retirer de la
communauté Allemande. Je crois personnellement à la liberté de
choix, bien que je pense que la loi soit loin d’être convenable ou
parfaite (mais personne n’est parfait). L’introduction de
nouveaux termes ou catégories pourrait être une idée. Il n’y a
pas non plus d’obligation de déclaration claire du contenu. A
cause de cela personne n’inscrit sur les étiquettes ce qui a été
ajouté. Ils n’y sont pas obligés donc ils ne le font pas.
Pourquoi quelqu’un prendrait-il le risque de le faire ? On
peut appeler cela de la tricherie, mais je le répète : ceci
est légal, bien que je n’en aime pas le résultat. On devrait
également organiser un contrôle de cette loi améliorée. La
meilleure des lois reste inutile si personne de contrôle les
producteurs. On n’a pas besoin d’une loi « placebo ».
Et on en a marre des politiques et des officiels de Bruxelles qui
s’assoient à la table pour sortir des lois insensées (comme « la
courbure idéale des bananes », tapez cela sur google et vous
verrez de quoi je veux parler). Ils pourraient s’en occuper…en
principe. *tousse* Toutefois, à cet égard le whisky et notamment
l’Ecosse sont bien plus avancés dans les règlementations de la
qualité. Mais tant que le lobby du rhum aura la main et que les
masses seront toutes excitées par ces « rhums premium »,
rien ne changera. Le capitalisme et les « experts »
déterminent la route à suivre. L’opinion de quelques maniaques
indépendants ou connaisseurs grincheux comme moi n’intéresse pas
le marché.
Livres
Anglais sur le rhum et l’industrie du sucre
|
On peut dire en conclusion : Le changement vient du changement de comportement du consommateur (spécifique en goût), venant de la publicité de masse des grandes marques du marché et de la pression concurrentielle globale sur les producteurs, associée au capitalisme extrême (vite, beaucoup et bon marché). Le dernier point en particulier a aidé les colonnes à triompher sur le pot still. Elles étaient un modèle d’efficacité avec le « rhum pur » qui en résultait. Enfin, quand je parle de rhum pur je veux en fait dire « sans saveur ». Un producteur peut faire autant de foin qu’il veut autour de ce type d’alambic et des rhums qui en découlent : Je sais pourquoi il opte autant pour ce type de distillation et que cela n’a rien à voir avec la passion, la tradition et l’amour du rhum, mais simplement avec la survie, la panique et la soif de dollars / euros.
------------------------------------------------------------------
Chapitre 8
-
„The Big 9“
(1938 - 2013)
(1938 - 2013)
Entre
1937 et 1938 la distillerie du domaine Houston (anciennement :
Zorg en Hoop) au Demerara ferma à jamais ses portes. Ainsi en 1938,
il ne restait que 9 distilleries, le « Big 9 ». Toutes
les autres distilleries avaient tout bonnement disparu. Les dernières
distilleries se trouvaient à l’intérieur des usines restantes,
qui avaient atteint la taille de grandes usines sucrières avec le
temps. Les plus petites propriétés furent abandonnées ou acquises
par ces sociétés fructueuses et ainsi absorbées. Mais leur temps
allait également venir. J’ai constitué les tableaux en annexe 1 à
partir de différentes sources. Cela n’a pas été facile à cause
du nombre de limité de visualisations de pages. Si vous regardez les
liens, vous verrez de quoi je veux parler.
Bonne Intention (Demerara)
Histoire
![]() |
Détail
de carte datant de 1783 [210]
Source: www.Gahetna.nl |
On
mentionne une veuve Changuion comme propriétaire de la plantation
No. 48 La Bonne Intention sur une carte datant de 1798. On mentionne
aussi cette femme dans un livre de 1888. Mais ce ne sont pas les
premières références. [122] [123] [125] Sur une autre carte de
1786, un certain F. Changuion (François Changuion) est repris comme
propriétaire de la plantation No. 27 sur la côte est du fleuve
Demerara. Cette plantation est probablement celle qui appartenait à
la veuve Changuion en 1798. L’emplacement des plantations sur les
cartes de 1786 et 1798 est presque identique. [126] [127]
![]() |
Détail
d’une carte datant de 1784 [207]
Source: www.Gahetna.nl |
Ce
François (Daniel) Changuion fut pendant un temps le commandeur par
intérim de la colonie du Demerara en 1771. [203] [204] D’après
moi la plantation La Bonne Intention remonte à cet homme. Une carte
de 1784 mentionnait F. Changuion comme propriétaire du lot 27 sur la
côte est de la colonie du Demerara. La plantation La Bonne Intention
a dû être établie entre 1759 et 1784. Pourquoi 1759 ? Parce
qu’il n’y avait aucune plantation sur la côte Est sur une carte
de cette année-là. Une autre carte de 1783 donne plus tard une vue
détaillée de la plantation La Bonne Intention. [210]
![]() |
Détail
d’une carte datant de 1786 [127]
Source: http://dpc.uba.uva.nl |
Au
moment de l’émancipation (1834-38) la plantation La Bonne
Intention appartenait à Charles Anthony Ferdinand Bentinck et Henry
John William Bentinck. [166] Le 26 janvier 1848, Alex M. Laren acheta
cette plantation pour 30,200 $ Guyanais. En 1860 elle appartenait à
A. McLaren et un certain PM Watson. [153] Dans une entrevue datant du
14 Septembre 1870, un Mr Russell déclarait qu’il était
copropriétaire de la plantation. [169] Une source de 1882 (Timehri)
dresse une liste explicite de données (et de marks) des plantations
La Bonne Intention (LBI) et Beterverwagting (BVW) pour cette année.
Les deux plantations appartenaient à Mr William Russell et la
production de rhum s’élevait à 80.238 gallons (environ 304 000
Litres) à 43,2% overproof. [377] Ce William Russell acheta la
plantation Tuschen De Vrienden en 1863. William Russel fut fait
chevalier avant sa mort en Mars 1888. [162] Ce William Russell est
cité par une autre source en 1882 conjointement aux héritiers de
Josiah Booker (Junior) et John McConnell comme propriétaire de la
plantation La Bonne Intention. [163]
![]() |
Section
de carte détaillée datant de 1792 [209]
Source: www.Gahetna.nl |
Dans
le manuel de la Guyane Britannique de 1909, la société « Plantation
La Bonne Intention Limited » est reprise comme propriétaire de
cette plantation. [378] Le 28 Octobre 1916, La plantation La Bonne
Intention change de propriétaire et appartient alors à un syndicat
local. [379]
A
partir de 1923 la plantation La Bonne Intention d’apparait plus
directement dans les registres, mais se cache derière l’étiquette
« Ressouvenir Estates ». La « The Success and Le
Ressouvenir Company Limited » qui apparait dans le manuel de la
Guyane Britannique dès 1909 a fusionné avec la plantation La Bonne
Intention entre 1916 et 1923. Par conséquent elle appartenait à la
Booker Brothers McConnell & Company Limited en 1923. La
plantation Success sur la côte avait été achetée en 1902 à la
Colonial Company Limited qui avait été liquidée en 1901. Son
successeur, la New Colonial Company, ne possédait plus cette
plantation. Bookers fusionna d’abord Success (EC Demerara) et La
Ressouvenir puis entre 1916 et 1923 La Bonne intention fut ajoutée
aux « Ressouvenir Estates ».
La
distillerie La Bonne Intention
![]() |
Détail
d’une carte datant d’Octobre 1798 [212]
Source: www.Gahetna.nl |
En
1798 on plantait exclusivement du coton sur la plantation La Bonne
Intention. Vers 1833 il n’y avait plus que de la canne à sucre. Le
changement a probablement eu lieu quelque part entre 1798 et 1833.
[7] Et effectivement, une source de 1851 ne compte que du sucre
(600,000 lb, environ 272 tonnes) pour la récolte de 1829. En
1835 il y avait en plus du sucre, (538,657 lb, environ 244 tonnes)
du café (3000 lb, environ 1360 kg) repris dans les documents de la
récolte, mais il disparut sans laisser de traces les années
suivantes. [222] Il est ainsi fort probable que la production de rhum
commençât au 19è siècle. La plantation La Bonne Intention
représentait la colonie de Guyane Britannique dans la catégorie
rhum avec quelques concurrents à l’exposition universelle de
Calcutta de 1883/84. [226]
![]() |
Détail
d’une carte datant de 1798 [122]
Source: http://dpc.uba.uva.nl/ |
En
1954 la distillerie La Bonne Intention produisait 89 883 gallons
de rhum (environ 340.000 litres). D’après une autre source on y
produisait encore 139.790 gallons (environ 529.000 litres) en 1959.
Il manque par contre les chiffres de 1960. [4] A partir de 1963 la
distillerie n’était plus reprise dans les rapports. [2] [3] Cela
donne l’impression que la distillerie La Bonne Intention a disparu
en 1960. Que s’est-il passé ? Je citerai une source :
« Le
volume de production de la distillerie Uitvlugt de Guyana
Distilleries avait triplé depuis sa construction par Bookers en
1960. Dans un projet de rationalisation elle avait récupéré le
débit de quatre distilleries mises au rebut en 1969. » [159]
La
distillerie Uitvlugt, construite ou modernisée par Bookers en 1960,
récupéra la production de quatre distilleries de rhum mises au
rebut en 1969. J’interprète donc ce texte. Ce n’est pas une
coïncidence si dès 1960 beaucoup de distilleries avaient disparu
avec Bookers. Mais j’aimerais rappeler qu’en 1966 Booker dut
vendre sa propriété au nouveau gouvernement Guyanais. Booker
n’avait plus le contrôle total de cette distillerie. La première
victime de ladite rationalisation fut la distillerie La Bonne
Intention. La dernière année active de la distillerie fut 1959.
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Détail
d’une carte datant de 1823 [185] [186]
Source: http://en.wikipedia.org |
Ce
n’était pas par hasard si on avait prévu la mise en service d’une
nouvelle usine sucrière cette année-là. Cette nouvelle usine
centrale devait prendre en charge la cane des domaines La Bonne
Intention, Houston et Ogle. L’usine d’Ogle a été fermée fin
1958. [380] Cette nouvelle usine sur le domaine La Bonne Intention ne
comportait plus de distillerie. Après la modernisation d’Uitvlugt
en 1960 le matériel utilisable fut transféré à la distillerie
Uitvlugt. Le reste fut mis au rebut.
La
mark de la plantation et distillerie est reprise comme étant L.B.I.
par beaucoup d’auteurs. En fait, cette marque est en rapport avec
le domaine La Bonne Intention. [27] Elle figure également sur une
bouteille de Velier. On ne peut que spéculer sur fait qu’un
alambic de la distillerie La Bonne Intention ait survécu. Je possède
une bouteille de l’ère post-La Bonne Intention datant de 1998. On
dit sur l’étiquette que son origine est une colonne continue. Mais
il peut s’agir de n’importe quelle colonne continue chez DDL, à
part peut-être celle d’Enmore et les deux colonnes Savalle
d’Uitvlugt. Je n’ai aucune suggestion.
Mark
de La Bonne Intention: LBI
|
Création:
Entre 1759 et 1873
Fondateur: François (Daniel) Changuion
Emplacement: Sur la côte est du Demerara, entre le fleuve Demerara et la rivière Mahaica.
Statut: Distillerie fermée en 1959 ; Sucrerie fermée en 2011.
Alambics: Inconnus. Probablement détruits.
Fondateur: François (Daniel) Changuion
Emplacement: Sur la côte est du Demerara, entre le fleuve Demerara et la rivière Mahaica.
Statut: Distillerie fermée en 1959 ; Sucrerie fermée en 2011.
Alambics: Inconnus. Probablement détruits.
Histoire
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Détail
d’une carte datant d’Octobre 1798 [212]
Source: www.Gahetna.nl |
William
Ross (1787 -1840) était le fils d’Hugh Ross III of Kerse and
Skeldon (Ayrshire). En 1804 le jeune homme de 17 ans arriva à
Berbice. William Ross reçut, en tant que propriétaire de la
plantation Skeldon, £ 17,295 comme compensation pour la libération
de 326 esclaves en 1834. Le nom Skeldon a des racines Ecossaises. Il
était marié à Helen Elizabeth Ross Drummond. [128] [129] On
retrouve son nom dans une liste de colons de Guyane Britannique.
[130] La côte est de Berbice n’était seulement propice aux
plantations que jusqu’à la rivière Devils en 1799. [182] La côte
du Corentyne a dû s’étaler depuis le fleuve (frontière du
Suriname) entre 1799 et 1802. Sur une carte de 1802 il n’y a ni
propriétaires ni cultivations mentionnées sur les lots de la rive
ouest du fleuve Corentyne. Il semble donc qu’il n’y ait pas eu de
plantation du nom de Skeldon avant 1802. [219] [220] La plantation
Skeldon a dû être établie par William Ross entre 1802 et 1834.
![]() |
Détail
d’une carte datant de 1802 [219] [220]
Source: www.Gahetna.nl & www.Gahetna.nl |
La
mark de Skeldon S.W.R. vient apparemment des initiales de « Sir
William Russell ». Elle était utilisée pour identifier le domaine
sucrier. [24] Je n’ai pas trouvé plus de connections entre Sir
William Russell et la plantation Skeldon. Après la mort de son mari
Helen Elizabeth Ross Drummond (1811 - 1863) épousa William Charles
Metcalfe en 1846 et prit son nom. [404] La plantation Skeldon
appartenait toujours à Mme Ross d’après une source en 1860 (sous
le nom de Mme Metcalfe). [384]
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Skeldon
sur la rive gauche [193]
Source: www.rootsweb.ancestry.com |
D’après
une source en 1882 les héritiers de William Ross possèdent toujours
la plantation Skeldon. Malheureusement aucun nom n’est mentionné
explicitement. [382] Le manuel de Guyane Britannique de 1909 désigne
"The Trustees of John McConnell deceased" (Les
administrateurs du défunt John McConnell) comme propriétaires. Ces
administrateurs sont les deux fils de John McConnell qui ont
rassemblé les trois sociétés pour créer Booker Bros., McConnell &
Company Limited en 1900. [378] Une autre source rapporte que durant
sa vie Mr John McConnell a acquis la plantation Skeldon. Cela
signifie que la plantation entra en la possession du groupe Booker
(non encore fusionné) entre 1882 et 1890 alors que John McConnell
est mort en 1890 et que le changement de propriétaire a eu lieu
durant cette période. [405]
Le
domaine Skeldon resta sous contrôle de Bookers Demerara Sugar
Estates Limited jusqu’à sa vente forcée au gouvernement. Le
domaine Skeldon appartient aujourd’hui à la Guyana Sugar
Corporation (Guysuco) et on y cultive toujours la canne à sucre. En
2009, une nouvelle usine sucrière a été construite à Skeldon et
était opérationnelle la même année. L’ancienne usine a fermé.
La
distillerie Skeldon
![]() |
© E.H. |
Depuis
quand la canne à sucre est-elle cultivée sur la plantation Skeldon?
Je cite une source en rapport avec les plantations côtières de
Berbice : « Le coton pousse mieux sur les domaines côtiers, et
c’est d’ailleurs sur ceux-ci qu’il est principalement cultivé »
[183] Cela concorde avec l’état des plantations proposés sur la
carte de 1802. La couleur suggère la plantation de coton sur toute
la zone. Mais on ne recensa pas les propriétaires ni les
cultivations au moment de dessiner la carte. Donc théoriquement la
cultivation du sucre aurait été possible en 1802. [219] [220]
Si
l’on se fie à un rapport de 1847, le changement de culture s’est
opéré entre le 1er Janvier 1838 et le 31 Décembre 1845.
Skeldon est toujours recensée comme plantation de coton au premier
Janvier 1838. La mention supplémentaire « Convertie en sucre »
de l’année 1845 indique que la cultivation avait changé avant le
31 Décembre. [172] La première apparition publique de la plantation
Skeldon sur le marché du rhum eut lieu à l’exposition universelle
de Chicago en 1893. [179] La première distillation de rhum eut
probablement lieu bien plus tôt, mais certainement pas avant le 1er
Janvier 1838.
![]() |
© E.H. |
La
distillerie Skeldon a produit jusqu’en 1960. 66,070 gallons
(environ 250 000 litres) de rhum ont été comptabilisés cette
année-là. C’est très peu comparé à l’année précédente
avec 147,531 gallons de rhum (environ 558 000 litres). [4] La
raison est simple mais donne à réfléchir. La distillerie fut
fermée avant la fin de l’année 1960. Il existe une note à ce
propos. [6] Les chiffres de production du tableau 4 offrent une autre
bonne référence. Il n’y a plus de traces de la distillerie
Skeldon après 1961. Cependant la production de sucre se maintint.
Une autre distillerie avait disparu. Ce n’est pas une coincidence
si le groupe Booker a amélioré la distillerie Uitvlugt en 1960
avant de détruire la distillerie Skeldon dans l’usine sucrière.
Après la distillerie La Bonne Intention, la distillerie Skeldon fut
la deuxième victime de la modernisation initiée par Bookers en
1960. Deux autres distilleries allaient suivre.
Deux
embouteillages de Velier de 1973 et 1978 indiquent une colonne Coffey
comme origine du rhum. Je ne sais pas du tout quelle colonne Coffey
se retrouva à la distillerie Uitvlugt. Comme mentionné plus haut la
distillerie Skeldon était détruite en 1960. Les deux rhums viennent
de l’ère post-distillerie Skeldon et il est impossible que ces
rhums proviennent de Skeldon même. Mais j’ai bien peur qu’aucun
alambic de cette distillerie n’ait survécu.
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L’ancienne
usine sucrière de Skeldon
Source: pmtcalumni.org |
Création:
Entre 1802 et 1834
Fondateur: William Ross
Emplacement: Sur la côte de Corentyne, près de la frontière du Suriname. Précisément sur la rive ouest de l’estuaire du fleuve Corentyne.
Statut: Distillerie fermée en 1960 ; Nouvelle usine sucrière active depuis 2009.
Alambics: Sans doute détruits.
Fondateur: William Ross
Emplacement: Sur la côte de Corentyne, près de la frontière du Suriname. Précisément sur la rive ouest de l’estuaire du fleuve Corentyne.
Statut: Distillerie fermée en 1960 ; Nouvelle usine sucrière active depuis 2009.
Alambics: Sans doute détruits.
Lambert
Blair (1767 – 1815) était un propriétaire de plantation et un
marchand Irlandais qui gagna beaucoup d’argent avec la traite des
esclaves et qui possédait 7 plantations à Berbice en 1799. Parmi 6
autres plantations (lots) sur les rives du fleuve Berbice, seulement
identifiées par des numéros, il y avait « Utile & Paisible ».
D’après une source il s’agissait des lots 17, 18, 19, 20, 37 et
38. Lambert Blair reçut une compensation de £83,530 pour ses 1598
esclaves durant l’émancipation de 1834. [131] La plantation ne
reçut probablement son nom qu’en 1799. Un site internet rapporte
que la carte de 1780, qui apparait également dans cet article, date
en fait de 1771. Cela impliquerait que l’éventuelle plantation
Blairmont existait déjà en tant que lot en 1771. [206]
![]() |
Détail
d’une carte datant de 1802 [219] [220]
Source: www.Gahetna.nl & www.Gahetna.nl |
Sur
une carte d’Octobre 1798 on ne retrouve ni le nom
Blairmount/Blairmont ni Lambert Blair parmi les lots 3 à 10 en face
de New Amsterdam. A la place, cette carte confirme la possession
d’Utile & Paisible (Lot 18 sur la rive occidentale). Sur cette
carte les lots anonymes 3, 5, 17, 18, 19 et 37 de la rive ouest de
Berbice citent Blair ou « & » à la suite, ce qui signifie « idem
que la plantation précédente ». [212] Les plantations en possession
de la Dutch West India Company sont estampillées « Compy: ». Je ne
sais pas exactement à quelle base se réfère la source précédemment
citée.
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Détail
d’une carte datant de 1802 [219] [220]
Source: www.Gahetna.nl & www.Gahetna.nl |
Les
choses ont changé sur une carte de 1802. Les lots 3 et 5
n’appartiennent plus à Lambert mais le lot 20 est maintenant en sa
possession et les noms des plantations sont finalement déclarés :
Bath (Lot 16), Catharina's Rust (Lot 17), Naarstigheid (Lot 18),
Onderneemig (Lot 19) et Jacoba Wihelmina (Lot 37). Le nom de la
plantation Bath devrait rappeler quelque chose à certains lecteurs.
[213] [214] [219] [220] Lambert Blair possédait également quelques
plantations sur la côte de Corentyne dans l’Est de Berbice. (Lot
42 et 43) n’avaient pas encore été cultivés en 1802. Aucunes
plantations ou noms de plantations ne sont mentionnés ici. [219]
[220]
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Détail
d’une carte datant d’Octobre 1798 [212]
Source: www.Gahetna.nl |
Lambert
Blair fut le fondateur de la plantation Blairmont, qui fut à
l’origine appelée « Blair Mount ». La source de l’auteur
est/était „Rev. James Williams' "Dutch Plantations in the
Berbice and Canje Rivers" [34]. En 1834 la plantation Blairmont
appartenait à un homme appelé James Blair. C’était le neveu et
successeur de Lambert Blair. James Blair (1788-1841) devint plus tard
membre du parlement et représentait les intérêts des planteurs.
[15] [164] [165] Un certain H.S. Blair (Plantation Blairmont) est
cité comme représentant à l’exposition universelle de Paris en
1867. Il apporta des rhums, ambrés et non-colorés.
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Détail
d’une carte datant d’Octobre 1798 [212]
Source: www.Gahetna.nl |
Cet
H.S. Blair, dont le nom complet était William Henry Stopford Blair,
était le beau-frère et le successeur de James Blair. Sa sœur était
Elizabeth Catherine, la plus jeune fille du Lieutenant-Général
l’honorable Edward Stopford, qu’épousa James Blair en 1815. Vous
vous demandez sans doute pourquoi cet homme avait pris le nom de
Blair : il prit le nom de son beau-frère. [176] En 1862
Stopford Blair gagna une médaille à l’exposition universelle dans
la catégorie des rhums avec l’appréciation « Savoureux,
plein de caractère ». [177] William Henry Stopford Blair
décédai en Septembre 1868 peu après l’exposition universelle de
Paris.
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Blairmont, Albion & Port Mourant [192] Source: www.rootsweb.ancestry.com |
Le
propriétaire de la plantation changea en 1882. La plantation
appartenait cette année-là à un certain H.K. Davson. [382] Il
s’agissait de Sir Henry Katz Davson. Sir Henry Katz Davson vécut
de 1830 à 1909. [383] Sa société, the Messrs. Henry K. Davson and
Company, était basée à Londres et était liée à la société
Davson & Company Limited à Berbice. [168] D’après le manuel
de la Guyane Britannique de 1909, la plantation appartenait à "The
Blairmont Sugar Plantation Company, Limited", qui était un
sous-traitant de S. Davson & Company Limited. En 1909 la
plantation voisine Bath était désignée comme propriété de la S.
Davson & Company Limited. [378] L’ancienne plantation
Providence sur la rive Est du fleuve Berbice faisait déjà partie du
domaine Blairmont cette année-là. Plus tard la plantation Bath fut
ajoutée au domaine et l’usine sucrière locale fut fermée.
La
distillerie Blairmont
![]() |
© E.H. |
Les
quelques plantations de New Amsterdam sur la rive Ouest du fleuve
Berbice plantaient exclusivement du café selon une ancienne carte de
la colonie de Berbice de 1802. [171] La première plantation
documentée de canne à sucre sur la plantation Blairmont est
mentionnée dans un rapport daté du premier Janvier 1838. [172] Donc
le changement de cultivation s’est probablement effectué entre
1802 et 1838. La première production de rhum comptabilisée remonte
à la récompense de William Henry Stopford Blair en 1862. Peut-être
qu’il y a de plus vieilles références mais c’est la plus
ancienne que j’ai trouvé.
La
distillerie Blairmont produisait encore du rhum en 1960. On dispose
d’un chiffre de 272,699 gallons de rhum (plus d’un million de
litres). A partir de 1963 la distillerie n’apparait plus dans le
rapport. [2] [3] [4] Les chiffres de production de 1963 ne figurent
pas non plus dans les autres registres. La distillerie Blairmont a
vraisemblablement fermé en 1962. [41] Dans le contexte de
rationalisation la distillerie fut mise hors service et le matériel
transporté à l’usine principale du groupe Booker située à
Uitvlugt. La plantation Blairmont présenta deux variantes de rhums à
l’exposition universelle de Paris (blanc / ambré) en 1867. Donc
Blairmont aussi a pratiqué la tradition de coloration du rhum.
![]() |
© E.H. |
La
mark de la plantation/distillerie Blairmont est connue comme B. par
plusieurs auteurs. Broom a écrit dans son livre « Rum » à la page
82: «…et Blairmont B dans un diamant». Si l’on regarde
l’étiquette du Blairmont 1991 Full Proof Old Demerara de Velier,
les crochets <> rappellent un diamant. Ces rhums plus récents
d’après 1963 proviennent selon l’étiquette d’une colonne
Savalle. Mais les deux Savalle Françaises proviennent sans doute de
la distillerie Uitvlugt. Cela signifie-t-il que les deux colonnes
proviennent à l’origine d’Uitvlugt? Ou que l’une d’elles est
la colonne originale de Blairmont qui aurait été transférée à
Uitvlugt en 1962? Une théorie intéressante. Mais je ne dispose
d’aucune preuve et j’ignore l’âge des deux colonnes Savalle.
Il est également plausible qu’aucun alambic de Blairmont n’ait
survécu à sa fermeture. Il y a également une autre théorie: une
colonne en bois bien plus ancienne pourrait avoir été détruite à
la fermeture de la distillerie Blairmont et avoir été remplacée
par une des colonnes Savalle à Uitvlugt. C’est théoriquement
possible car beaucoup de colonnes étaient construites en bois local
au début du 20è siècle. Par contre le moment auquel on a changé
pour des colonnes nouvelles et modernes est difficile à établir.
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L’usine
sucrière Blairmont
Source: www.internationalsteam.co.uk |
Création:
entre 1802 et 1834
Fondateur: Lambert Blair
Emplacement: Sur la rive Ouest du fleuve Berbice, en face de New Amsterdam.
Statut: Fermée en 1962
Alambics: La colonne Savalle Française a été soit détruite soit transférée à Uitvlugt puis à Diamond DDL. Il est possible qu’un alambic en bois plus ancien ait existé mais ne soit pas parvenu jusqu’à Diamond.
Fondateur: Lambert Blair
Emplacement: Sur la rive Ouest du fleuve Berbice, en face de New Amsterdam.
Statut: Fermée en 1962
Alambics: La colonne Savalle Française a été soit détruite soit transférée à Uitvlugt puis à Diamond DDL. Il est possible qu’un alambic en bois plus ancien ait existé mais ne soit pas parvenu jusqu’à Diamond.
Albion (Berbice)
Histoire
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Carte
de Berbice. Environ 1720 [188]
Source: http://en.wikipedia.org/ |
Sur
une carte datant d’environ 1720 il n’y a aucune plantation sur
les côtes de la colonie de Berbice. [121] Toutefois, il y a quelques
plantations le long de la côte Ouest de Corentyne sur une autre
carte datant de 1802. Mais je n’ai trouvé aucun document où
figureraient les noms des lots de cette carte. [171] Au départ
seules les régions long du fleuve Berbice étaient dotées de
plantations. D’après deux sources différentes, les premières
plantations de la côte de Berbice furent établies en 1791 ou en
1796. [182] [205] Une des deux sources rapporte que toutes les
plantations de la côte Est à la rivière Devil étaient déjà
établies en 1799. La côte ne fut complètement couverte de lots
qu’en 1802.
Sur
une autre carte de 1802 on trouve les noms des propriétaires des
lots sur la côte de Corentyne à l’Est de Berbice. Deux de ces
noms sont intéressants. Il s’agit d’Innes (Lot 5) et Ross (Lot
5). [219] [220] Le nom Ross vient de John Ross. John Ross est
mentionné comme propriétaire de la plantation Nigg dans le numéro
16885 de la London Gazette. Ce numéro date du 16 Février 1814.
[214] Le nom Innes vient de William Innes. William Innes et John Bond
reçurent 10.725 £ du gouvernement Britannique en compensation
de la libération de 225 esclaves de la plantation Albion. [120] Quel
était le rapport entre la plantation Nigg et la plantation Albion?
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Détail
d’une carte datant de 1802 [219] [220]
Source: www.Gahetna.nl & www.Gahetna.nl |
Les
deux plantations furent vendues pour 1000 $ le 7 Juin 1847. Les lots
des plantations sont également repris. D’après cette source la
plantation Albion comprenait le lot 5 et Nigg le lot 6. [215] Cela
coïncide avec les noms des propriétaires sur la carte de 1802. Bien
qu’aucune plantation ne fût mentionnée la plantation Albion
existait déjà en tant que lot vers 1802 [219] [220]
Le
domaine Albion apparait également dans une lettre d’Henry Light à
Lord John Russell. Henry Light y écrit que le domaine Albion
commençait la production de sucre le mois suivant. La lettre date du
15 Septembre 1840. [1] Je comprends donc qu’Henry Light parlait de
la première production de sucre du domaine Albion. D’après la
carte de 1802 toutes les plantations côtières cultivaient
exclusivement du coton ou étaient prévues pour cela. En 1802 il n’y
avait aucune plantation de sucre sur la côte Est de Corentyne. [171]
Cela
ne changea pas avant le 1er Janvier 1838. D’après un
rapport la plantation plantait toujours du coton à cette date. La
période entre le 1er Janvier 1838 et le 31 Décembre 1846
est annotée de « Convertie en sucre ». Le changement de cultivation
a dû avoir eu lieu pendant ce temps-là. Cela correspond avec la
lettre mentionnée plus haut, car elle a été écrite entre 1838 et
1846. [172]
En
1860 la plantation Albion appartenait à la société Cavan Brothers
and Company. [384] Elle resta en leur possession jusqu’en 1865.
Cette année-là la Colonial Company Limited fut créée. Cette
société privée acheta les plantations et les propriétés des
sociétés Messrs Cavan, Lubbock & Co. (Anicennement Cavan
Brothers & Co.) et Wm. Burnley Hume & Company. Elles étaient
situées au Demerara, Berbice, Trinidad et Barbade. [385] La Colonial
Company Limited fut liquidée en 1901 et Albion fut transférée à
la New Colonial Company Limited. [386] Cette société ne vécut que
jusqu’en 1913. Elle fut liquidée cette année-là. [387] Albion
arriva alors dans les mains de la société Curtis, Campbell &
Company Limited. En conséquence de la fusion de Messrs. Curtis
Campbell & Co. et Booker Bros., McConnell & Company Limited
le 20 Octobre 1939 le domaine Albion entra en possession du groupe
Booker. [113] [115] Le domaine sucrier est toujours en exploitation
de production de canne à sucre par GuySuCo.
La
distillerie Albion
Mark
d’Albion AW (Alambic Enmore)
|
En
1966 la production vérifiable de rhum à la distillerie Albion était
de 370,622 gallons (environ 1 million 400.000 litres) [2] D’après
Dave Broom il n’y avait plus que trois distilleries en 1971 et
Albion n’en faisait plus partie. Cela signifie que la distillerie
Albion fut dissoute quelque part entre 1967 et 1969. Comme mentionné
plus haut la distillerie Uitvlugt récupéra la capacité de quatre
distilleries détruites entre 1967 et 1969. Trois autres distilleries
ont déjà été victimes du changement. Albion est donc la quatrième
et dernière distillerie qui fut probablement détruite durant cette
période. Cela nous ramène à la fameuse période de 1967-1969.
Pourquoi 1969? Parce que cette année est explicitement mentionnée
comme la fin de la rationalisation en rapport avec la distillerie
Uitvlugt. Je pense donc qu’il s’agit de la dernière année
d’activité de la distillerie Albion.
Tout
ce que je peux enfin dire quelque chose de tangible. Ingvar Thomsen,
un journaliste danois, mené en 2005 par une entrevue avec Yesu
Persaud. Voici les informations de M. Persaud que Albion était déjà
fermé en Janvier 1968. 1969 Albion a été depuis si longtemps
fermé. [464]
Les
marks suivantes sont en rapport avec Albion: A.N. et A.W.. Velier
appose la mark A.W. sur l’étiquette de l’Albion 1986 Full Proof
Old Demerara 25 YO et une donne comme origine une colonne en bois
(sur la boite). La mark de l’Albion 1994 Full Proof Old Demerara
17YO de Velier est A.N. et donne également comme origine une colonne
en bois. L’embouteillage Velier 1983 Full Proof Old Demerara 25 YO
comporte aussi la mark A.N. et spécifie une colonne en bois.
Malheureusement je ne connais pas la mark de l’ Albion 1989 Full
Proof Demerara de Velier mais une colonne en bois figure également
sur l’étiquette. Toutefois tous ces rhums sont de l’ère
post-Albion après 1969.
La
mark AN viendrait de la fusion entre les plantation Albion et Nigg.
Ils étaient directement voisins. Une source de 1841 liste également
un domaine sucrier du nom d’Albion and Nigg. [196] Une autre source
de 1851 leur donne les numéros de lots 5 et 6 sur la côte de
Corentyne. [197] Donc ce style était distillé en Colonne Coffey en
bois. D’après le tableau créé par la Brand Ambassador de DDL
Stefanie Holt, le style de rhum A.N. est aujourd’hui distillé par
la Savalle Française. Y a-t ’il eut changement? On dirait bien.
Une
rumeur dit que l’alambic Port Mourant entrait dans la création de
la mark A.W.. D’après Luca Gargano, le double Vat still ne fut pas
transféré à Uitvlugt après la fermeture de la distillerie Port
Mourant. Il fut d’abord amené à la distillerie Albion et y a
passé une période d’une durée inconnue. Mais quand le double vat
still a-t’ il quitté Albion? On peut supposer que l’alambic a
quitté Albion à sa fermeture en 1969. Mais pourquoi alors
Caddenhead a-t’ il sorti un embouteillage de 36 ans d’âge du nom
d’Uitvlugt avec la mark P.M. sur l’étiquette? Sur l’étiquette
on donne également un pot still comme origine du millésime 1964
(1964 – 2001). Albion existait au moins jusqu’en 1967. Alors
comment est-ce possible?
« Distillerie
Albion, Albion, Guyana (1965 – 1967)
Manager
– Fermentation, distillation, vieillissement, assemblage, stockage
pour 10.000 litres/jour de rhum dans une unité pot still et 6000
litres/jour dans une unité colonne. » [224]
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Le
domaine Albion dans les années 1920
Source: chs-jccss.org |
Il
ne restait que deux distilleries possédant un pot ou vat still en
1947. On compte Versailles qui existait jusqu’en 1965. Donc le
deuxième pot still doit être l’alambic Port Mourant. Heureusement
les données de production du double vat still ont été
enregistrées. Diffordsguide a indiqué une capacité de production
de 3000 gallons (environ 11 356 litres) pour le premier vat
still et 2000 gallons (environ 7570 litres) pour le second. 10 000
litres donnent 2641,72 gallons US ou 2199,69 gallons (impériaux)
Britanniques. Malheureusement je ne sais pas combien on peut
distiller de rhum avec 3000 gallons de « wash » mais ces chiffres de
production confirment ma suspicion que l’alambic Port Mourant se
trouvait à Albion. [224] [225]
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La
modernité du domaine Albion
Source: chs-jccss.org |
Alors
comment est-il possible que Caddenhead embouteille le millésime 1964
avec la mark P.M.? Il est possible qu’il n’y ait pas que
l’alambic Port Mourant qui ait été transféré à Uitvlugt.
Quelques futs pleins de rhum ont aussi pu déménager avec l’alambic.
Ce rhum cependant ne doit pas avoir passé tout son temps sous le
climat temperé de la Grande Bretagne. Malheureusement, ce rhum est
épuisé depuis longtemps. Ainsi ces suppositions ne pourront jamais
être vérifiées. Je pense que l’on peut raisonnablement penser
que l’alambic Port Mourant est allé à Uitvlugt à la fermeture de
la distillerie Albion. Luca Gargano avait raison.
Cependant,
un embouteillage de Velier du nom d’Albion du millésime 1986
mentionne comme origine une colonne en bois. Ce ne signifie pas
nécessairement grand-chose car une mark fait référence à un style
spécifique de rhum et ces styles ne sont pas forcément en rapport
avec un alambic spécifique. Le style de la mark A.W. peut en réalité
venir de l’alambic Port Mourant et avoir plus tard été distillé
dans l’alambic Coffey Enmore. Une source de 1908 fait référence à
l’ancienne distillerie Diamond et déclare que leur ancienne
colonne Coffey produisait presque le même rhum que celui produit par
leur vat still. Comme je l’ai déjà écrit, la distillerie Diamond
a possédé un vat still. [86] Je pense donc que cette théorie est
assez possible.
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© E.H. |
Je
doute fortement qu’un alambic original de l’ancienne distillerie
Albion ait survécu. Il y a des preuves que le premier rhum sortant
de la distillerie Albion était distillé en colonne Coffey en bois.
Mais le seul alambic Coffey en bois listé par DDL est l’alambic
Enmore. Je pense que l’on peut raisonnablement présumer que
l’alambic Coffey Enmore pouvait copier les styles d’Albion et
qu’ainsi l’alambic Coffey fut détruit. Que cela ait eu lieu à
la fermeture d’Albion ou pendant les prémices d’Enmore n’a pas
d’importance car cet alambic n’existe plus de toute façon.
Pourquoi
suis-je aussi sûr de la présence d’une colonne Coffey en bois à
Albion? Regardons de nouveau les chiffres. La colonne mentionnée
dans les activités de Mr Harold Birkett produisait 6000 litres de
rhum par jour. [20] J’aimerais alors citer une autre source de
1983, qui indique aussi une chose vraiment intéressante: « La
colonne versatile John Dore-Tri Canada peut traiter le wash au rythme
de 250 gallons (environ 946 litres) d’alcool par heure, en
remplacement d’une colonne Coffey en bois qui donne 120 gallons
(environ 454 litres) par heure. » [20] Donc une colonne Coffey était
capable de produire environ 120 gallons de rhum par heure. Ce qui
donnerait 1440 gallons de rhum en une journée de travail de 12
heures. Si l’on suppose qu’il s’agit de gallons US, le résultat
serait d’environ 5450,99 litres, ou si l’on considère qu’il
s’agit de gallons (impériaux) Britanniques 6546,37 litres. Cela
correspond à peu près. Toutefois, je ne connais pas la durée d’une
journée de travail à cette époque. Bien sûr toutes les colonnes
Coffey en bois n’étaient pas identiques et je crois que le
résultat variait un peu d’un alambic à l’autre. Mais je ne
crois pas qu’il variait énormément. Je peux donc raisonnablement
penser qu’il y avait une colonne Coffey en bois à Albion au moment
où Harold Birkett y travaillait. Mais cet alambic a été mis au
rebut et n’existe plus.
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© E.H. |
Création:
entre 1802 et 1803
Fondateur:
William Innes
Emplacement:
Le domaine est situé à l’Ouest du village de Rose Hall
(actuellement une ville d’à peu près 8000 habitants) sur la côte
est du fleuve Berbice. Plus précisément sur la côte Corentyne, à
l’Ouest de l’ancien domaine Port Mourant.
Statut: La
distillerie Albion a fermé en Janvier 1968.
Alambics: La colonne Coffey en bois originale a été détruite.
Alambics: La colonne Coffey en bois originale a été détruite.
Versailles (Demerara)
Histoire
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Détail
d’une carte datant de 1759 [132]
Source: http://dpc.uba.uva.nl |
Pour
ce domaine, retournons au 18è siècle. La plantation Versailles
était située juste au Nord de la plantation La Grange sur une carte
de 1798. Cette plantation s’appelait Des Granges en 1759. Les
plantations sur la rive Ouest du fleuve Demerara portant les numéros
2, 3 et 4 en 1759 furent finalement divisées et réparties sur les
plantations Meer Zorgen, Schoon Oord, 't Goed Fortuin, Versailles et
Klein Poederoyen sur la carte de 1798. Sur cette carte de 1759 figure
le nom L’Amirault. Il était un collaborateur de l’ancienne
plantation Jerusalem sur la rive Est du fleuve Demerara. [132] [122]
On
mentionne la plantation Versailles pour la première fois sur deux
cartes de 1776. Le propriétaire était un certain Pierre L’Amirault.
Elle a probablement changé de propriétaire plus tard. Sur des
cartes de 1783 et 1784, un certain Cornette est repris comme
propriétaire. Puis un autre changement eut lieu. P. Lamirault est
repris une nouvelle fois comme propriétaire du lot 6 en 1786. Et
cela jusqu’en 1798. Ensuite L. Lamirault est reprise comme
propriétaire de la plantation Versailles (Lot 8). Son nom complet
est Jeanne Marie Luisa Lamirault. [217] [218] [122]
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Détail
d’une carte de 1783 [211]
Source: http://www.gahetna.nl |
Cette
Jeane Marie Luisa Lamirault est listée dans le registre des colons
de la Guyane britannique. [133] La Plantation Versailles est
finalement mise en vente en 1816 par Marie Jeane Luisa Lamirault.
Elle était la veuve de FC DeCornette. [134] Soit elle a épousé FC
DeCornette après la mort de Pierre L'Amirault (son 1er mari) et
conservé son ancien nom, soit elle était la fille de Pierre
L'Amirault et avait épousé cet homme. A ce jour je ne sais
malheureusement pas quelle version est la bonne.
Plus
tard le domaine Versailles entra en possession de Pln Versailles &
Schoon Ord Ltd. Cela entraina une fusion avec la plantation Schoon
Ord & Meerzorg en 1831. [23] La plantation Schoon Ord était
située un peu plus au Sud, non loin de la plantation Versailles.
[53] La prononciation de Versailles et Schoon Ord est expliquée dans
une note en bas de page : Ver-sales et Skoon-Ord. [35] La plantation
Goed Fortuin se trouvait au milieu des plantations Versailles et
Schoon Ord. [45]
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Détail
d’une carte datant de 1786 [127]
Source: http://dpc.uba.uva.nl/ |
Au
moment de l’émancipation un certain Francis De Ridder comptait 351
esclaves sur la plantation Versailles en 1832. Ce gentilhomme
pourrait avoir acheté la plantation directement à Mme Jeanne Marie
Luisa Lamirault en 1816. [409] Plus tard, la plantation Versailles
entra en possession d’un certain John Croal (1789-1853). [410] A sa
mort il laissa non seulement la plantation Versailles mais aussi les
plantations Palmyra et Malgré Tout. [411] Pendant ce temps la
plantation Versailles devenait la propriété de la société Thomas
Daniel & Company. En 1882, les héritiers de Thomas Daniel
étaient toujours propriétaires de la plantation Versailles ainsi
que de la plantation Château Margo. [382] Une source de 1985
mentionne le domaine de Versailles, composé des anciennes
plantations « Malgré tout » et de la moitié Sud de « Klien
Poderoyen ». [388] Il y eut probablement fusion entre 1853 et 1882.
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Détail
d’une carte datant de 1786 [127]
Source: www.Gahetna.nl |
La
propriété a été achetée en 1896-97 par la société Meers.
Wieting and Richter Limited. Cette société monta un syndicat local,
mentionné dans le manuel de la Guyane Britannique de 1909. Elle fut
appelée la « Versailles Plantation Company Limited ». [389] [378] En
1917, Wieting & Richter étaient toujours propriétaires de la
"VERSAILLES Plantation Company Limited". [390] Wieting &
Richter possédaient également la plantation Nismes, qui avant 1922
avait fusionné avec Versailles car la même année on parlait de la
"Versailles and Nismes Sugar Estate Companies, Ltd". [391]
Finalement une source de 1929 relie directement le domaine à Booker
Bros., McConnell & Co., Ltd en tant que propriétaire du domaine
Versailles en 1929. [393] Le nom se changea en Versailles Estate
Limited avant 1934. [113] Vers 1937 la plantation Schoon Ord fusionna
avec Versailles et le nouveau nom "Plantation Versailles &
Schoon Ord, Estates Limited" en découla. [395] Apparement le
nom changea encore et en 1949 la propriété était désignée comme
propriété de la "Plantation Versailles & Schoon Ord
Limited". [396]
La
Mark V.S.G. mentionnée dans l’article de Sascha sur le domaine de
Versailles, pourrait être une combinaison des trois plantations
(Versailles, Schoon Ord et Goed Fortuin) car comme nous l’avons vu,
la propriété Versailles a absorbé pas mal d’autres plantations.
La Mark SXG pourrait aussi venir de la fusion de deux autres
plantations (Schoon Ord et Goed Fortuin). Il est clair que la
plantation Schoon Ord distillait du rhum car elle a envoyé des
échantillons à l’exposition universelle de Paris en 1867. Parmi
ceux-ci figuraient du rhum blanc mais aussi une version ambrée. [47]
L’usine sucrière de Versailles a fermé en 1978. [10] GuySuCo ne
fait plus appel au domaine Versailles aujourd’hui.
La distillerie Versailles
La distillerie Versailles
D’après
l’ancienne carte de 1798, Versailles ne plantait que du café.
[122] [123] Dans une liste d’esclaves rassemblant l’ensemble des
domaines sucriers de la Guyane Britannique en 1833, la plantation
plantait finalement de la canne à sucre en plus du café. [7] Cela
changea durant la période 1838 – 1846. On abandonna finalement le
café au profit de la canne à sucre. [172] D’après une autre
source, la plantation Versailles produisait déjà plus de sucre
(192.850 Lbs = 87.475 kg) que de café (66.340 Lbs = 30 091 kg) en
1829. En 1842 il ne restait que 678 Lbs (=307 kg) de café. On ne
mentionne plus de café pour la récolte de 1845. [180]
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Détail
d’une carte datant d’Octobre 1798 [212]
Source: www.Gahetna.nl |
On
rapporte la construction d’un moulin à sucre sur la plantation
Versailles dans un rapport sur les fournitures de bois de 1854. [8]
Comme si cela n’était pas important. Mais un moulin implique le
traitement de la canne à sucre directement sur la plantation, ce qui
en résulte la mélasse pour la production de rhum. La production de
rhum commença probablement au 19è siècle. Les deux plantations
voisines, Schoon Ord et Versailles représentaient la Guyane
Britannique à l’exposition universelle de Chicago en 1893 avec des
échantillons de rhum. [179] Schoon Ord, qui fusionna plus tard avec
Versailles, apparut bien plus tôt avec ses échantillons dans les
foires comme l’exposition universelle de Paris de 1867.
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Détail
d’une carte datant de 1798 [122]
Source: http://dpc.uba.uva.nl/ |
La
distillerie Versailles était toujours en activité en 1966 et
produisait 58,290 gallons de rhum (environ 198.000 Litres) [9] Les
chiffres de production de 1967 (3,406,000 gallons = 12.900.000 Litres
environ) semblent indiquer que la distillerie Versailles produisait
toujours du rhum, si on les compare avec le total de la production
des distilleries de 1966 (2,642,076 gallons = environ 10.000.000 de
Litres). Il ne s’agit pas d’une preuve car nous ne disposons pas
des chiffres de production des cinq autres distilleries. Mais aucune
mention de la distillerie n’est faite à partir de 1971. Cela
signifie que la distillerie Versailles a disparu entre 1967 et 1971.
D’après une interview d’Ingvar Thomsen la distillerie Versailles
ne fut fermée qu’en 1978. Cela signifie que la distillerie de rhum
fut fermée en même temps que l’usine cette même année. [464] Si
l’on regarde de plus près les chiffres de production on remarque
que Versailles était Presque toujours le plus petit producteur de
rhum. Disposaient-ils uniquement du Vat still simple en bois? On
dirait bien.
Von diesem alt ehrwürdigen Estate stammt die bereits erwähnte Single Wooden Pot Still. Nach dem Verschwinden der Versailles Distillery wurde sie zur Enmore Distillery transferiert. Sie war berühmt für ihre goldenen Rums zur langen Lagerung. [21] Hier gibt es keine Zweifel. Diese Still ist bei Diamond noch aktiv und stammt auch aus Versailles. Laut Diffordsguide wurde die Single Wooden Pot Still / Single Vat Still 2006 erneuert und teilweise mit neuen Holz ausgestattet. [173]
Von diesem alt ehrwürdigen Estate stammt die bereits erwähnte Single Wooden Pot Still. Nach dem Verschwinden der Versailles Distillery wurde sie zur Enmore Distillery transferiert. Sie war berühmt für ihre goldenen Rums zur langen Lagerung. [21] Hier gibt es keine Zweifel. Diese Still ist bei Diamond noch aktiv und stammt auch aus Versailles. Laut Diffordsguide wurde die Single Wooden Pot Still / Single Vat Still 2006 erneuert und teilweise mit neuen Holz ausgestattet. [173]
Création:
entre 1759 et 1776
Fondateur: Pierre L’Amirault
Emplacement: Le domaine Versailles était situé sur la rive Ouest du fleuve Demerara. Sur le site en face de la capitale Georgetown et au Sud de la ville de Vreed De Hoop (Peace and Hope / Paix et Espoir).
Statut: Distillerie et usine fermées en Novembre 1978.
Alambics: Pot still simple en bois (Vat still simple)
Fondateur: Pierre L’Amirault
Emplacement: Le domaine Versailles était situé sur la rive Ouest du fleuve Demerara. Sur le site en face de la capitale Georgetown et au Sud de la ville de Vreed De Hoop (Peace and Hope / Paix et Espoir).
Statut: Distillerie et usine fermées en Novembre 1978.
Alambics: Pot still simple en bois (Vat still simple)
Enmore (Demerara)
Histoire
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Détail
d’une carte datant de 1784 [207]
Source: www.gahetna.nl |
On
suppose que le domaine Enmore a été établi autour de 1840. C’est
ce que déclarent quelques sources. Nous découvrirons assez tôt que
ce n’est pas le cas. Thomas Porter (1748-1815) était un courtier
Anglais de Tobago qui tenta sa chance en Guyane Britannique avec
succès. Il acheta le lot 27 en 1782 sur la côte Est du Demerara
pour y cultiver du coton. Il commença avec seulement 20 esclaves. En
1798 Thomas Porter possédait les plantations Hoope (Hope), Paradise
et une troisième sans nom, seulement le numéro de lot 24. En 1800
il retourna en Angleterre où il construisit la "Mansion
Rockbeare House". Il laissa ses plantations à ses deux fils
Henry et Thomas II. [135] [136] [137]
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Détail
d’une carte datant de 1786 [127]
Source: http://dpc.uba.uva.nl/ |
La
source susmentionnée parlait du lot 27 mais je ne suis pas sûr de
la carte à laquelle il se réfère. Un certain Porther est cité
comme propriétaire du lot 44 sur la côte Est du Demerara en 1784.
Je pense qu’il s’agit de Thomas Porter. [207] Une autre carte de
1792 montre que Thomas Porter possédait déjà deux plantations
composées de trois lots. Le lot 24 sans nom et la plantation
Haslenton voisine appartiennent à la plantation Hope lot 25 et non
loin la plantation Paradise au lot 27. [208] [209]
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Détail
d’une carte datant de 1792 [209]
Source: www.Gahetna.nl |
Le
gouvernement Britannique donna à son fils Henry Porter (1791 – 15
Octobre 1858) la somme de £ 35.960 en compensation de ses 569
esclaves de la plantation Enmore durant l’émancipation. [138] La
plantation Paradise fut donnée à son frère Thomas II. Il toucha
£19.295 pour 385 esclaves de sa plantation en compensation. [139] La
plantation Enmore a dû hériter de son nom sous Henry Porter. Ses
plantations voisines Porters Hope et Haslenton l’identifient comme
la plantation sans nom que possédait Thomas Porter en 1792 (Lot 24).
Je suppose donc que la plantation Enmore était peut-être la
première plantation de Thomas Porter et fut plus tard cédée à son
fils Henry, qui lui donna finalement le fameux nom d’Enmore.
Rhums
de la colonne Coffey Enmore ELCR & EHP
|
Walter
Rodney écrivait dans son livre de 1979: « E.H.P. était utilisé
comme initiales de Enmore, en mémoire d’E. Henry Porter. » [26]
Ainsi, le fondateur présumé d’Enmore serait Edward Henry Porter.
Dans un autre livre de 1957 les marks suivantes sont associées à
Enmore avec leurs domaines. N.P., K.F.M., E.H.P., M.X.E. et K.F..
[27] Les initiales K.F.M. sont associées à la plantation Lusignan.
La plantation Mon Repos (M.X.E.) a fusionné avec la plantation
Lusignan en (K.F.M.) en 1930. [28]
La mark de Mon Repos MXE pourrait
signifier Mon Repos & Endragt. La plantation Mon Repos est
reprise par ce nom dans une liste de 1833. [16] On suppose que cette
plantation distillait du rhum et fournit quelques échantillons à
l’exposition universelle de Paris en 1867. [47] La mark E.H.P. se
rapporte à la colonne en bois. C’était l’alambic original
d’Enmore. A la fermeture de Versailles son vat still simple a été
déplacé à la distillerie Enmore. D’après Velier il y a une
autre mark liée directement à l’alambic Enmore. Cette mark
s’appelle E.L.C.R.. [170] Cette mark désigne alors un rhum plus
léger provenant de cette colonne alors que d’autre part le rum
portant la mark E.H.P. semble avoir plus de corps et de profondeur
d’arôme. La signification de E.L.C.R. n’est pas vraiment claire.
Quelques membres du forum Ministry of rum pensent que cela signifie
Enmore Light Coloured Rum. Pourquoi pas Enmore Light Coffey / Column
Rum? Malheureusement il n’y a aucune preuve appuyant cette théorie.
Rums
d’Enmore portant les marks REV & KFM
|
J’ai
trouvé quelque chose d’intéressant à propos de la mark K.F.M.:
« K.F.M. signifie K.F. McKenzie. Le rhum en question était fait à
partir de mélasse de muscovado et se distinguait du rhum de Lusignan
qui était un sous-produit de la pompe à vide 83. 84. De manière
générale, le rhum du Guyana ne jouissait pas de la bonne réputation
que pouvait avoir celui de la Jamaïque. » [29] Il semble donc que la
plantation Lusignan ait distillé un style de rhum portant la mark
K.F.M.. J’ai aussi trouvé une information intéressante à propos
de la distillerie elle-même. Kenneth Francis McKenzie (1749-1831),
né à Redcastle Ross-shire (Ecosse), acheta la dite plantation
Lusignan quelque part entre la fin des années 1780 et le début des
années 1790. La mark de la plantation Lusignan devint K.F.M. en son
honneur. [140] [141] La plantation Lusignan fusionna plus tard avec
Enmore et le rhum portant la mark K.F.M. était produit à la
distillerie Enmore (et embouteillé sous la marque Cadenhead par
exemple). Les plantations Enmore et Lusignan appartenaient toutes
deux à Enmore Sugar Estates Ltd en 1948. [32] Cela confirmerait la
fusion et la mention de la mark dans le livre de 1957.
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Détail
d’une carte datant d’Octobre 1798 [212]
Source:www.Gahetna.nl |
La
signification de la mark R.E.V. reste un mystère pour l’instant.
Pour le moment les marks A.W.M. (pot still), V.N.L. (colonne), X.P.D.
(pot still) and E.D.G. (?colonne?) ne nous révèlent pas non plus
leurs secrets. La mark N.P. pourrait venir de la plantation Non
Pareil (ou Nonpareil). Cette plantation était adjacente à la
plantation Enmore. [30] Les deux plantations fusionnèrent plus tard
et figuraient sur la même ligne dans les documents. [31] Non Pareil
elle-même fut transformée en village et abandonnée plus tard dans
les années 1940. [48] Cette plantation a été dotée d’une usine
sucrière. Les schémas de cette usine furent montrés à
l’exposition universelle de Calcutta en 1883-84. Ainsi cette
plantation pourrait avoir aussi distillé du rhum par le passé.
[181]
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Photo
de l’ancienne plantation Enmore (non datée)
Source: inguyana.blogspot.de |
La
plantation était toujours en la possession de la famille Porter (les
héritiers d’Henry Porter) en 1860 alors que Henry Porter décédait
en 1858. Ludovic Porter, un membre de la famille, est repris comme
manager de la plantation. [384] Une source de 1882 précise les
choses. D’après elle Aymler Henry Porter était propriétaire de
la plantation Enmore en 1882. [382] Il vécut jusqu’en 1902. Dans
le manuel de la Guyane Britannique de 1909 les « Trustees of
Henry Porter, desceased » (Les administrateurs du défunt Henry
Porter) sont repris comme propriétaires. Il s’agissait
probablement d’Henry Aymler Porter qui était décédé 7 ans plus
tôt. [378] Le prochain indice que j’ai trouvé nous mène à
l’année 1923. Ici la Booker McConnell Brothers & Company
Limited est nommée comme administrateur (agent) du domaine.
Toutefois ils n’en étaient pas les propriétaires. Je ne sais pas
qui était le propriétaire derrière Bookers en 1923. [392] Une
source de 1927 mentionne toujours Bookers comme agents d’Enmore.
[394] Enfin une source de 1934 donne Enmore Estates Limited comme
propriété de la société Curtis Campbell & Company.
Malheureusement je ne sais pas quand le changement de propriétaire
eut lieu. [113] Ce qui se passa après cela est par contre très
clair. Avec la fusion de of Curtis Campbell & Company et Booker
Bros., McConnell & Company, le domaine Enmore devint la propriété
du groupe Booker. La propriété elle-même resta en possession de la
société Enmore Estates Limited. [396] [13] GuySuCo fait toujours
appel aux services de la propriété Enmore aujourd’hui. Depuis
2011 l’usine sucrière d’Enmore prend en charge la canne à sucre
de la propriété La Bonne Intention. [381]
La
distillerie Enmore
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Détail
d’une carte datant de 1798 [122]
Source: http://dpc.uba.uva.nl/ |
La
plantation Enmore produisait principalement du coton jusqu’en 1813.
A partir de cette année-là la production de coton fut
progressivement convertie en sucre, alors que le prix du sucre
augmentait et que ceux du café et du coton s’effondraient. En 1829
on cultivait et récoltait à la fois du café (22.785 Lbs = 10.335
kg) et du coton (55,500 Lbs = 25.174 kg). Un an après, en 1830, la
majorité de la récolte était composée de sucre (60,000 Lbs =
27.215 kg). Le café (8,600 Lbs = 3.900 kg) et le coton (3,300 Lbs =
1.496 kg) n’étaient que très peu représentés. [180] Autour de
1832 la plantation Enmore était une plantation de sucre prospère
avec approximativement 728 esclaves. [11] D’après moi la
plantation Enmore n’a pas dû commencer la distillation de rhum
avant le 19è siècle.
Enmore
n’était représentée que par un seul échantillon de sucre à
l’exposition universelle de Londres en 1862 (Annexe A alinéa 15).
Ceci est rapporté par un certain L. Porter. [178] A l’exposition
universelle de Paris de 1867 Enmore n’apporta une nouvelle fois que
quelques variétés d’échantillons de sucre obtenus de pompes à
vide (Annexe A alinéas 26 & 28). [47]
![]() |
Détail
d’une carte datant de 1823 [185] [186]
Source: http://en.wikipedia.org |
Avec
la fusion de Messrs. Curtis Campbell & Co et Booker Bros.,
McConnell & Company Limited le domaine Enmore entra en possession
du groupe Booker le 20 Octobre 1939. Donc les plantations Enmore et
Versailles appartenaient toutes deux au groupe Booker. [115] La
distillerie Versailles fut fermée après l’indépendance du Guyana
en 1966. Donc le Pot still simple en bois fut d’abord transféré à
Enmore. La distillerie Enmore fut plus tard transférée vers
Demerara Distilleries Limited, qui était une filiale de Guyana
Distilleries Limited. Nous retrouverons ce nom quand nous nous
intéresserons à la distillerie Uitvlugt. [160] Après
l’indépendance du Guyana le gouvernement nouvellement formé prit
le contrôle des actifs du groupe Booker. Enfin Booker vendirent
leurs entreprises en 1966.
Finalement
Guyana Distilleries Limited (Uitvlugt) et sa filiale Demerara
Distilleries Limited (Enmore) fusionna avec Diamond Liquors Limited
(Diamond) et devint la société Demerara Distillers Limited (DDL),
qui existe toujours aujourd’hui. [161] D’après
Sascha la distillerie a fermé en 1993. Mais si les informations de
certains embouteilleurs indépendants sont correctes, la dernière
distillation à Enmore a eu lieu en 1995. Les alambics et le materiel
ont été transférés d’Enmore à la distillerie Uitvlugt. D’après
l’interview d’Ingvar Thomsen la distillerie Enmore a fermé en
1994. Cette information a été donnée relativement peu après les
faits (2005) et provident de Yesu Persaud, donc je pense que l’on
peut considerer sans risque qu’il s’agit de la bonne date de
fermeture. [464] Le domaine sucrier d’Enmore est toujours en
activité et une unité d’emballage y a même été construite. La
dernière colonne Coffey en bois à DDL vient de l’ancienne
distillerie d’Enmore. Elle est composée en majeure partie de bois
et a été on suppose construite aux alentours de 1880.
Rhums
portant la mark MEA
|
Création:
Entre 1784 et 1792 (1798-1823)
Fondateur:
Thomas Porter (Lot) / Henry Porter (Nom)
Emplacement:
Le domaine était situé sur la côte Est du Demerara. Donc entre le
fleuve et la rivière Demerara Mahaica.
Statut: Distillerie
fermée en Avril
1994 ; Usine sucrière toujours active
Alambics: Coffey en bois / Colonne continue
Alambics: Coffey en bois / Colonne continue
Port Mourant (Berbice)
Histoire
Marks
de Port Mourant MP, MPM, UPM
|
En 1824 Stephen Mourant mourut comme on peut le voir dans un numéro de la London Gazette datant du 4 Janvier 1825. [365] Le propriétaire suivant des plantations était sûrement Donald Ross. Durant l’émancipation en 1835 Donald Ross reçut du gouvernement Britannique une compensation de £ 12.083 pour ses 147 esclaves. Donald Ross mourut en 1839 et cette année-là toutes les sociétés et les personnes en affaires avec la plantation Port Mourant ont été appelées afin de faire valoir leurs droits. Donald Ross avait trois frères: George, Hector et John Ross, qui étaient tous planteurs en Guyane Britannique. [144] [365] Le 26 Mars 1842, la plantation fut vendue à un certain M. Rader G pour 32.000 $. On cultivait toujours la canne à sucre sur la plantation. [12] La nom commercial du rhum Port Mourant était P.M.. donc les initiales de la plantation étaient utilisées pour l’identification des futs remplis de rhum, mélasse ou sucre provenant de Port Mourant. [33] Une sortie d’un embouteillage étiqueté Velier du millésime 1997 comporte la mark U.P.M.. U. signifie apparemment Uitvlugt (Uitvlugt Port Mourant). Cela semble logique, car l’alambic Port Mourant produisait du rhum depuis Utivlugt en 1997. Merci à Cyril de durhum.com! Merci pour l’info;) Donc P.M. est sans doute le style de rhum provenant de l’ancienne distillerie Port Mourant. La mark M.P.M. est une version un peu plus légère du style P.M. et a été embouteillée WMCadenhead et Velier. La signification de la mark G.M. reste floue. Cadenhead a embouteillé quelques rhums des millésimes 1974 et 1975 avec cette mark. Ce que je peux dire est que ces rhums laissent une impression de légereté en bouche et en finale. Peut-être une version légère de P.M.? Qui sait.
Le 24 Juillet 1851, on mentionne la société John Kingston & Company aux côtés de la plantation Port Mourant alors que celle-ci était une nouvelle fois mis en vente par mise sous séquestre. D’après une autre source, John Kingston, le propriétaire de la société, acheta Port Mourant en 1852 et la conserva jusqu’à la fin du 20è siècle. [367] [368] Que se passa t’il après ? J’ai trouvé quelque chose d’intéressant. En 1906, la société George Fletcher and Company fut mandatée par Booker Bros., McConnell & Company pour fournir un nouveau moulin à sucre à Port Mourant. C’est précisément cette société qui a été achetée par Bookers en 1956. Ils connaissaient donc déja la société depuis longtemps au moment de l’achat. Bookers a dû acheter la plantation Port Mourant entre 1900 et 1906 et la transférer à une autre filiale. Cette filiale est mentionnée dans le Manuel de la Guyane Britannique de 1909. Il s’agissait de la "Plantation Port Mourant Limited." [378] [397] Bookers tenait particulièrment à ce domaine jusqu’à la vente forcée lors de la nationalisation. Jusqu’à ce qu’en 1960 la plantation soit transférée à la Booker Sugar Estates Limited. [13] Des indices montrent que le domaine sucrier de Port Mourant fut combiné au domaine sucrier Albion, ce qui semble plus que possible et logique du fait que les deux plantations soient voisines.
La
distillerie Port Mourant
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Détail
d’une carte datant de 1780 (1771) [187]
Source: http://en.wikipedia.org/ |
Revenons
donc à la date de fondation de Port Mourant. D’après certains
auteurs et DDL même, la distillerie Port Mourant existe depuis la
fondation de la plantation en 1732. Je ne sais pas de quelle source
vient cette affirmation. Toutefois, cela laisse supposer que la
plantation cultivait le sucre dès le départ. Pourquoi? Car le rhum
n’était qu’un sous-produit de l’industrie du sucre à cette
époque. J’ai trouvé quelque chose de très intéressant lors de
mes recherches pour cet article. Sur une carte de 1802 toutes les
plantations de la côte maritime Est de Berbice étaient des
plantations de coton. Il n’y avait par conséquent aucune
plantation de canne à sucre sur la côte de Berbice en 1802. Ainsi
l’utilisation de mélasse d’une plantation voisine est également
impossible. Donc la tradition de la distillation de rhum sur la
plantation Port Mourant ne peut avoir commencé qu’au 19è siècle.
[171] De plus j’aimerais citer une autre source de 1841:
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Détail
d’une carte de 1802 [219] [220]
Source: www.Gahetna.nl & www.Gahetna.nl |
« Avant
que Berbice ne se rende aux Britanniques en 1796, presque toutes les
plantations étaient à distance de la côte, bien plus en hauteur
des rives du Berbice et de la Canje ; mais très peu de temps
après que la colonie entre en notre possession, les plantations
furent largement étendues. On cultiva d’abord la côte Ouest ;
puis en 1799, la rive Ouest du fleuve Berbice, jusqu’à la rivière
Devil’s fut nettoyée et cultivée. Cette partie fut sondée et
découpée en deux lignes parallèles de domaines, avec un canal
navigable entre les deux afin de mettre en place un transport sur
l’eau. Le fleuve Canje coule derrière le deuxième rang de
domaines, et on cultive du sucre, du café et des bananes sur ses
deux rives. On différencie les domaines comme ceci : ceux qui
sont face à la mer sont appelés domaines côtiers, la seconde ligne
est composée des domaines de canaux ; et le restant sont
appelés domaines Canje. » [182]
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Détail
d’une carte datant d’Octobre 1798 [212]
Source: www.Gahetna.nl |
Il
n’y avait donc aucune plantation du nom de Port Mourant sur la côte
Est du Berbice avant 1791, 1796 ou même 1798, et ce peu importe la
source. La carte de 1780 (peut-être 1771) ne montre que les
plantations de la rivière Canje. Une autre note indique que toutes
les plantations de la côte ne cultivaient exclusivement que du
coton : « Le coton prospère plus sur les domaines
côtiers, c’est pour cela qu’il y est principalement cultivé. »
[183] Cela coïncide également avec la carte de 1802. On ne trouve
pas non plus le nom de Mourant sur cette carte. [219] [220] Ce numéro
de la London Gazette nous donne plus d’indices :
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Cela
écarte tout doute possible et clarifie les choses. Il y avait une
plantation de coton appelée Port Mourant sur la côte Est du Berbice
en 1813. Il n’y avait pas à cette époque de cultivation de sucre.
Mais il est indéniable que la cultivation a changé et que le coton
a été abandonné au profit de la canne à sucre. Pieter Marinus
Netscher écrivit même que la plantation de coton ne dura pas
longtemps et que le café et le sucre la remplacèrent petit à
petit. Mais il ne mentionna aucune date ni laps de temps pour ce
changement. Un rapport de 1847 nous donne les chiffres de production
de la plantation Port Mourant. Du sucre était cultivé entre le 1er
Janvier 1836 et le 31 Décembre 1846. [172] Donc le changement a dû
se faire entre 1813 et 1836. Selon moi la distillerie Port Mourant a
dû être établie durant cette période. Et il se trouve que j’ai
trouvé quelque chose de très intéressant. Je cite le numéro 17764
de la London Gazette, daté du 13 Novembre 1821 :
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Numéro
17764 de la London Gazette, 13 Novembre 1821
Source: www.thegazette.co.uk |
« Exécution
de la vente – Première déclaration
Je
soussigné, en vertu de l’autorité reçue de l’honorable Henry
Beard, Esq. Président de l’honorable cour criminelle et civile de
cette colonie, datée du 19 Janvier et 20 Mars 1821, nommé sur la
requête de H. Stall, qui représente les héritiers du défunt Late
William Ord, le plaignant, contre Stephen Mourant, le défendant, ai
mis en exécution la mise sous séquestre le domaine sucrier appelé
Port Mourant, situé sur la côte du Corentyne, au sein de cette
colonie, avec toutes ses cultivations, esclaves, constructions et
toutes ses autres possessions ; sachant que je soussigné, ou
bien le Marshal, entends mettre à exécution la vente après
expiration d’un an et six semaines, à partir du deuxième jour
d’Avril 1821, du domaine susmentionné appelé Port Mourant, avec
toutes ses cultivations, esclaves, constructions et toutes ses autres
possessions inventoriées au bureau du Marshal, sous contrôle des
concernés, afin de recouvrir, selon les modalités de vente dudit
domaine (si possible) la somme d’argent pour laquelle la vente a
été mise en exécution et mise sous séquestre : tout cela
conformément aux règlements de l’honorable cour de justice civile
de cette colonie, datées du 20 Décembre 1820, afin de respecter
l’exécution prévue de la vente du domaine.
La
première déclaration est publiée, par battement de tambour, par le
tribunal de cette colonie, et sera exécutée en respect de la
loi.—Berbice, le 15 Avril 1821. » [364]
Rhums
du Demerara du Guyana
|
La
cultivation changea ainsi du coton au sucre entre 1813 et 1821. Ce
fut sans doute durant cette période que la distillerie Port Mourant
a été fondée, convertissant la mélasse résultant de la
production de sucre, en rhum. La plantation elle-même fut fondée
entre 1802 et 1813.
Voici
maintenant une possibilité intéressante, ou plutôt une théorie
que je ne peux malheureusement pas vérifier. Et si l’affirmation
de DDL était basée sur une inscription sur une partie du cuivre des
Vat stills sur laquelle on peut lire 1732 ? Qu’est-ce que cela
voudrait dire ? D’après mes recherches il serait raisonnable
de penser que Stephen Mourant a acquis l’un ou les deux alambics
d’une autre plantation. Cette plantation pourrait être l’une de
celles des terres supérieures du fleuve Berbice qui furent
ultérieurement abandonnées en faveur de la région côtière ou une
plantation résidant sur la colonie Néerlandaises voisine du
Suriname. On y distillait également du rhum. Les alambics Port
Mourant pourraient donc faire partie du matériel d’une ancienne
plantation abandonnée, qui aurait acquis ce matériel ou les parties
en cuivre en 1732. Cette même année les relations commerciales avec
Berbice étaient particulièrement facilitées. Ou peut-être en
Angleterre. Le bois Greenhart venait alors du Guyana même, les
alambics ont pû être faits sur commande en Angleterre, comme la
colonne Coffey d’Enmore qui pourrait avoir été fabriquée en
Angleterre avec du bois exporté de la colonie. Mais cela est très
théorique et reste une supposition comme DDL parle officiellement de
l’année 1732. La distillerie elle-même n’a pas été établie
cette année-là. La possibilité que les parties en cuivre de l’un
ou des deux alambics puissent dater de 1732 subsiste. Mais les pièces
ou les alambics ont été achetés ailleurs, sûrement pendant la
transition du coton à la canne à sucre entre 1813 et 1821.
Toutefois, comme le bois est remplacé à intervalles réguliers, ces
pièces métalliques sont les seules qui puissent être aussi
vieilles.
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© E.H. |
Alors
quand la distillerie Port Mourant a-t-elle été fermée pour de
bon ? A ce sujet, personne ne semble vraiment avoir de réponse,
ou ne souhaite la rendre publique. Regardons à nouveau les chiffres
de production émanant des rapports des contrôleurs. La distillerie
produisait 215,884 gallons (environ 981 428 litres) de rhum en
1954. [3] Mais la distillerie avait déjà fermé en 1958. Il n’y a
aucun chiffre de production pour les années 1958-1960. [4] Donc la
distillerie Port Mourant a apparemment été désaffectée entre 1954
et 1958. Et en effet, si l’on regarde à nouveau les chiffres de
production on trouve la dernière année d’activité de la
distillerie Port Mourant. Il s’agit de l’année 1955. [42]
D’autres sources désignent cette année comme celle de la
fermeture de l’usine Port Mourant. [43] [44]
Ainsi
le destin de la distillerie Port Mourant est finalement établi. Elle
fut probablement victime de la nationalisation sous le groupe Booker,
quelques années avant que Uitvlugt devienne la principale
distillerie sous Bookers. Cependant, le Vat still double alla d’abord
à Albion et pas à Uitvlugt. Il y demeura jusqu’à la fermeture de
la distillerie Albion en 1967-1969. Après la fermeture définitive
d’Albion le Vat still double alla à l’usine principale du groupe
Booker. J’ai amplement écrit sur ce sujet dans le texte sur le
domaine Albion et je vous suggère de vous référer à cette partie.
Donc tous les rhums à partir de 1955 ne doivent pas provenir de cet
ancien domaine. Il ne fait aucun doute quant à l’identification de
l’alambic. L’alambic Port Mourant fait partie des prémices de
DDL et est toujours utilisé dans la création des rums, notamment
pour les célèbres assemblages d’El dorado.
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© E.H. |
Création:
Plantation entre 1802 et 1813 ; Distillerie entre 1813 et 1821.
Fondateur:
Stephen Mourant
Emplacement:
Le domaine se trouvait à l’Est du village de Rose Hall
(aujourd’hui une ville d’environ 8000 habitants) sur la côte Est
du fleuve Berbice. Plus précisément sur la côte Est du Corentyne.
Statut:
Distillerie et usine fermées en 1955.
Alambics:
Pot still double en bois (Vat still double)
Uitvlugt (Demerara)
Il
existe deux cartes de 1759. L’une d’elles ne fait pas référence
aux plantations de la côte Ouest de la Guyane Britannique. Sur
l’autre, qui est en gros une copie de la première, figurent des
notes manuscrites mais pas d’information sur l’année où elles
ont été ajoutées. Ici, un certain Johan Frederik Boode est
mentionné comme propriétaire de la plantation Groote en Klyne
Uitvlugt. La plantation Cornelia Ida était la propriété de
l’honorable v. Rynevelt & Zoonen. Ainsi, cette note a dû être
ajoutée entre 1759 et 1786. Pourquoi suis-je sûr de ce laps de
temps ? Car sur une autre carte de 1786 un certain J. Boode est
mentionné comme propriétaire de la plantation Cornelia Ida. [132]
[145]
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Détail
d’une carte datant de 1784 [207]
Source: http://www.gahetna.nl |
Une
carte de 1783 montre sur la côte Est une plantation dont le
propriétaire s’appelle Boode. [210] Les choses se précisent
lorsque l’on compare les nom des plantations voisines avec les
cartes de 1784 et 1798. [122] [207] Cela signifie que la plantation
De Uitvlugt (1798] de J.F. Boode lui appartenait déjà en 1783 (Lot
21 sur la carte de 1784). Les noms des propriétaires des plantations
voisines ne changèrent que peu jusqu’en 1798 ce qui confirme cette
hypothèse. Cela se précise encore lorsque l’on regarde une carte
de 1776. Là la plantation De Uitvlugt est mentionnée au côté du
nom Boode. [221] Donc Utivlugt a dû être fondée entre 1759 et
1776.
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Détail
d’une carte datant de 1786 [127]
Source: http://dpc.uba.uva.nl/ |
Johan
Berend Christoffer Boode Frederick est né le 17 Février 1733 à
Blankenburg (Brunswick) et mort le 28 Décembre 1796 au Demerara. Il
possédait cinq plantations au Demerara et Essequibo, dont les
plantations Uitvlugt et Cornelius Ida. Cette dernière fut plus tard
héritée par sa petite-fille Anna Catherina Duker. Une de mes
sources, Jean-Paul Arnoul, affirme que Johan Berend Christoffer
Frederick Boode était déjà présent en 1749. [146] [147] [127]
Andreas
Christian Boode (parfois appellé Andries ou Andrew Christian
Christian Boode Boode) (1765-1844) était un propriétaire de
plantation Néerlandais. Il était le fils de Johan Berend
Christoffer Frederick Boode. J.F. Boode enregistra 306 esclaves pour
A.C. Broode (son fils) sur la plantation Groote en Klijn Uitvlugt en
1832. Le gouvernement Britannique lui accorda £ 14,236 en
compensation des esclaves libérés lors de l’émancipation.
D’après une liste des colons de Guyane Brittanique, il mourut en
1844. J’ai trouvé une date plus précise sur un site internet, le
31 Octobre 1844. [147] [148] [149]
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Détail
d’une carte de 1792 [209]
Source: www.Gahetna.nl |
La
plantation Groote en Klijn Uitvlugt, qui est mentionnée en 1833, a
pour voisines les plantations Zeeburg et Vrees an hoop. La plantation
De Uitvlugt a pour voisins Zeebergen et Vrees en Hoop sur une carte
de 1798. Je pense que l’on peut dire que la plantation Groote en
Klijn Uitvlugt était l’ancienne plantation De Uitvlugt. Les avis
divergent quant à la date de naissance de John Christian Boode. Une
source affirme qu’il avait 18 ans en 1824 et une autre (une liste
colons de Guyane Brittanique) donne 1816 comme son année de
naissance. Néanmoins la date sa mort est la même selon les deux
sources. Il s’agit du 1er Février 1870. [147] [150]
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Détail
d’une carte datant d’Octobre 1798 [212]
Source: www.Gahetna.nl |
DDL
indique que le domaine sucrier d’Uitvlugt fut fondé au 18è
siècle. On pourrait traduire son nom par « s’écouler »
(flowing out). [25] La plantation Uitvlugt est mentionnée en 1841.
[36] Un livre met les marks suivantes en rapport avec le domaine
Uitvlugt : : ICB/U, ICB/C, DK et ICB. [37] On ne sait pas à
quelles anciennes plantations elles correspondaient. La mark ICB/U
est directement liée à Uitvlugt selon plusieurs auteurs et selon
DDL même.
Une
explication théorique possible de cette mark serait le nom du
fondateur (Johan Christoffer Boode / Uitvlugt). Toutefois, Johan
prend un « J » et non un « i ». Peut-être
qu’avec le temps le « J » a été changé en « i »
ou alors la raison m’échappe. Ceci est purement théorique et je
n’ai aucune preuve. Néanmoins cette supposition est au moins une
approche intéressante. D’après un rapport de K&L wine
merchants la mark correspond à Isaac Christiany Boody/Uitvlugt.
[418] Cela ressemble à une version déformée de Johan Christoffer
Boode. La mark D.K. était utilisée pour l’identification de la
plantation De Kinderen, qui était située à l’Ouest de la
plantation Uitvlugt. La mark SP ICBU se trouve sur l’ Uitvlugt 1988
Full Proof Old Demerara 17 YO de Velier. On ne connait pas la
signification de SP. [418] Deux nouveaux rhums de Velier portent les
marks ULR et MGS. ULR signifie Uitvlugt Light Rum. La signification
de Modified GS reste à déterminer. Mais les deux rhums doivent
venir de la colonne Française Savalle. Peut-être que le S
correspond à Savalle, mais ce n’est pas sûr.
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L’usine
sucrière d’Uitvlugt
et la « mark » sur la cheminée
Source: guysuco.com |
Andreas Christian Boode (1765 - 1844) avait un fils et une fille. Cette fille, Phoebe Boode, épousa un certain Isaac William Webb Horlock en 1826. [408] Après la mort d’Andreas Christian Boode la plantation fut cédée à son fils John Christian Boode. D’après K&L wines la mark d’Uitvlugt vient de "Isaac Christiany Boody / Uitvlugt". Cet Isaac William Webb Horlock a-t-il quelque chose à voir avec l’Isaac de la mark d’Uitvlugt ? Peut-être y avait-il un partenariat entre les deux hommes qui conduisit à cette abréviation. Malheureusement je ne peux confirmer ni infirmer cette idée. En 1860 la plantation Uitvlugt est en possession d’un certain J.C. Boode. [384] Il s’agit de John Christian Boode (1870-1870), l’unique fils d’Andreas Christian Boode. John Christian Boode épousa Clementina Elizabeth Mary Bayntun, la fille de l’Amiral Sir Henry Bayntun William le 6 Juin 1834. Il eut deux filles et mourut le 1er Février 1870. [406] [407] [408] Il semble que la plantation a ensuite été vendue car A.C. McCalman(?), les héritiers de Josiah Booker et John McConnell étaient propriétaires de la plantation Uitvlugt en 1882. [382] En 1885 McConnell restait le seul propriétaire de la plantation, comme le dernier de la famille Booker, John H. Booker, avait vendu ses parts à John McConnell en 1885. [369] Le manuel de Guyane Britannique de 1909 mentionne « Les administrateurs du défunt John McConnell » comme propriétaires de la plantation Uitvlugt. [378] Il s’agissait de ses deux fils et de la société McConnell & Company Limited qui avait fusionné en 1900. A partir de 1934 elle était dans la liste des filiales de la Booker Demerara Sugar Estates Limited. Ce statut subsista jusqu’à la nationalisation en 1976.
La distillerie Uitvlugt
On
plantait toujours du café sur la plantation De Uitvlugt selon une
carte de1798. [122] [124] La plantation Groote en Klinj Uitvlugt
récoltait du café et de la canne à sucre selon un rapport sur la
population d’esclaves de 1833. [7] Alors qu’au 1er
Janvier 1838 seule la canne à sucre restait en culture sur la
plantation que l’on appelait désormais Uitvlugt. [172] Donc le
changement de cultivation survint entre 1798 et 1833. Et en effet :
on trouve plus de chiffres de production dans un autre livre de 1851.
Pour l’année 1829 on ne compte presque que du sucre (874.350 Lbs =
près de 400 tonnes) et une quantité très faible de café (5,000
Lbs = environ 2.268 kg). Le café avait complètement disparu lors de
la récolte de 1832. [181] Il est très peu probable que la
distillerie Uitvlugt ait été installée avant 1798.
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Détail
d’une carte datée de 1798 [122]
Source: http://dpc.uba.uva.nl/ |
Le
fait que les deux colonnes Savalle Françaises originales, désormais
assemblées en une quadruple colonne à DDL, proviennent réellement
du 18è siècle n’est pas tellement plausible d’après moi.
Pourquoi ? Armand Savalle et son fils Désiré Savalle ont
inventé la colonne Savalle au 19è siècle. Il existe un brevet
américain sur la colonne Savalle datant de 1868. Comment un alambic
du 19è siècle peut-il être daté du 18è siècle ? [174]
[175] Malheureusement l’ancienneté des domaines ne peut pas
directement être mise en relation avec l’historique de la
distillerie ou de la distillation de rhum sur cette plantation. Le
domaine est plus vieux que la distillerie elle-même. Les dates de
fondation des domaines sont souvent utilisées à des fins de
marketing. C’est un peu du maquillage en fait. On suggère
indirectement une tradition de distillation de rhum qui n’a jamais
existé. Ou au moins qui ne remonte pas à si longtemps que ça,
comme c’est le cas pour la distillerie Port Mourant, dont je
parlais dans le texte à propos de la plantation Port Mourant.
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© E.H. |
La
distillerie fut rénovée par Bookers en 1960 et transférée à la
filiale Guyana distilleries. Depuis cette année-là elle récupéra
le rendement de quatre distilleries détruites. Lesquelles étaient
victimes du processus de rationalisation de Bookers. Port Mourant
avait déjà été désaffectée en 1955 et ne faisait donc pas
partie des quatre distilleries fermées en 1960. Les distilleries en
question étaient : La Bonne Intention (1960), Skeldon (1960),
Blairmont (1962) et Albion (1968). Apparemment tous les alambics de
ces distilleries furent soit adoptés, soit n’étaient plus
indispensables si un alambic similaire était déjà présent à
Uitvlugt. Les quatre distilleries mentionnées appartenaient au
groupe Booker. Guyana Distilleries resta en possession du groupe
Booker jusqu’à la vente (forcée) des toutes ses possessions au
gouvernement Guyanais en 1976. [159]
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Johann Barend Christoffer Fredric Boode
Peint
par Anton Graff
Source: search.ancestry.com |
La
distillerie fut reconstruite et réouverte à nouveau à Uitvlugt le
27 Aout 1975. Le ministre du développement économique Desmond Hoyte
y donna un discours. [40] En 1983 la Guyana Distilleries Limited
(Uitvlugt) fusionna finalement avec la Diamond Liquors Limited
(Diamond), DDL pour faire court. [161]
La
dernière année active de la distillerie Uitvlugt fut 1999. Bristol
Spirits Limited, A.D. Rattray et Plantation Rum ont sorti des
embouteillages de ce millésime. Toutefois, la Selon l'interview par
Ingvar Thomsen Uitvlugt la distillerie a été prise près en
Décembre 1999. Donc, ce fut effectivement la dernière année de
cette distillerie. [464] Le
matériel et les alambics opérationnels allèrent à la distillerie
Diamond, où ils demeurent toujours aujourd’hui. Dave Broom a pu
bien voir ces alambics lors de son voyage pour son livre Rum au
tournant du millénaire. On peut aussi les voir sur le site officiel
de DDL. Le domaine sucrier Uitvulgt est toujours en exploitation.
Seules
les colonnes Savalle Françaises de la distillerie Uitvlugt furent
préservées. Une sorte de colonne continue qui produit un distillat
légér. La question du fait qu’elles viennent réellement toutes
deux de la distillerie Uitvlugt ou que l’une d’elles vienne de
l’ancienne distillerie Blairmont est apparemment tranchée par la
voie officielle. L’information donnée est qu’elles viennent
toutes deux d’Uitvlugt. La véracité de cela est difficile à
déterminer. Mais je pense qu’il serait possible que l’une des
deux colonnes Savalle vienne de la distillerie Blairmont. Cela ne
contredit pas la position officielle qui veut que les deux alambics
viennent d’Uitvlugt. Cela aurait eu lieu dès 1962 et près de 38
années se seraient écoulées jusqu’à la fermeture d’Uitvlugt
en 2000. Un temps considérable qui amène la possibilité qu’on
ait oublié ou perdu des informations lors des changements de
propriétaires ces 38 dernières années. Mais il s’agit bien sûr
d’une théorie non vérifiée.
Création:
Entre 1759 et 1776
Fondateur:
Johan Berend Christoffer Frederick Boode
Emplacement:
Sur la côte Ouest du Demerara. Le village du même nom compte
environ 2000 habitants.
Statut:
Fermée en
en Décembre 1999.
Alambics:
Colonnes Savalle Françaises. Chaque alambic comporte deux colonnes.
Elles forment à elles deux une quadruple colonne.
Diamond (Demerara)
D’après
Diffordsguide la distillerie Diamond a été fondée autour de 1670.
Je n’ai trouvé aucune preuve correspondant à cette période.
Peut-être cette information est-elle une nouvelle fois fournie par
DDL. Cette année-là, cependant, n’est pas directement associée à
Diamond sur leur site. La date vérifiée la plus ancienne que j’ai
pu trouver est l’année 1753. A cette époque la plantation Diamond
était la propriété d’un certain John Carter. [151] 1752 et 1670
ce n’est pas vraiment pareil. Toutefois, j’ai trouvé une
information qui montre que 1670 n’est vraisemblablement pas l’année
de fondation de la distillerie Diamond.
![]() |
Détail
d’une carte datant de 1783 [211]
Source: http://www.gahetna.nl |
Cette
information mentionne le nom de Laurens Storm van’s Gravensande.
Laurens Storm van's Gravensande était le commandeur Néerlandais de
la colonie d’Essequibo de 1742 à 1772 et était au début de sa
carrière le secrétaire du commandeur Herman Gelskerke. Il est
arrivé à Essequibo en 1738. Après la mort de Gelskerke en 1742
Gravensande fut promu à la tête de la colonie d’Essequibo. [138]
[199] En fait, ce Storm van's Gravensande est le fondateur de la
colonie Demerara, située entre les fleuves Berbice et Essequibo, en
1746. La création de la colonie Demerara est possiblement due à des
difficultés économiques à Essequibo et à son talent
d’administrateur. [200] J’aimerais citer une de mes sources :
![]() |
Détail
de carte de 1784 [207]
Source: http://www.gahetna.nl |
La
première allocation de terrain par by Storm van's Gravensande sur la
colonie du Demerara, et donc l’établissement de la première
plantation, est datée du 3 Avril 1746. On a alloué aucune
plantation avant cette date. Cela démontre qu’un établissement de
la distillerie Diamond avant 1746 est fort peu réaliste. Une autre
source confirme cette allégation :
![]() |
Détail
d’une carte de 1786 [127]
Source: http://dpc.uba.uva.nl/ |
A
mon humble opinion il n’y a qu’une conclusion possible : La
plantation Diamond a été fondée entre 1746 et 1752 au moment de la
mention de John Carter en tant que propriétaire. Il pourrait être
en réalité le fondateur de la plantation Diamond. Le nom de John
Carter apparait aussi sur une ancienne carte de la colonie
d’Essequibo et Demerara en 1759 en tant que propriétaire de la
plantation appelée Diamond. On retrouve aussi son nom en 1753. Les
propriétés étaient situées sur la rive Est du fleuve Demerara.
D’après la carte il s’agissait d’une plantation de sucre.
![]() |
Détail
de carte datant de 1792 [209]
Source: www.Gahetna.nl |
Sur
une autre carte de 1798, le nom de Diamond disparait et les noms de
Klein Diamant (J. van Ryneveld & Zoon) et Groot Diamant
(Gehrecke) le remplacent. Apparement, soit la plantation Diamond a
été divisée en deux plantations, soit la plantation Groote Diamond
était en fait l’ancienne plantation Diamond de 1759. La plantation
voisine du Sud appelée Golden Grove est presque au même emplacement
sur les deux cartes, ce qui étaye cette supposition. [132] [122]
[123] [151]
Une
carte détaillée de 1783 montre les deux plantations Little Diamond
et Great diamond. Il semble donc que les deux plantations sont
apparues plus tôt que 1798. [211] Une comparaison avec d’autres
cartes renforce cette supposition.
![]() |
Détail
de carte daté d’Octobre 1798 [212]
Source: www.Gahetna.nl |
Pendant
ce temps en 1762 un certain Samuel Welsh était devenu propriétaire
de la plantation Diamond. [152] Les propriétaires ont donc changé
au cours des années. Le 4 Octobre 1848 la plantation Great Diamond a
été achetée par M. Steele & G.H. Loxdale pour 9050 $ Guyanais.
Au moment de la vente la plantation récoltait du sucre. En 1856 la
plantation Little Diamond a aussi été achetée par M.Steele &
G.H. Loxdale. [154] Je n’ai trouvé aucun élément à propos de
Little Diamond après ce rachat. On retrouve par contre la plantation
Great Diamond. Elle est listée dans un numéro de la London Gazette
du 10 Novembre 1876 parmi les gagnants récompensés à l’exposition
universelle de Philadelphie. [155] La société Loxdale Steele &
Company a ainsi acheté la plantation Great Diamond en 1848 et Little
Diamond en 1856. [398] Ladite société, toutefois, cessa d’exister
le 31 Décembre 1860. [399] Que s’est-il alors passé ?
Sandbach,
Tinne & Company à Liverpool (McInroy Sandbach & Co au
Demerara, le nom fut changé en Sandbach Parker & Co. en 1861) a
acheté les deux plantations (en 1856 ils possédaient déja des
parts du domaine Little Diamond). Little Diamond disparut des
registres de domaines sucriers. Le nom de l’autre plantation fut
plus tard changé en « Diamond ». Mais en 1910 elle est
parfois encore appelée « Great Diamond ». [156] [157] En
1891, la toute nouvelle “Demerara Company Limited” a repris la
plantation Diamond ainsi que la plantation Wales de la Sandbach,
Parker & Company Limited. [400]
La
distillerie Diamond a été transférée à une autre société en
1967. Il s’agissait de Diamond Liquors Limited. Ainsi la
distillerie a été séparée du secteur du sucre à proprement
parler, mais restait sous le toit de la Demerara Holding Company.
[401] [158] La propriété demeura sous le contrôle de la Demerara
Company Holding jusqu’en 1969. Cette année-là les trois filiales
"Demerara Company", "Sandbach Parker" et "Diamond
Liquors" ont été vendues à "Jessel securities".
Enfin, la propriété a été nationalisée le 26 Mai 1976. [402]
[403] En 2010 GuySuCo annonçait la fermeture du domaine Diamond.
[54] Ces mots furent suivis par des actes puisque le domaine ferma
vraiment ses portes vers 2012/2013. [55]
La distillerie Diamond
![]() |
Détail
d’une carte de 1798 [122]
Source: http://dpc.uba.uva.nl/ |
Sur
la carte de 1798 on plantait du café sur les deux plantations Klein
Diamant et Groot Diamant. Mais on cultivait la canne à sucre sur
l’ancienne plantation Diamond de John Carter aux environs de 1759.
Il semble qu’il y ait eu un changement de cultivation entre ces
deux années. Après 1798 la cultivation changea à nouveau et en
1833 les deux plantations récoltaient aussi bien du café que de la
canne à sucre. Il n’y a aucune preuve que la plantation Diamond de
John Carter pressait la canne à sucre et récoltait de la mélasse
pour la distillation du rhum. La plantation ne possédait pas de
moulin d’après la carte de 1759. Il est théoriquement possible
qu’elle utilisait le moulin à sucre de la plantation voisine De
Vrinshap (The friendship = L’amitié). Mais je n’ai aucune preuve
qui confirme cette théorie. Donc la fondation de la distillerie
Diamond (Groote Diamant, Great Diamond) n’a pas donc pas eu lieu
avant le début du 19è siècle. [132] [122] [123] Il est prouvé que
les deux plantations plantaient exclusivement de la canne à sucre en
1838. Apparemment le café n’était plus suffisament rentable et a
été abandonné au profit de la canne à sucre. [172] Une autre
source de 1851 confirme cela. [180]
![]() |
Détail
d’une carte de 1823 [185] [186]
Source: http://en.wikipedia.org |
Les
héritiers de Steele & Loxdale ont présenté deux échantillons
de sucre et 7 rhums différents ambrés et blancs à l’exposition
universelle de Paris en 1867 (Annexe A, alinéas 88 et 94). D’après
le catalogue, deux des rhums étaient des 9 ans d’âge (points 89 &
94). On peut donc dire qu’il s’agit de la preuve d’une
distillation de rhum sur la plantation Great Diamond durant les
années 1857 ou 1858. Une autre source de 1851 parle d’une
production de quelques gallons rhum sur la plantation Great Diamond
dans le tableau XIV. [223] Mais malheureusement aucune date exacte
n’est mentionnée. Je suppose donc que peu après que Steele &
Loxdale aient acquis la plantation en 1848, la distillation de rhum a
commencé. [47]
En
1983 la Diamond Liquors Limited (Diamond) a fusionné avec Guyana
Distilleries Limited (Uitvlugt) et leur filiale Demerara Distilleries
Limited (Enmore) avec Demerara Distillers Limited. [161] La
distillerie Diamond d’aujourd’hui (Demerara Distillers Limited)
est également située près de l’ancien domaine sucrier Diamond,
sur la rive Est du fleuve Demerara au Sud de Georgetown, sur la East
Bank Public Road qui mène de Georgetown à l’aéroport
international Cheddi Jagan. [50] [51] On parle de l’installation
d’une grosse distillerie avec une colonne continue sur la
plantation Diamond dans un livre de 1891. [18] Diamond est un des
rares producteurs de rhum survivants dont on peut retracer les
origines aussi loin dans le temps. Tous les alambics vus précédemment
ont été transférés à l’usine de distillation de rhum de
Demerara Distillers Limited. Cet héritage culturel est souvent
utilisé comme figure de proue par DDL. On peut en voir quelques uns
sur le site internet du producteur.
Mark
de Diamond <> W & SVW
|
Il
y a ma connaissance trois marks qui proviennent de Diamond. Le
Diamond 1981 Very Old Demerara 31 YO de Velier porte la mark S<W>.
Cela signifie probablement un S et un W à l’intérieur d’un
diamant. Le Diamond 1996 Full Proof Old Demerara 15 YO de Velier
comporte la mark S.V.W.. Le Diamond 1993 Full Proof Old Demerara 12
YO de Velier porte un un diamant et W juste à côté. Peut être que
cette mark est identique au <W> du Diamond 1981 de Velier.
Malheureusement je n’en connais pas vraiment la signification.
Peut-être s’agit-il des initiales d’un propriétaire précédent
(Samuel Welsh) ? Peut-être pas. Peut-être que le W signifie
Welsh ou alors la mark représente une plantation disparue depuis
longtemps qui avait été acquise par Sandbach. Le domaine Diamond a
fusionné au cours du temps avec les plantations Providence,
Herstelling, Farm (Rust & Vrede), Peter's Hall et Ruimveld (t).
![]() |
© E.H. |
Utilisons
un peu maintenant notre cervelle et faisons quelques acrobaties
mentales, chers lecteurs. Un nouveau rhum de Velier qui porte un
diamant sur l’étiquette ainsi que le millésime 1999 et 15 YO
comporte la mark <S>. Un S à l’intérieur d’un diamant.
Aussi, j’ai vu une photo où figure la combinaison S.S.N.. Cette
mark est sur l’étiquette arrière du Diamond 1996 Full Proof
Demerara Old 16 YO de Velier. Un nouvel assemblage de Luca Gargano
contient du rhum Diamond 1995 portant la mark <SV>. Lorsque
j’ai vu ces combinaisons j’ai réflechi et enfin réalisé
quelque chose. La mark S.V.W. pourrait être une combinaison de <SV>
et <W>. Peut être que l’on a simplement oublié les crochets
du diamant. Cela pourrait être la même chose pour la mark S.S.N..
Il pourrait s’agir d’une combinaison de la marque connue <S>
et de la nouvelle mark S.N.. Je n’ai jamais vu cette mark S.N.
auparavant et d’après cette théorie elle aurait pu être dans un
diamant, donc <SN>. Bien sûr cela est purement théorique,
mais certainement possible. La mark S<W> pourrait être une
mark modifiée (comme M.P.M. pour P.M.). Malheureusement il n’existe
aucune preuve pour cela, en tout cas je n’en ai pas trouvé. Au
travers des décennies la distillerie
Diamond a absorbé pas mal de plantations, qui pourraient se cacher
derrières ces marks. Je n’ai pas encore identifié la mark
originale de la distillerie. D’après
Ingvar Thomsen, dans les années 1950 la Mark SVW correspondait à la
distillerie Diamond. Peut-être s’agit’il de la Mark d’origine,
et ainsi du style de rhum originel de cette ancienne propriété?
[464]
![]() |
© E.H. |
Je
ne sais pas quels anciens alambics appartenaient à l’origine à
Diamond avant le regroupement. Mais je pense qu’il pourrait s’agir
de l’une des colonnes en metal qui sont mentionnés dans l’article
de Sascha. Sur certains embouteillages étiquetés Diamond, on
spécifie une colonne Coffey à l’origine du rhum. Mais il s’agit
juste d’une supposition de ma part.
Création:
1753
Fondateur:
John Carter
Emplacement:
Elle est située au Sud de Georgetown sur la rive Est du fleuve
Demerara.
Statut:
Active
Alambics:
Colonne en metal / Colonne Coffey (Colonne continue en metal)
------------------------------------------------------------------
Chapitre
9
-
Les
distilleries perdues de Guyane Britannique
46
des 55 distilleries existant durant l’année fiscale 1898-99 ont dû
abandonner leurs opérations avant 1938. Je connais plus ou moins
leurs noms et leurs histoires. La prochaine mise à jour 3.0 mettra
alors la lumière sur ces distilleries abandonnées. Mais voila pour
l’instant l’état des informations que j’ai à vous apporter.
Comme petit teaser voici un tableau de ladite année fiscale.
« 5.
Le nombre de distilleries enregistrées et leur production d’après
les services fiscaux figurent dans la déclaration suivante :--
District
|
Nombre
|
Gallons
| |
Gros
|
Proof
| ||
Nord Essequebo
|
3
|
124,047
|
178,527.48
|
Sud Essequebo
|
4
|
82,465
|
118,720.65
|
Fleuve Essequebo
|
2
|
30,529
|
43,830.12
|
Côte
Ouest, Demerara
|
8
|
283,482
|
409.074.86
|
Foward
|
17
|
520,523
|
750,153.11
|
Rive
ouest, Demerara
|
6
|
82,220
|
117,827.69
|
Georgetown
|
4
|
175,127.25
|
267,048.44
|
Côte
Est, Demerara
|
8
|
291,814.75
|
416,119.94
|
Mahaica
|
7
|
273,631
|
399,435.44
|
Côte
Ouest, Berbice
|
2
|
148,246
|
213,011.34
|
Fleuve River
|
5
|
169,676
|
244,968.17
|
New Amsterdam
|
4
|
331,591
|
488,111.62
|
Corentyne
|
2
|
110,489
|
165,586.67
|
55
|
Les
plantations de cette liste ont représenté la colonie de Guyane
Britannique lors de plusieurs expositions internationales. Plusieurs
noms ont été oubliés et ne sont probablement connus que des natifs
du Guyana. Cette petite partie est une sorte de souvenir de ces
distilleries perdues.
Anna Catharina
Paris Universal Exhibition 1878
(blanc et coloré)
Leonora
(De Leonora)
(Demerara, Côte Ouest)
(Carte de 1798, Lot 21, Café et coton)
Paris Universal Exhibition 1878
(blanc et coloré)
Calcutta International Exhibition 1883-84
(2 x blanc)
La Jalousie
(The Jalousie)
(Demerara, Côte Ouest)
(Carte de 1798, Lot 10, Café)
Worlds Columbian Exposition Chicago 1893
(blanc et coloré)
La Bonne Mere
(Bras de fleuve Mahaica, Rive ouest)
Worlds Columbian Exposition Chicago 1893
(blanc et coloré)
La Resouvenir
(Le Resouvenir)
(Demerara, Côte Est)
(Carte de 1798, Lot 51, Coton)
Paris Universal Exhibition 1878
(blanc et coloré)
La Union
(L'Union)
(Essequibo, Côte Ouest)
(Carte de 1798, Lot 14, Café)
Paris Universal Exhibition 1878
(blanc et coloré)
Lusignan
(Demerara, Côte Est)
(Carte de 1798, Lot 39, Coton)
Paris Universal Exhibition 1878
(coloré)
Maryville
(Leguan Island, fleuve Essequibo)
Worlds Columbian Exposition Chicago 1893
(blanc et coloré)
Melville
(Bras de fleuve Mahaica, West side)
Paris Universal Exhibition 1878
(coloré)
Worlds Columbian Exposition Chicago 1893
(blanc et coloré)
Mon Repos
( Demerara, Côte Est)
(Carte de 1798, Lot 44, Coton)
Paris Universal Exhibition 1867
(coloré)
Paris Universal Exhibition 1878
(coloré)
Montrose
(Demerara, Côte Est)
(Carte de 1798, vermutlich Lot 53 & 54, Coton)
(Carte de 1823, Lot 18)
London International Exhibition 1862
(non coloré et coloré)
Paris Universal Exhibition 1867
(non coloré et coloré)
Metenmeerzorg
(Meer Zorg & Met Zorg)
(Demerara, Côte Ouest)
(Carte de 1798, Lot 26 & 27, Coton)
Paris Universal Exhibition 1878
(coloré)
Nismes
(Nimes)
(Rive ouest de la rivière Demerara)
(Carte de 1759, Lot 7, Café)
(Carte de 1798, Lot 14, Café)
Paris Universal Exhibition 1867
(non coloré et coloré)
Worlds Columbian Exposition Chicago 1893
(blanc)
Ogle
(ehemals La Reduit)
(Demerara, Côte Est)
(Carte de 1798, Lot 62)
Paris Universal Exhibition 1878
(coloré)
Worlds Columbian Exposition Chicago 1893
(blanc et coloré)
Peter's Hall
(Petershall)
(La rive est de la rivière Demerara)
(Carte de 1759, Lot 7, Sucre)
(Carte de 1798, Lot 12, Café)
Paris Universal Exhibition 1878
(blanc)
Worlds Columbian Exposition Chicago 1893
(blanc et / ou coloré)
Philadelphia
(Essequibo, Côte Ouest)
(Carte de 1798, Lot 17, Coton)
Paris Universal Exhibition 1878
(2 x coloré)
Providence (Berbice)
(Berbice, La rive est de la rivière Berbice)
London International Exhibition 1862
(coloré)
Providence (Demerara)
(La rive est de la rivière Demerara)
(Carte de 1798, Lot 13, Surce)
Paris Universal Exhibition 1878
(blanc et coloré)
Rose Hall
(Berbice, Bras de fleuve Canje, plus tard la côte Est Berbice)
Paris Universal Exhibition 1867
(non coloré et coloré)
Paris Universal Exhibition 1878
(blanc)
Worlds Columbian Exposition Chicago 1893
(blanc et coloré)
Reliance
Berbice, Bras de fleuve Canje)
Calcutta International Exhibition 1883-84
(blanc et 2 x coloré)
Ruimveldt
(Ruimveld; ehemals Ruim Zigt)
(La rive est de la rivière Demerara)
(Carte de 1798, Lot 8, Café)
(Carte de 1823, Lot 6)
Paris Universal Exhibition 1878
(blanc et coloré)
Success
(Succes)
(Demerara, Côte Est)
(Carte de 1798, Lot 50, Coton)
Paris Universal Exhibition 1878
(blanc)
Worlds Columbian Exposition Chicago 1893
(blanc et / ou coloré)
Smythfield
(Smithfield)
(Berbice, La rive est de la rivière Berbice)
London International Exhibition 1862
(coloré)
Paris Universal Exhibition 1878
(blanc et coloré)
Schoon-Ord
(Rive ouest de la rivière Demerara)
(Carte de 1798, Lot 10, Café)
Paris Universal Exhibition 1867
(non coloré et coloré)
Worlds Columbian Exposition Chicago 1893
(blanc et non coloré)
Stewartville
(Stuart Ville; ehemals Vrees en Hoop)
(Demerara, Côte Ouest)
(Carte de 1798, Lot 22, Café et coton)
Paris Universal Exhibition 1878
(blanc et coloré)
Taymouth Manor
(Essequibo, Côte Ouest)
Paris Universal Exhibition 1867
(coloré)
Calcutta International Exhibition 1883-84
(blanc et coloré)
Tuschen de Vrienden
(La rive est de la rivière Essequibi, près de la côte)
Paris Universal Exhibition 1878
(2 x coloré)
Calcutta International Exhibition 1883-84
(coloré)
Worlds Columbian Exposition Chicago 1893
(blanc et coloré)
Vreed en Hoop
(Vreede en Hoop)
(Rive ouest de la rivière Demerara)
(Carte de 1798, Lot 5, Café)
Paris Universal Exhibition 1878
(blanc)
Wales
(Rive ouest de la rivière Demerara)
(blanc et coloré)
Worlds Columbian Exposition Chicago 1893
(blanc et coloré)
Windsor Forest
(Windsor Forrest)
(Demerara, Côte Ouest)
(Carte de 1798, Lot 9, Café)
Paris Universal Exhibition 1878
(coloré)
Zeeburg
(Zeebergen)
(Demerara, Côte Ouest)
(Carte de 1798, Lot 24, Café et coton)
Paris Universal Exhibition 1878
(coloré)
Zeelugt
(Zeelucht)
(Demerara, Côte Ouest)
(Carte de 1798 Lot 1, Sucre et café)
Paris Universal Exhibition 1878
(blanc et coloré)
Anna Catharina
(Demerara, Côte Ouest)
(Carte de 1798, Lot 18, Café & coton)
Paris Universal Exhibition 1867
Paris Universal Exhibition 1867
(non coloré et coloré)
Paris Universal Exhibition 1878
(non coloré et coloré)
Adelphi
(Berbice, New Amsterdam)
Paris Universal Exhibition 1867
(non coloré et coloré)
Anna Regina
(Essequibo, Côte Est)
Worlds Columbian Exposition Chicago 1893
(non coloré et coloré)
Aurora
(Côte Ouest Essequibo)
(Côte Ouest Essequibo)
(Carte de 1798, Lot 44)
Paris Universal Exhibition 1878
(non coloré et coloré)
Bee Hive
(New Bee Hive)
(New Bee Hive)
(Demerara, Côte Est)
(Carte de 1798, Lot 6, coton)
Paris Universal Exhibition 1867
(non coloré et coloré)
Belle Plaine
(Wakenaam Island, fleuve Essequebo)
Calcutta International Exhibition 1883-84
(blanc et coloré)
Better Hope
(Beter Hoop; Beeter Hoop)
(Demerara, Côte Est)
(Beter Hoop; Beeter Hoop)
(Demerara, Côte Est)
(Carte de 1798, Lot 58)
(Carte de 1823, Lot 15)
London International Exhibition 1862
(non coloré et coloré)
Cane Grove
Paris Universal Exhibition 1878
(blanc et coloré)
Calcutta International Exhibition 1883-84
(blanc)
Chateau Margo
(Chateau Margot)
(Chateau Margot)
(Demerara, Côte Est)
(Carte de 1798, Lot 49, Café et coton)
Paris Universal Exhibition 1878
(blanc et coloré)
Calcutta International Exhibition 1883-84
(blanc)
Cornelia Ida
(Demerara, Côte Ouest)
(Carte de 1798, Lot 17, Café et coton)
Paris Universal Exhibition 1878
(blanc et coloré)
Calcutta International Exhibition 1883-84
(blanc et coloré)
Cuming's Lodge
Cuming's Lodge
(Demerara, Côte Est)
(Carte de 1798, probable Lot 65 oder Lot 66)
(Carte de 1823, Lot 9)
Paris Universal Exhibition 1867
Paris Universal Exhibition 1867
(coloré)
Cove and John
(John & Cove; jadis Cove und The John)
(John & Cove; jadis Cove und The John)
(Demerara, Côte Est)
(Carte de 1798, Lot 19 & 20 , coton)
(Carte de 1823, Lot 49 & 50)
Paris Universal Exhibition 1878
(Carte de 1798, Lot 19 & 20 , coton)
(Carte de 1823, Lot 49 & 50)
Paris Universal Exhibition 1878
(coloré)
De Willem
(Demerara, Côte Ouest)
Paris Universal Exhibition 1878
(blanc et coloré)
Enterprise
(Demerara, Côte Est)
(Carte de 1798, Lot 30, coton)
Calcutta International Exhibition 1883-84
(Carte de 1798, Lot 30, coton)
Calcutta International Exhibition 1883-84
(blanc)
Farm
(The Farm)
(The Farm)
(La rive est de la rivière Demerara)
(Carte de 1798, Lot 18, Café)
Calcutta International Exhibition 1883-84
(Carte de 1798, Lot 18, Café)
Calcutta International Exhibition 1883-84
(blanc et coloré)
Greenfield
(Demerara, Côte Est)
(Carte de 1798, Lot 5, coton)
London International Exhibition 1862
(Demerara, Côte Est)
(Carte de 1798, Lot 5, coton)
London International Exhibition 1862
(coloré)
Paris Universal Exhibition 1878
(coloré)
Goldstone Hall
(Berbice, New Amsterdam, Bras de fleuve Canje)
(Berbice, New Amsterdam, Bras de fleuve Canje)
Paris Universal Exhibition 1867
(non coloré et coloré)
Hope
(Hoope)
Hope
(Hoope)
(Demerara, Côte Est)
(Carte de 1798, Lot 25, coton)
Paris Universal Exhibition 1867
(Carte de 1798, Lot 25, coton)
Paris Universal Exhibition 1867
(non coloré et coloré)
Paris Universal Exhibition 1878
(blanc et coloré)
Worlds Columbian Exposition Chicago 1893
(blanc et coloré)
Hope and Experiment
(Berbice, Côte Est)
(Berbice, Côte Est)
Paris Universal Exhibition 1867
(non coloré et coloré)
(non coloré et coloré)
Herstelling
(La rive est de la rivière Demerara)
(Carte de 1798, Lot 16, Café)
(La rive est de la rivière Demerara)
(Carte de 1798, Lot 16, Café)
Paris Universal Exhibition 1878
(blanc et coloré)
Houston
(jadis Zorg en Hoop)
Houston
(jadis Zorg en Hoop)
(La rive est de la rivière Demerara)
(Carte de 1798, Lot 9, Café et & cacao & sucre)
(Carte de 1823, Lot 7)
(Carte de 1798, Lot 9, Café et & cacao & sucre)
(Carte de 1823, Lot 7)
London International Exhibition 1862
(Coloré et 4 ans)
Paris Universal Exhibition 1878
(coloré)
Worlds Columbian Exposition Chicago 1893
(blanc et coloré)
(Coloré et 4 ans)
Paris Universal Exhibition 1878
(coloré)
Worlds Columbian Exposition Chicago 1893
(blanc et coloré)
Helena
(De Helena)
(Bras de fleuve Mahaica, Côté ouest)
(Carte de 1798, Lot 11, Coton)
Paris Universal Exhibition 1878
(coloré)
La Grange
(Rive ouest de la rivière Demerara)
(Carte de 1798, Lot 12, Café)
Paris Universal Exhibition 1867
(coloré)(De Helena)
(Bras de fleuve Mahaica, Côté ouest)
(Carte de 1798, Lot 11, Coton)
Paris Universal Exhibition 1878
(coloré)
La Grange
(Rive ouest de la rivière Demerara)
(Carte de 1798, Lot 12, Café)
Paris Universal Exhibition 1867
Paris Universal Exhibition 1878
(blanc et coloré)
Leonora
(De Leonora)
(Demerara, Côte Ouest)
(Carte de 1798, Lot 21, Café et coton)
Paris Universal Exhibition 1878
(blanc et coloré)
Calcutta International Exhibition 1883-84
(2 x blanc)
La Jalousie
(The Jalousie)
(Demerara, Côte Ouest)
(Carte de 1798, Lot 10, Café)
Worlds Columbian Exposition Chicago 1893
(blanc et coloré)
La Bonne Mere
(Bras de fleuve Mahaica, Rive ouest)
Worlds Columbian Exposition Chicago 1893
(blanc et coloré)
La Resouvenir
(Le Resouvenir)
(Demerara, Côte Est)
(Carte de 1798, Lot 51, Coton)
Paris Universal Exhibition 1878
(blanc et coloré)
La Union
(L'Union)
(Essequibo, Côte Ouest)
(Carte de 1798, Lot 14, Café)
Paris Universal Exhibition 1878
(blanc et coloré)
Lusignan
(Demerara, Côte Est)
(Carte de 1798, Lot 39, Coton)
Paris Universal Exhibition 1878
(coloré)
Maryville
(Leguan Island, fleuve Essequibo)
Worlds Columbian Exposition Chicago 1893
(blanc et coloré)
Melville
(Bras de fleuve Mahaica, West side)
Paris Universal Exhibition 1878
(coloré)
Worlds Columbian Exposition Chicago 1893
(blanc et coloré)
Mon Repos
( Demerara, Côte Est)
(Carte de 1798, Lot 44, Coton)
Paris Universal Exhibition 1867
(coloré)
Paris Universal Exhibition 1878
(coloré)
Montrose
(Demerara, Côte Est)
(Carte de 1798, vermutlich Lot 53 & 54, Coton)
(Carte de 1823, Lot 18)
London International Exhibition 1862
(non coloré et coloré)
Paris Universal Exhibition 1867
(non coloré et coloré)
Metenmeerzorg
(Meer Zorg & Met Zorg)
(Demerara, Côte Ouest)
(Carte de 1798, Lot 26 & 27, Coton)
Paris Universal Exhibition 1878
(coloré)
Nismes
(Nimes)
(Rive ouest de la rivière Demerara)
(Carte de 1759, Lot 7, Café)
(Carte de 1798, Lot 14, Café)
Paris Universal Exhibition 1867
(non coloré et coloré)
Worlds Columbian Exposition Chicago 1893
(blanc)
Ogle
(ehemals La Reduit)
(Demerara, Côte Est)
(Carte de 1798, Lot 62)
Paris Universal Exhibition 1878
(coloré)
Worlds Columbian Exposition Chicago 1893
(blanc et coloré)
Peter's Hall
(Petershall)
(La rive est de la rivière Demerara)
(Carte de 1759, Lot 7, Sucre)
(Carte de 1798, Lot 12, Café)
Paris Universal Exhibition 1878
(blanc)
Worlds Columbian Exposition Chicago 1893
(blanc et / ou coloré)
Philadelphia
(Essequibo, Côte Ouest)
(Carte de 1798, Lot 17, Coton)
Paris Universal Exhibition 1878
(2 x coloré)
Providence (Berbice)
(Berbice, La rive est de la rivière Berbice)
London International Exhibition 1862
(coloré)
Providence (Demerara)
(La rive est de la rivière Demerara)
(Carte de 1798, Lot 13, Surce)
Paris Universal Exhibition 1878
(blanc et coloré)
Rose Hall
(Berbice, Bras de fleuve Canje, plus tard la côte Est Berbice)
Paris Universal Exhibition 1867
(non coloré et coloré)
Paris Universal Exhibition 1878
(blanc)
Worlds Columbian Exposition Chicago 1893
(blanc et coloré)
Reliance
Berbice, Bras de fleuve Canje)
Calcutta International Exhibition 1883-84
(blanc et 2 x coloré)
Ruimveldt
(Ruimveld; ehemals Ruim Zigt)
(La rive est de la rivière Demerara)
(Carte de 1798, Lot 8, Café)
(Carte de 1823, Lot 6)
Paris Universal Exhibition 1878
(blanc et coloré)
Success
(Succes)
(Demerara, Côte Est)
(Carte de 1798, Lot 50, Coton)
Paris Universal Exhibition 1878
(blanc)
Worlds Columbian Exposition Chicago 1893
(blanc et / ou coloré)
Smythfield
(Smithfield)
(Berbice, La rive est de la rivière Berbice)
London International Exhibition 1862
(coloré)
Paris Universal Exhibition 1878
(blanc et coloré)
Schoon-Ord
(Rive ouest de la rivière Demerara)
(Carte de 1798, Lot 10, Café)
Paris Universal Exhibition 1867
(non coloré et coloré)
Worlds Columbian Exposition Chicago 1893
(blanc et non coloré)
Stewartville
(Stuart Ville; ehemals Vrees en Hoop)
(Demerara, Côte Ouest)
(Carte de 1798, Lot 22, Café et coton)
Paris Universal Exhibition 1878
(blanc et coloré)
Taymouth Manor
(Essequibo, Côte Ouest)
Paris Universal Exhibition 1867
(coloré)
Calcutta International Exhibition 1883-84
(blanc et coloré)
Tuschen de Vrienden
(La rive est de la rivière Essequibi, près de la côte)
Paris Universal Exhibition 1878
(2 x coloré)
Calcutta International Exhibition 1883-84
(coloré)
Worlds Columbian Exposition Chicago 1893
(blanc et coloré)
Vreed en Hoop
(Vreede en Hoop)
(Rive ouest de la rivière Demerara)
(Carte de 1798, Lot 5, Café)
Paris Universal Exhibition 1878
(blanc)
Wales
(Rive ouest de la rivière Demerara)
(Carte de 1823, Lot 23)
Paris Universal Exhibition 1878(blanc et coloré)
Worlds Columbian Exposition Chicago 1893
(blanc et coloré)
Windsor Forest
(Windsor Forrest)
(Demerara, Côte Ouest)
(Carte de 1798, Lot 9, Café)
Paris Universal Exhibition 1878
(coloré)
Zeeburg
(Zeebergen)
(Demerara, Côte Ouest)
(Carte de 1798, Lot 24, Café et coton)
Paris Universal Exhibition 1878
(coloré)
Zeelugt
(Zeelucht)
(Demerara, Côte Ouest)
(Carte de 1798 Lot 1, Sucre et café)
Paris Universal Exhibition 1878
(blanc et coloré)
Voilà
donc uniquement les plantations qui ont représenté leur colonie à
un évènement public ou une exposition. Une source de 1851 reprend
d’autres plantations encore, qui distillaient du rhum. Leurs noms
étaient Kitty, Vryheid's Lust & Anchor Sheet, Cuming's Lodge,
Montrose, Felicity, Amersfort, Vive La Force, Golden Grove, Eccles,
Profit, Richmond Hill, Good Intent, Nouvelle Flandres, Cloonbrock,
Garden of Eden, Aberdeen, Better et Henrietta.
De
plus, cette source a aussi confirmé la production de rhum dans les
plantations suivantes : Nismes, La Bonne Intention, Great
Diamond, Greenfield, La Grange, Windsor Forrest, Marysville et
Zeeburg. [223]
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Chapitre
10
-
Les
débuts de l’existence
(Demerara Distillers Limited)![]() |
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L’origine
de cette société remonte à une filiale de Bookers. Demerara
Distillers Limited a été officiellement créée en 1952. On ne
retrouve pas ce nom dans les années 1950. On trouve plutôt une
société bien distincte : Albion Distilleries Limited. Cette
société a été créée en 1952 et a également bâti une nouvelle
distillerie sur le domaine Albion à la fin 1956. C’est cette
société qui a récupéré les Vat stills de Port Mourant (fermée
en 1955) et qui les a utilisé dans cette nouvelle distillerie
probablement jusqu’en 1971 avant qu’Albion ferme à son tour et
que le matériel soit amené à l’usine principale de Booker sur le
domaine Uitvlugt. [423] [424] On
doit remonter un peu plus loin pour comprendre toute l’histoire. En
1946 la société United Rum Merchants au travers de la fusion des
trois sociétés Alfred Lamb & Son Limited, White Keeling (rum)
Limited et Portal, Dingwall & Norris Limited a été créée. Ces
trois sociétés étaient des sous-traitants d’U.R.M.. Cette
société même (U.R.M.) a été incorporée au groupe Booker en
1947. En 1951, la nouvelle filiale Booker Rum Company Limited est
arrivée sous l’égide d’United Rum Merchants. La Booker Rum
Company Limited s’occupait depuis 1951 des activités marketing du
rhum de Guyane Britannique. Le rhum en gros et d’autres produits
étaient gérés par un autre sous-traitant, qui a aussi été ajouté
à URM en 1951. Il s’agissait de Booker Produce Limited. Ce sont
ces sociétés qui régnaient sur tout le marché autour du rhum.
[425] [426] [427] [429]
En
1960 on a construit une nouvelle distillerie sur le domaine Uitvlugt
qui a été mise en exploitation la même année. A partir de cette
année-là dans cette distillerie, d’après ce que je sais, on
produisait du gin pour le marché local et les Antilles. C’était
Bookers Rum Company Limited qui assemblait les rhums et l’exportait
avec le gin. Cependant il n’était pas produit par Bookers Rum
Company Limited mais par Albion Distillers Limited. Cette société
possédait les distilleries d’Albion, Uitvlugt, Enmore, Versailles,
La Bonne Intention (fermée en 1951), Skeldon (fermée en 1960) et
Blair Mont (fermée en 1962). La distillerie Albion a fusionné avec
Uitvlugt entre 1967 et 1971 et la petite distillerie du domaine
Versailles a également fusionnée avec Enmore durant la même
période. En 1975 il ne restait que deux distilleries. Enmore et
Uitvlugt. Je pense qu’il n’était qu’une question de temps
avant que Booker ne ferme également la distillerie Enmore. [428]
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Qu’en
est-il de la distillerie du domaine Diamond ? Elle a appartenu
d’abord à Sandbach, Parker & Company puis ensuite à la
Demerara Company Limited (à partir de 1891) et en 1967 la
distillerie a été transférée à Diamond Liquors Limited, qui géra
alors les affaires autour du rhum. En 1969 la société « Jessel
Securities » a acheté les sous-traitants de la Demerara
Company en Guyane Britannique, a fait faillite et c’est alors que
les sous-traitants ont été nationalisés. En 1976, l’année de la
nationalisation, la société publique Guyana Liquors Corporation
(GLC) a repris la Diamond Liquors Limited. Peu après, la filiale de
Bookers, la Guyana Distilleries Limited suivit. En 1976 la Guyana
Liquors Corporation possédait les trois dernières distilleries du
Guyana. : Uitvlugt, Enmore et Diamond. C’est G.L.C. qui a
planifié la modernisation de la WARF en 1977 et la construction d’un
nouveau terminal pour les citernes en 1978. En 1983, ces deux
sociétés ont été fusionnées en Demerara Distillers Limited
(DDL). Dans un contexte d’efficacité croissante et de maitrise des
coûts tous les alambics ont finalement été centralisés en une
distillerie. Cela est revenu à la fermeture de la distillerie Enmore
entre 1993 et 1995 et à la fermeture d’Uitvlugt en 2000. Seul un
entrepôt plein de futs resta sur le domaine Uitvlugt. Demerara
Distillers Limited appartient en réalité à la Guyana Liquors
Corporation. En 1992 la marque « El Dorado » était créée
avec un assemblage de 15 ans. Il y avait aussi un assemblage de 12
ans, le "King of Diamonds 12 YO". Il y avait également un
"Fruit Cured Rum", probablement le successeur du "Bookers
Fruit Cured Rum", et un rhum appelé "High Wine('s)".
Apparement DDL voulait se démarquer de la vente en gros. La marque
de rhum El dorado est embouteillée au Guyana. En 2002, l’El Dorado
21 est ajouté à la palette de DDL. De plus le "King of
Diamonds 12 YO" a disparu et l’El dorado 12 YO a pris sa
place. Toutefois, je ne sais pas exactement quand cela a eu lieu. Le
premier "El Dorado 25 YO" est probablement apparu sur le
marché international vers 2005/2006 et était le premier du genre
(Distillé en 1980). Depuis ça il y a des sorties régulières de
cette édition limitée ou « premium blend ». Pour les
aficionados et les connaisseurs DDL a sorti la série « Single
Barrel » en 2007. A cet effet, les styles (marks) EHP (Enmore),
ICBU (Uitvlugt) et PM (Port Mourant) ont été embouteillés. On ne
peut trouver ces embouteillages en Europe qu’à des prix utopiques.
Comme
bien d’autres embouteilleurs officiels DDL utilise du sucre pour
« relever » un peu ses rhums ou pour les rendre
accessibles à plus de consommateurs. Un connaisseur amateur nommé
Jonny Dreier a testé de nombreux rhums à l’aide de sa propre
méthode et a mesuré leur contenance en sucre et les résultats sontpeu réjouissants. Le rhum le plus « dopé » est de loin
l’El Dorado 25 YO, mais cela ne me surprend pas vraiment.
Pourquoi ? Un rhum vieilli 25 ans sous les tropiques a une forte
influence boisée dans son profil aromatique. Ce goût n’est pas
facile à apprécier pour le grand public et plutôt accessible aux
aficionados et connaisseurs. On peut très bien masquer ce goût
boisé et acéré avec du sucre. On peut faire disparaitre le goût
boisé en arrière-plan du profil aromatique ou le noyer
complètement. Les seuls produits sans sucre de DDL que je connaisse
sont les rhums single barrel. De ceux-là, je ne connais que la
version « PM » et il s’agit d’un bon rhum, mais qui a
malheureusement été dilué à mort (40%abv).
--------------------------------------------
Conclusion:
![]() |
© E.H. |
Le
simple fait que même les très vieux embouteillages avec les anciens
noms sur les étiquettes n’aient pas été distillés dans ces
distilleries donne un arrière-goût doux-amer à chaque lampée.
C’est moins dramatique pour les rhums provenant des vieux Pot
stills en bois ou de la colonne Coffey Enmore. Mais c’est très
décevant dans le cas d’Albion, Blairmont, La Bonne Intention et
Skeldon. Les alambics de ces distilleries ont soit changé d’endroit,
soit ont été mis hors service quand un alambic pouvait produire la
même qualité et le même profil aromatique. Cela se comprend d’un
point de vue économique. Les marks sur les futs ne sont donc pas
directement liées aux alambics. Sascha pense qu’elles sont liées
aux anciens styles de rhum. Elles identifient donc le style de rhum
qui était fait dans ces distilleries depuis longtemps fermées.
![]() |
© E.H. |
Si
vous vous dites : « Attends une minute…. Versailles
c’est V.S.G. non ? » Oui en effet c’est ça. Le style
de rhum VSG était distillé sur l’ancienne plantation Versailles
et était aussi produit avec ce Pot still. Mais comme je l’ai dit
plus haut : Un alambic est capable de produire plusieurs sortes
de styles. Le style de rhum V.S.G. remonte à la plantation
Versailles. Le style de rhum K.F.M. de 1991 vient aussi de ce Pot
Still, qui était à Enmore en 1991, mais correspond à l’ancien
style de Lusignan, qui a été racheté bien avant Versailles.
Malheureusement les rhums plus anciens qui remontaient directement à
Lusignan n’ont pas survécu. Seul un indice nous dit que Lusignan
produisait du rhum. Cela signifie que beaucoup de rhums de Pot Still
étiquetés Enmore pourraient provenir du Pot Still simple en bois
Versailles. Je suppose également que d’autres styles de rhum
d’autres plantations ont disparu lors de leurs fusions. Et je pense
aussi que la raison est simple : les styles étaient trop
proches. Le style de rhum de Versailles a-t’ il toujours été
V.S.G. ? Le nom du rhum de Versailles a-t’ il toujours été
VSG ? Il y a peu de chances, car les deux autres plantations de
la mark (Schoon Ord, Goed Furtuin) ont été ajoutées plus tard,
probablement après que la plantation Versailles ne distille du rhum.
On dit que toutes les distilleries du 17è siècle distillaient du
rhum. Qu’est devenu le style de rhum de la plantation Schoon Ord,
qui a présenté du rhum à l’exposition universelle de Paris en
1867 ? Ce sont des questions sans réponse.
J’espère
ne pas vous avoir trop déboussolés. Il s’agit tout au moins d’une
théorie très intéressante. Malheureusement il n’y a aucun indice
qui permet de la prouver. Je le souligne encore : ce ne sont que
des suppositions de ma part.
La
question des alambics reste entière. Pourquoi garder deux alambics
similaires quand on en a besoin que d’un ? Il est plus
économique d’un détruire un et de garder l’autre en service.
Quiconque a déjà gouté aux rhums du Pot still simple en bois et du
Pot still double en bois sera d’accord, un alambic ne peut pas
remplacer l’autre. Les profils aromatiques sont tellement
différents. Cette circonstance heureuse a peut-être sauvé le Pot
still simple en bois Versailles. Le Pot still double en bois Port
Mourant n’arrivait sûrement pas à imiter les rhums de l’alambic
Versailles.
Une
petite note de ma part : Il y avait beaucoup de plantations du
même nom au même moment. Par exemple Mon Repos. Il y en avait une
sur la côte Est du Demerara et une autre sur la rive droite du
fleuve Berbice. De même pour Providence et bien d’autres noms. Le
manque d’inventivité du passé peut encore prêter à confusion
aujourd’hui. ;)
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Objet
Le
but principal de cet article était en fait de satisfaire ma propre
curiosité. Au départ il ne s’agissait même pas d’un article.
C’était juste une poignée de notes et de liens dans un fichier
texte. Après quelques semaines il y avait trop de données pour en
garder une vision claire sans leur donnée une forme correcte. Alors
j’ai décidé d’apporter de l’ordre à ce chaos et l’article
en conséquence a pris sa forme de départ. Au cours du temps
l’article ne faisait que grandir. J’ai ajouté de plus en plus de
détails. On s’en aperçoit dans l’ordonnancement chaotique des
renvois. Ce qui m’a beaucoup surpris avec le temps, c’étaient
les semi-vérités disséminées à travers l’internet. L’année
de fondation de Port Mourant par exemple, était l’une de ces
semi-vérités, ou plutôt l’une de ces erreurs. Plusieurs sources
coloniales et cartes montraient qu’il n’y avait peut-être jamais
eu de plantation de canne à sucre portant ce nom en 1732 sur le côte
Est de Berbice, sans parler d’une distillerie.Port Mourant était
au départ une simple plantation de coton. Je pense que vous serez
d’accord avec moi quand je dis que l’on ne peut pas obtenir de
mélasse du coton afin de produire du rhum. Je n’ai trouvé aucun
indice ni preuve de l’année 1732 en relation avec la plantation
Port Mourant.
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Considérations
J’espère
avoir éclairci une partie des malentendus à propos des rhums du
Demerara et de leurs distilleries. Je n’affirme pas tout savoir. Je
n’affirme pas non plus que cet article ou travail est parfait ou
même complet. Il est plein de trous et il reste beaucoup de
questions sans réponse. Mais je commence à réaliser que certaines
questions n’auront jamais de réponse. Le rhum du Demerara ne
perdra jamais cette aura fascinante des choses disparues. Et je dois
admettre que… je suis heureux que ce soit le cas.
Marco Freyer
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